Critique Stupéfix !

Avis critique rédigé par Gaetan G. le dimanche 14 janvier 2024 à 08h00

Polynectar de Cash & Guns

On ne va pas se le cacher, la licence Harry Potter traverse actuellement une passe difficile. Hier adulée pour son acceptation de la différence, il n’aura fallu que quelques tweets malheureux à son autrice J.K. Rowling pour déclencher un mouvement de haine sans précédent. Elle n’a même pas été conviée à l’épisode anniversaire des 20 ans de la licence, c’est dire…

Le jeu vidéo événement Hogwarts Legacy : l'Héritage de Poudlard, au-delà du débat sur ses qualités et ses défauts, s’est mangé polémique sur polémique pendant son développement (sur les droits d’auteurs touchés par J.K. Rowling, sur la représentation des elfes de maisons, sur le Quidditch, etc.) – au point où ils ont probablement dû recruter Sam le pompier comme Community Manager.

Là-dessus, l’éditeur Repos prod s’est décidé à sortir, complètement à l’improviste, un jeu qui s’appuie en plein sur l’univers du sorcier à la cicatrice : il s’agit bien entendu de Stupéflip !, le titre dont nous allons parler aujourd’hui.

Faisons fi de la polémique, et regardons posément ce qu'il vaut. Sur la base, il n'y a pas trop de débat : il s’agit d’un jeu familial et bon enfant, comme la majorité du catalogue de son éditeur. Mais s’adresse-t-il avant tout aux fans, plus indulgents, ou aux ludistes pas particulièrement focalisés sur la licence ? C’est ce qu'on va voir maintenant.

Un matériel qui ensorcelle…

La première force du titre, c’est vraiment son matériel qui met les petits plats dans les grands. La boîte contient 8 baguettes en plastique, une centaine de cartes et une vingtaine de jetons en cartons.

Les fameuses baguettes vont obligatoirement faire craquer vos têtes blondes. Le toucher en main est bon, tandis que l’épaisseur est suffisante pour que la baguette ne se déforme pas si on la malmène. Cerise sur le gâteau, les fans identifieront sans problème les baguettes des principaux protagonistes de la licence. En revanche, elles sont fabriquées par rotomoulage. C’est un procédé efficace d’un point de vue industriel, mais il donne un rendu grossier et brillant - en bref, la solidité se fait clairement au détriment du rendu qui fait plutôt chinoiserie à deux balles…

Les cartes font également leur petite impression : la plupart possèdent en effet une métallisation discrète. La carte scintille quand on la manipule. C’est parfaitement accessoire, certes, mais cela donne un fini luxueux pas désagréable à la chose.

Citons aussi un thermoformage très bien fait, conçu tout à la fois pour ranger confortablement le matériel et pour stocker les cartes remportées par les différentes maisons en cours de partie.

Niveau règle, rien à dire de particulier. Le manuel tient sur 4 pages bien écrites, tout est facile à comprendre y compris si vous n’êtes pas habitués aux jeux de société moderne. Et comme d’habitude chez Repos Prod, le manuel est dispo en version PDF en ligne en cas de souci.

… Au service d’une mécanique efficace …

Passons maintenant à la mécanique. Chaque tour de jeu commence par le tirage de 9 cartes récompenses : 8 sont piochées aléatoirement, auquel on rajoute la carte « devenir le chouchou » qui permet à celui qui la prend de devenir le premier joueur.

Ensuite, chacun prépare son sort. Tout le monde choisit secrètement une carte « stupéfix » ou « sort raté » de sa main. On commence la partie avec 8 cartes (3 sorts réussis et 5 sorts ratés), sachant qu’on va toutes les jouer puisqu’une partie dure 8 tours.

Une fois que tout le monde a choisi son sort, le premier joueur compte jusqu’à trois et tout le monde cible un adversaire avec sa baguette.

On se laisse quelques secondes d’observations, après lesquelles le premier joueur compte de nouveau jusqu’à trois. Tout le monde a alors le choix entre :

Continuer à lancer son sort ;
Se protéger en lançant un sort « Protego » sur soi-même.

On applique ensuite les effets des sorts :

Si vous avez lancé un sort « Protego », vous êtes protégé. Vous couchez votre petite figurine de drapeau devant vous. Aucun sort ne vous touche mais vous ne le collecterez pas de récompense ;
Si vous êtes frappé par un ou plusieurs sorts « Stupefix », vous couchez également votre figurine mais prenez en plus 1 pion « retard » par sort qui vous touche ;

Les sorts ratés n’ont aucun effet (positif comme négatif). Vous restez dans la manche, sauf si vous avez été stupéfixé par un petit camarade bien entendu. Deuxio, la résolution des sorts est simultanée : si deux joueurs se lancent mutuellement un sort « Stupefix », ils sont éliminés tous les deux.

