Entretien avec... Jawad
Il nous parle des jeux de rôle Mournblade et Wasteland...

Sorti en décembre dernier, Mournblade est la nouvelle incarnation en jeu de rôle du cycle d'Elric le Nécromancien. Après déjà quatre jeux exploitant le même univers (Stormbringer, Elric, Princes Dragons, Elric de Melniboné), le Département des Sombres Projets propose d'ajouter sa pierre à l'édifice roliste des Jeunes Royaumes. Pour nous parler de cette nouvelle adaptation, Jawad, l'éditeur du jeu, a accepté de répondre à quelques unes de nos questions.

 

SFU : Avant de commencer, peux-tu te présenter et nous présenter le Département des Sombres Projets ? 

Jawad : Je m’appelle Jawad, je suis éditeur et l’un des auteurs de Wasteland : les terres gâchées. En juin 2011, le Département des Sombres Projets a été créé dans le but avoué de conquérir le monde. On a donc commencé par des petites bases pour le moment : Wasteland et Mournblade. Et puis on va attraper de grosses licences comme Le Trône de Fer, Pathfinder, Star Wars ou L'appel de Cthulhu

 

SFU : Le département des Sombres Projets revient avec un nouveau jeu, Mournblade. Peux-tu nous parler du projet ?

Jawad : J’ai su que la licence française était libre il y a deux ans. Mongoose avait fait un travail très… inégal, alors que ce qui avait été fait en France, comme Elric et Stormbringer, était de très grande qualité. On a sauté dessus car ces jeux nous ont bercé pendant longtemps.

 

SFU : Qu’est ce que va apporter Mournblade par rapport à Stormbringer ou Elric ?

Jawad : C’est compliqué, parce qu’on va parler des mêmes choses, mais ce n’est pas une simple réédition, on apporte une nouvelle façon de jouer dans Les Jeunes Royaumes. On pense qu’il y a une chose qui a toujours été mal traitée, à la fois dans Stormbringer et dans Elric, c’est le conflit de la Loi et du Chaos, qui est l’arc narratif majeur de la saga littéraire. Dans Mournblade, les joueurs jouent des élus, des êtres choisis par les puissances de la Loi et du Chaos pour les servir. C’est une opportunité qu’on leur offre. Ils peuvent décider de ne pas la prendre, mais la gamme Mournblade va être axée là dessus. Dans Elric d’Oriflam, on pouvait jouer des personnages qui pouvaient complètement passer à côté de la Loi et du Chaos, s’en foutre complètement. On trouvait d’ailleurs que ça allait trop loin, il y a avait à peine une mention au Champion dans un demi-paragraphe. Dans Elric de Melniboné de Mongoose, ça devenait presque n’importe quoi, parce qu’on proposait de jouer des gardes du corps de marchands importants qui ne faisaient rien.

 

SFU : Quelles ont été les difficultés rencontrées pendant la conception du jeu ?

Jawad : C’est compliqué de donner du gameplay dans un univers basé sur un personnage, et où tout ce que l’on sait de l’univers passe par un intermédiaire. Par exemple ce que l’on connaît de Vilmir est en réalité ce que l’un des personnages en dit. Est-ce que c’est vrai ou est-ce qu’il est complètement fou ? Du coup, on s’est réapproprié tout ça pour retravailler l’univers. Et surtout faire en sorte que les joueurs puissent avoir un impact dans les Jeunes Royaumes. Les Jeunes Royaumes, c’est un monde exubérant, hyper haut en couleur, et c’est dommage d’avoir des PJ ternes.

 

SFU : Est-ce que le jeu ne risque pas d’être prisonnier de la trame des romans ?

Jawad : J’en ai parlé à Michael Moorcock quand je lui ai présenté le projet. Je lui ai dit qu’on voulait rester dans l’esprit de la saga, dans le respect de sa vision ultra-noire, parfois pulp, mais tout en écrivant une histoire originale parce que le but du jeu de rôle c’est que les joueurs et le meneur s’approprient l’univers et l’adaptent. Il y a un risque d’être prisonnier, mais on le dit dès le début : on va trahir l’œuvre, c’est sûr et certain. Toute adaptation est une trahison. En plus, on a utilisé une ruse classique dans le jeu de rôle : on joue pendant l’enfance d’Elric. Le meneur de jeu est donc libre de décider que ses PJ deviendront des incarnations du Champion Eternel et qu’Elric ne fera rien de particulier. Ou bien Elric fera tout ce que Moorcock a écrit et que les PJ joueront dans les interstices de la saga, ça dépend des groupes…

 

SFU : Est-ce qu’une gamme est prévue ?

Jawad : On va faire une gamme. Le livre de base suffit à jouer, on n’a pas gardé pour plus tard des secrets ou des informations capitales. L’écran va sortir très bientôt sous la forme d’une boîte (quasi-collector) contenant : la carte du monde en couleur, un paravent, et trois livrets : bestiaire et potions, un scénario, et un livret des Figures des Jeunes Royaumes ou nous présenterons une trentaine de PNJ. On travaille dors et déjà sur la suite : la Sorcellerie, une campagne, des modules sur différents royaumes. Nous aurons même quelques invités de marque qui prendront (ou reprendront) la plume dans cette nouvelle mouture des Jeunes Royaumes, mais ça je ne peux pas en dire en plus ou alors je serai éviscéré avec raffinement dans la Sombre Tour.

