Critique Le chant de Susannah #6 [2005]

Avis critique rédigé par Nicolas L. le lundi 24 octobre 2005 à 09h36

Comme-à-commala ou Stephen King, star de la chanson…

Le lecteur avait laissé les membres du ka-tet de Roland dans une position délicate à la fin du précédent opus, les Loups de la Calla. Après la victoire sur les loups, l’indésirable et sauvage Mia s’est emparée du corps de Susannah, repoussant l’esprit de la jeune femme au fond de son subconscient, et enceinte jusqu’aux dents de son p’tit gars, elle a passé une des portes dimensionnelle pour se rendre à un mystérieux rendez-vous. Les quatre membres restant décident de se séparer. Un premier groupe composé de Roland et de Eddie iront dans le Maine de la fin des années 70 à la rencontre du libraire Tower et d’un jeune écrivain nommé Stephen King, l’autre, avec Jake, le père Callahan et Ote, passe la porte à la poursuite de Mia, dans le New York de 1999.
Après le gros pavé des Loups de la Calla, le Chant de Susannah peut sembler, au premier abord, comme le résultat d’un manque d’inspiration de l’auteur, avec les 500 pages de la superbe édition illustrée J’ai Lu. Mais dés les premières lignes, l’on s’aperçoit que l’on a fait erreur. Cette relative ‘’minceur’’ n’est pas le résultat d’un début de désintéressement, mais bien au contraire, celui d’un calcul volontaire et d’une précision démoniaque.
Cet étrange opus est construit à la manière d’un chant, comme une sorte de chanson de geste de 13 couplets (et non pas 19 !), qui est clos par un chapitre complètement dingue, une sorte d’autobiographie farfelue nommée Coda. Chaque couplet, d’environ une vingtaine de page, raconte de façon alternée les aventures des trois ‘’groupes’’ ; Mia/Susannah/Detta/Odetta, Eddie/Roland/Cullum (un membre de passage) et Jake/Callahan/Ote, de manière très claire et très habile, sans que l’on y perde une seule fois son latin. Chaque couplet se termine par deux petites créations de quelques lignes ; soliste et chœur, qui mises bout à bout, composent les textes d’une sorte de chanson populaire et dansante. C’est un véritable exercice de style, qui se promène entre la science fiction, le fantastique et l’onirique, délicat et pleinement réussi. Un régal de construction qui sent parfois un peu l’artificiel et le démonstratif, mais qui reste toujours très agréable à parcourir. Et intriguant.
Malgré son titre, le roman ne se concentre pas essentiellement sur l’histoire de Susannah, dont le corps à été kidnappé par Mia, mais aussi sur le personnage ambiguë de Tower, un libraire complètement obsédé par les livres, et sur la rencontre de Eddie et Roland avec l’écrivain Stephen King. C’est à mon avis, un des coté les plus intéressants du livre, car l’auteur en profite pour poser ‘’délicatement’’ des accents très pertinents sur sa personnalité et le déroulé de sa carrière – et s’excuser auprès de sa chère Tabby, qui sait ? Bien sur, par ailleurs, on apprend énormément de choses sur Mia ainsi que sur les enjeux dont dépend la destinée de son bébé. Beaucoup plus de révélations, d’ailleurs, en ces quelques pages que durant toute la lecture des Loups de la Calla. Cette information se fait par l’intermédiaire d’une ‘’explication’’ assez tendue entre Mia et Susannah, dans un décors médiéval puis ‘’westernien’’, de façon très dense et étrangement rapide, de manière exutoire, comme si l’auteur voulait définitivement sceller les fondements de sa mythologie pour se libérer des incertitudes. Une méthode très différente de ses précédents opus, mais très riche en révélations assez surprenantes.
Autre nouveauté dans la saga de la Tour Sombre ; l’humour. Dés le début de l’œuvre, l’auteur donne le tempo, lorsque Susannah utilise le talisman pour libérer un individu de ses problèmes de constipation. Ce ton léger et amusant, présent durant presque toute la lecture, est totalement nouveau dans la série, car à l’instar de son héros des débuts – Roland – les précédents volumes en étaient totalement dépourvu. On dirait presque qu’avec la mise en semi-retraite du vieux pistolero, l’humour peut enfin se montrer en plein jour sans prendre une balle dans la tête. Ce nouvel ingrédient atteint son point culminant lors de la rencontre entre l’auteur et les pistoleros. Là, d’une façon très habile, il nous donne un amusant petit récapitulatif de sa personnalité, allant même nous laisser penser qu’il fut un ivrogne parfois assez ahuri, et qu’il n’aimait pas du tout un de ses romans… intitulé le Pistolero. Cette rencontre entre un romancier et ses créations, qui le regardent au début comme un dieu, puis qui s’aperçoivent qu’il n’est finalement qu’un mec sympa, mais un peu léger et un peu trop penché sur la bière, est vraiment géniale.
Le ton devient un peu plus sérieux dans le dernier couplet, lors de l’arrivée de Mia-Susannah au lieu de rendez-vous. Et, enfin, ce sacré King nous dévoile enfin la véritable identité des Ignobles, à sa manière, bien sur. Et je peux vous dire que l’on n’est pas déçu. On tombe en effet dans un véritable tableau surréaliste, et cauchemardesque, dans une clinique inter-dimensionnelle qui ressemble à une véritable antichambre de l’enfer, transformée en maternité pour l’occasion.
Mais le roman ne s’achève pas sur la naissance de cet antéchrist à la sauce Stephen King, car vient alors le Coda. Ce chapitre est construit à la manière d’un journal intime, qui débute à la date où les pistoleros sont sensés avoir rendu visite à Stephen King. Cela raconte comme son idée de continuer la saga revient de manière spontanée et obsessionnelle, dessine un autoportrait grinçant et peu flatteur, et s’achève sur sa mort le 19 juin 1999 – l’auteur a réellement eu un très grave accident à cette date, et des rumeurs sur son décès ont même couru. Hé oui, 19/06/1999, tout en reviens au 19, je n’en suis pas revenu de ne pas y avoir pensé, quel filou ce Stevie !! Et quel Romancero !

La conclusion de à propos du Roman : Le chant de Susannah #6 [2005]

Auteur Nicolas L.
100

Véritable exercice de style jubilatoire et dynamique, le Chant de Susannah, est à mon avis le meilleur opus des 6 premiers volumes de la saga de la Tour Sombre, qui en devient chanson de gestes. Trois histoires passionnantes, pleines de rebondissement, racontées avec humour et, on le sent, passion font de ce roman un des meilleurs jamais écrit par ce brillant écrivain.

On a aimé

  • Un extraordinaire exercice de style
  • Une maîtrise narrative parfaite
  • L’humour
  • Une histoire passionnante

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