Critique Le trône de rubis #1 [2013]

Avis critique rédigé par Nicolas L. le samedi 1 juin 2013 à 12h21

Grandeur et décadence

Le cycle d’Elric est une l’une des plus célèbres séries de romans fantastiques, qui a marqué d’une pierre blanche l’histoire de l’heroic fantasy et carrément inventé, dans les années 60, le concept de la dark fantasy. Car Elric de Melniboné est tout sauf un héros traditionnel. Dans d’autres œuvres, il se serait vu attribué un rôle de méchant, malmené par un héros vertueux à la glorieuse destinée. C’est en faisant de ce "dégénéré" le personnage central de son oeuvre que le romancier Michael Moorcock, prenant a contre-pied les valeurs de ses contemporains, a construit sa gloire - même si, aujourd’hui, on prend conscience qu’il a écrit ensuite bien mieux. Elric de Melniboné est un être faible, un albinos qui ne tient sa puissance que de la magie de son épouse et, plus tard, des pouvoirs d’une épée démoniaque (la fameuse Stormbringer, non encore présente dans ce tome), et qui se voit infliger une cruelle destinée, celle de détruire un royaume et un peuple décadent.

Comme beaucoup d’amateurs de fantasy de leur génération,  les auteurs de cette bande dessinée ont grandi dans l’ombre d’Elric, un personnage qui a vu ses aventures portées sur d’autres supports comme le comic book et le jeu de rôle. Un jour, ils eurent l’idée de se lancer un sacré défi : construire une bande dessinée 100% française, donc libérée des contraintes éditoriales des comics, consacrée au cycle d’Elric. Une tache difficile, non seulement parce que matérialiser de manière efficace l’univers baroque, violent et torturé, des Jeunes Royaumes n’est pas chose aisée, mais aussi parce l’imaginaire des fans a déjà été marqué par de grands illustrateurs, comme Philippe Druillet ou Adrian Smith. Le trône de rubis, premier tome du premier cycle (Intitulé Melniboné), marque donc la première étape d'un long et périlleux, mais extrêmement excitant, processus créatif. 

Dés l’entame, l’on réalise que Julien Blondel, le scénariste, a effectué quelques modifications par rapport au texte original. Mais, que les fans se rassurent ! Non seulement, l’esprit de l’univers créé par Michael Moorcock est respecté mais, encore mieux, il apparait comme encore plus marqué. Ainsi, par exemple, le personnage de Cymoril s’éloigne un peu de l’archétype de la princesse traditionnelle pour épouser un profil plus conforme à sa race. Pour ce qui est du scénario, dans Le trône de rubis, Julien Blondel nous expose la rivalité qui anime Elric et son cousin Yrkoon, un homme avide de pouvoir. Cette dualité va générer une succession d’événements mettant en péril l’avenir d’un royaume certes vacillant mais qui prouve encore toute sa puissance dans une bataille maritime contre des barbares facilement remportée.

Visuellement, Le trône de rubis est une totale réussite. Le mixage des traits de Didier Poli, Robin Recht et Jean Bastide, trois artistes aux styles très différents, amène un résultat graphique à la fois complémentaire et chaotique, sombre, uchronique et baroque, qui colle parfaitement à l’idée que l’on pourrait se faire de Melniboné. La ville d’Imryr, capitale d’un empire plusieurs fois millénaire, apparait ici comme une gigantesque cathédrale minérale, aux angles complexes, et les Melnibonéens laissent apparaitre toute leur perversité et leur déshumanisation, avec des profils et des costumes évoquant à la fois les créatures cénobites de Clive Barker et les personnages de Warhammer 40K (mention spéciale à l’arachnéen docteur Jest). Les créateurs d’Elric ont aussi joué sur la démesure. Celle des décors (comme les vastes salles d’Imryr, les frégates melnibonéennes aux allures de porte-avion baroques ou le retour d’Elric à Melniboné, qui emprune à un fameux plans bibliques de Cecil B. DeMille), mais aussi  dans la violence graphique. Ce premier tome n’est que sacrifices humains, orgies sanglantes et combats aussi brefs que violent. Ils ont également réussit la représentation des démons (un Arioch au design d’antéchrist, un Aaven’kar et un Straasha lovecraftiens).

 

La conclusion de à propos de la Bande Dessinée : Le trône de rubis #1 [2013]

Auteur Nicolas L.
95

Dire que ce premier tome d’Elric était attendu par les fans tient de l’euphémisme. D’autant plus que Glénat, question pub, avait fait le travail. Les auteurs devaient probablement être dans leurs petits souliers en attendant les premiers retours. Qu’ils se rassurent ! Oui, car cet album tient toutes ses promesses et fait honneur à l’œuvre géniale de Michael Moorcok ! Dés l’entame de la lecture, on oublie tout comparatif et l’on se plonge littéralement dans le récit, avec la sensation de se retrouver en territoire connu et apprécié, mais aussi en découvrant une vision plus incisive, et plus efficace, que ce que l’on a pu nous offrir jusqu’alors. Vivement la suite !

On a aimé

  • Quelques petites modifications pertinentes
  • Un excellent travail gaphique
  • Un esprit totalement respecté
  • La meilleure adapatation à ce jour

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