Michael Morcoock en compagnie d'une partie de l'équipe créatrice du jeu lors des Utopiales 2012

 

SFU : Parlons un peu de Wasteland : les terres gâchées. Peux-tu nous présenter ce jeu à ceux qui ne le connaîtraient pas encore ?

Jawad : On a été extrêmement originaux, on a fait un jeu post-apo ! Wasteland, c’est la société telle qu’on la connaît qui s’est écroulée. Une catastrophe a détruit le monde et l’a plongé dans un désastre absolu : les terres ont été bouffées par des déchets toxiques, des guerres nucléaires ont éclaté, des éléments géologiques ont été modifiés, des villes entières ont disparu. Certains endroits ont été préservés, dont l’endroit qui sert de cadre au jeu : la Bretagne étendue. Wasteland, ce sont les terres détruites, mais « wasteland » c’est aussi la terre du roi Arthur, c’est un mot qui revient souvent dans la littérature arthurienne. On a ancré le jeu en Bretagne et en Angleterre pour pouvoir croiser des endroits qui nous sont familiers, pour pouvoir les détruire aussi, car il y a vraiment un plaisir à raser une partie du Sussex, à noyer la Belgique, à faire des massacres. On était très content de pouvoir le faire depuis notre fauteuil… Après, on a rebâti sur ces ruines une société médiévale. C’est un grand classique. Hawkmoon le fait très bien d’ailleurs, très très bien. Nous, on n’a pas du tout voulu faire du Hawkmoon, même s’il y a une parenté forte parce qu’on parle Angleterre, on parle Bretagne. Mais à mon sens la comparaison s’arrête là. On s’est surtout inspiré d’une citation d’Einstein : « Je ne sais pas avec quelle arme se fera la troisième guerre mondiale, mais la quatrième se fera avec des bâtons et des pierres ». C’est ça la grande inspiration, Wasteland explique comment la civilisation est revenue à l’état médiéval. On y a également mis de la magie, qui fonctionne à deux niveaux : une magie liée à l’ignorance, la science du passé interprétée par les gens. C’est à dire quand la technologie confine à la magie comme Clarke le dit. Toute technologie de l’Hier qui n’est plus comprise devient de la magie. On a aussi intégré des pouvoirs psy, chez des êtres qui ont muté. Là c’est de la vraie magie, du paranormal qui a tout les attribut de la magie.

 

SFU : Y a t-il des suppléments qui sont parus ?

Jawad : Deux suppléments, un écran et un kit de démo sont sortis. Pour un vieux con de roliste comme moi, qui ne jure que par les jeux à gamme, c’est essentiel. On peut jouer à Wasteland avec le livre de base, les gens peuvent inventer leurs histoires avec les pierres qu’on a posées. Maintenant, les suppléments nous permettent d’aller dans le fond des choses : quand on parle par exemple de la politique dans le domaine d’Arthur, on va rentrer dans le vif du sujet, commencer à nouer des intrigues, reprendre à notre sauce le mythe d’Arthur, on va en dire un peu plus sur certains éléments (qui est Merlin ?)… On a l’idée d’un premier cycle qui comprendra quatre suppléments. On sait déjà ce qu’il y a dedans : le prochain parlera d’Ingland, celui d’après conclura et ouvrira sur le Vaste. Après, on fera peut-être des modules qui présenteront des villes en particulier, des peuples… J’étais assez fan d’Agone, et Agone avait sorti des codex. Je n’ai jamais pu mettre la main sur le coffret collector, donc comme je suis très frustré, je vais essayer de faire la même chose !

 

SFU : As-tu eu des retours de la communauté par rapport à Wasteland ?

Jawad : C’est assez bizarre parce qu’on n’a pas de visibilité sur internet. On a un petit site, on a un facebook sur lequel les gens réagissent et un forum sur le SDEN où les gens sont ultra-motivés. Mais la communauté, je n’arrive pas à savoir qui c’est aujourd’hui. J’ai l’impression qu’il y a deux communautés : ceux qui sont sur le forum, et ceux qui vont acheter en magasin. Les boutiques n’arrêtent pas de me dire « on veut du Wasteland », Wasteland se vend, Wasteland plaît et les boutiques le conseillent, mais à côté de ça la communauté n’en parle pas et certains organes de communication énormes ne parlent pas du tout de nous. Un site comme le Grog, quand on sort un supplément comme Les chants du labyrinthe, ils ne le mentionnent même pas. Du coup on fait un peu de pub dans Casus Belli, parce qu’on trouve ça sympa que Casus vive un peu…

 

SFU : Merci beaucoup !

 

 

Voulez-vous en savoir plus ?

Le site officiel du département des Sombres Projets

La page facebook de Wasteland

La page facebook de Mournblade

Le forum Wasteland sur le SDEN

La fiche SFU de Mournblade

La fiche SFU de Wasteland : les terres gâchées

Auteur : Vincent L.
Publié le mardi 5 février 2013 à 09h00

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