Les joueurs encore debout se partagent alors les récompenses. En commençant par le premier joueur (ou par le joueur le plus proche dans le sens horaire s’il n’est plus en jeu), chaque joueur prend une carte récompense disponible au centre de la table. On passe au suivant, et ainsi de suite jusqu’à ce que toutes les cartes soient prises. Si un seul joueur a survécu, par exemple, alors il repart avec la totalité des 9 cartes. Il y a trois types de bonus :

Des cartes spéciales à effet immédiat ;
Des cartes « points » ;
Des cartes « potions » ;
Des cartes « faveurs ».

A la fin du huitième et dernier tour, on fait le total :

Les cartes « points » d’additionnent ;
Celui qui possède le plus de cartes « potions » marque 100 points, les autres n’ont rien ;
Les cartes « faveurs » sont cumulatives (la première vaut 10, la deuxième vaut 20 et ainsi de suite) ;
Celui qui a le plus de pions retard (et qui s'est donc mangé le plus de Stupefix, c'est la double-peine cette histoire) se mange un bon gros malus de 100 points.

Vous vous rappelez sans doute qu’il y a 4 maisons à Riri Potter (les gentils, les enfoirés et les deux du fond dont on se fiche complètement). Quand il y a entre deux et quatre joueurs, chacun prend la sienne et il n’y a pas trop de question à se poser. Mais quand on joue à plus de 4, il devient nécessaire de constituer des équipes. Dans cette configuration, les points sont collectifs tandis que les faveurs, les potions et les jetons retards sont individuels. En cas de nombre impair, les règles prévoient une mise en place légèrement adaptée pour deux joueurs qui sont considérés comme jumeaux.

Bref, le jeu impose un peu de coopération, mais pas trop non plus car à la fin ce n'est pas une équipe mais un joueur unique qui gagne.

… C’est marrant, ça rappelle quand même sacrément quelque chose

Inutile de tourner autour du pot… Stupefix est en effet une rethématisation de Cash & Gun, du même auteur et chez le même éditeur. A première vue, c’est plutôt une bonne chose par Cash & Gun est considéré comme un grand classique du party-game festif et familial. Il y a quand même quelques différences entre les deux titres, mais force est de constater qu’elles sont loin de bouleverser la formule.

Tout d’abord, Stupéfix fait intervenir des jetons « retards » au lieu des blessures. Il y a bien un malus pour celui qui en aura récupéré le plus, mais plus personne n’est éliminé en cours de route. Citons aussi le jeu en équipe lorsqu’on joue entre 5 et 8, ce qui force à changer ses stratégies et à faire preuve d’un minimum de coopération.

Le souci, c’est qu’il y en a aussi un peu en moins dans la boîte ! En effet, Stupéfix ne reprend pas la variante évoluée de Cash & Gun, qui permettaient de donner de la profondeur stratégique aux parties en offrant un pouvoir asymétrique (et public) à chaque joueur. Et ça, c’est carrément dommage !

Alors, on sort le goudron et les plumes ?

Forcément, face une telle proposition, certains seront tentés de sortir les fourches. Après tout, on a affaire à une repompe d’un titre existant, plaqué sur une licence à la mode, avec des variantes en moins et un prix qui passe tranquillement de 30 à 40 euros. Dis comme ça, ça fait peu vendeur en effet.

Pourtant, quand on y réfléchit, c’est une proposition qui fait sens. Primo, Cash & Guns n’est plus du tout adapté aux enfants. Aujourd’hui, on ne peut plus leur proposer d’incarner des maffieux qui se tirent dessus, en leur donnant au passage des petits pistolets en mousse pour que ça fasse plus vrai. Le titre avait donc besoin d’un sérieux coup de polish pour pouvoir être proposé aux 8 /12 ans, et c’est chose faite. De plus, la licence Harry Potter colle parfaitement à l’esprit du jeu, tout en parvenant à désarmer complètement la violence qu’il y a potentiellement derrière.

De plus, le matériel extrêmement qualitatif justifie amplement le passage de 30 à 40€. Les baguettes sont toutes différentes, et encore une fois le feuillage métallisé sur les cartes donne un fini franchement luxueux. Et au passage, n’oublions pas qu’il y a cette fois-ci une licence à payer.

En conclusion, tous les parents peuvent foncer sans problème. La mécanique est efficace, c’est simple et ça fait marrer tout le monde. Et c’est du caviar en spray si vos moutards sont fans d’Harry Potter.

Reste cette histoire de mode de jeu manquant. L’éditeur, contacté, explique que l’idée était de simplifier au maximum la mécanique afin de conserver un jeu le plus simple et familial possible. Ça se défend, mais on aurait apprécié que ces fameux pouvoirs soient disponibles sous forme de mini-extension, pourquoi pas en Print&Play.

Accio résumé

Public cible : familial. Idéal pour les enfants de 5/6 ans jusqu’à 10/12.
Le titre est donné pour du 8+, mais mon lardon de 5 ans y joue sans problème. Sans stratégie non plus, certes, mais avec quelques conseils discrets des adultes ça passe. De toute manière il s’amuse beaucoup, et c’est bien là le principal. Bref, du jeu familial comme on l’aime.

Nombre de joueur : 4 à 8. Plus on est de fous, plus c’est l’anarchie.
De 3 à 4, le jeu est individuel, au-dessus il se joue en équipe. Le titre est clairement pensé pour être joué à 5 et plus.

Durée de partie : 20 minutes
C’est court, et bien adapté au public. La mise en place et l’explication des règles prennent 5 minutes à tout casser, c’est également appréciable.

Interaction : compétitif, avec une dose de jeu en équipe à 5 et plus
Le concept consiste à se balancer des sorts mutuellement, mais avec le sourire. C’est compétitif, donc, mais gentil.

Rejouabilité : sympa pour une ou deux parties de temps en temps
C’est frais, c’est fun et les enfants aiment beaucoup. En revanche, la disparition des variantes évoluées par rapport à Cash & Guns limite la rejouabilité

Courbe de progression : aussi plate que l’encéphalogramme de Nabila
Clairement, on ne joue pas à Stupéfix ! pour se fumer les neurones.

La conclusion de Gaetan G. à propos du Jeu de société : Stupéfix !

Gaetan G.

Stupéfix est un jeu d’ambiance familial dans l’univers de Harry Potter. Le titre repose sur une mécanique tout simple. Chaque joueur détient 8 cartes, dont 3 sorts réussis et 5 sorts ratés. A chaque tour, tout le monde choisit un de ces sortilèges et vise les autres avec sa baguette magique. On résolut ensuite le tour en éliminant ceux qui se protègent et ceux qui se sont mangé un sort réussi, et les survivants se répartissent les 9 cartes de récompense.

Le principe vous rappelle quelque-chose ? C’est normal, puisque Stupéfix est une rethématisation de Cash & Guns dans l’univers du sorcier à la cicatrice. Il y a bien quelques changements apportés ici ou là pour coller au thème, mais globalement tout a été conservé à l’identique.

D’un côté, c’est une bonne chose. Cash & Guns est en effet un daron du jeu d’ambiance, dont les qualités ne sont plus à démontrer ! Le concept marche tout aussi bien avec des flingues qu’avec des baguettes magiques, sauf que c’est quand même vachement moins violent. Sans surprise, Stupéfix fonctionne donc parfaitement: collez-ça dans les pattes de moutards de 8 à 12 ans fans d’Harry Potter, et vous êtes sûr de leur mettre des étoiles pleins les yeux – et accessoirement de leur faire passer un super après-midi.

D’un autre côté, on peut regretter que les auteurs se soient contentés de cloner l’ancêtre : il n’y a pas de nouvelle variante, pas de mini-extension, bref pas de nouveauté suffisamment originale pour (re)justifier un passage à la caisse si vous possédez déjà Cash & Guns. Il y en a même un peu moins, puisque l’extension apportant des pouvoirs asymétriques a disparu corps et bien au passage.

De fait, difficile de conseiller Stupéfix hors du cercle des fans de Harry Potter, puisque l’original propose plus et se trouve à vil prix en occasion.

Dernières critiques de Gaetan G.

Critiques de Jeux de Gaetan G.

On a aimé

Une pure repompe de Cash & Guns, dont la mécanique fonctionne toujours aussi bien...
... Mais dans l'univers de Harry Potter, qui lui donne un vrai coup de jeune
Un matériel magnifique. Les enfants vont avoir du mal à rendre les baguettes !
Nettement plus adapté aux enfants que l’original, où il y avait des pistolets, des maffieux qui s’entre-tuent et des gens qui meurent

On a moins bien aimé

On aurait aimé l’ajout de quelques variantes additionnelles
Au fait, elles sont où, les variantes évoluées de Cash & Guns ?
40 euros, ça commence à faire cher pour du jeu familial

► le Jeu de société Stupéfix !

► L'oeuvre Harry Potter

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