Critique Inception [2010]

Avis critique rédigé par Nicolas W. le mercredi 21 juillet 2010 à 21h52

Quel est le parasite le plus tenace ?

Dom Cobb n'est pas un expert comme les autres. Ce voleur excelle dans un art très particulier, l'extraction. Il entre dans le subconscient de ses cibles pour dérober leurs secrets. Mais un jour, Saito, un puissant chef d'entreprise le convainc d'accomplir une mission bien plus périlleuse : l'inception. Porter une idée au plus profond d'une personne pour qu'il la fasse sienne. Cobb doit s'entourer d'une équipe formidable pour piéger Fischer, sa cible. Il devra tout tenter pour surpasser ses démons et mener à bien l'inception. Sa vie en dépend.

Christopher Nolan est le génie à qui l'on doit des films aussi tortueux qu'intelligents comme le brillantissime Memento, abîme mémoriel déconstruit emmené par Guy Pearce ou encore l'envoûtant Le Prestige, face à face magique entre Hugh Jackman et Christian Bale. On doit porter aussi à son crédit la véritable résurrection d'une franchise qu'on croyait définitivement ridiculisée avec son très bon Batman Begins et son inoubliable The Dark Knight porté par le formidable Heath Ledger. Quand Nolan parle de sa volonté de réaliser un film original mâtiné de science-fiction, le tout avec un casting démentiel, on s'attend à un chef d'œuvre. Avec raison.

Basé sur le concept de l'intrusion dans le rêve d'autrui, Inception s'inscrit directement dans la veine de grands films science-fictifs jouant avec la perception de la réalité tels que Matrix et surtout Total Recall. Nolan jette d'emblée le spectateur dans son univers et explique au fur et à mesure les règles de l'inception. Rentrer dans le métrage demande donc un certain effort, un peu à l'instar de Memento, mais le jeu en vaut la chandelle. Le réalisateur a décidé de nous faire naviguer dans un monde qu'il plie à des règles strictes, celui du rêve. L'idée démente de Nolan n'est pas tant de pouvoir implanter une idée chez une personne que la façon dont il le représente. Dans ce monde, ce nouveau système de "cambriolage mental" a entraîné des entraînements et des sécurités, il a aussi entraîné toutes sortes de rêves de contrebande où des gens sont "endormis" dans un rêve commun pour mieux se sentir éveillé. Car Christopher Nolan, en bon élève de Paul Verhoeven ou de Philip Dick, s'amuse comme un fou à brouiller les pistes et mélanger réel et rêve. Le rêve devient rapidement aussi tangible que la réalité, voir davantage pour les utilisateurs trop assidus. Chaque élément du subconscient, de la psyché de l'individu, ce qu'il cache, chaque recoin nébuleux trouve un écho dans les rêves explorés par Cobb. Les trouvailles s'enchaînent à un rythme effréné et réjouissant. Le plus discret mais aussi le plus réussi de ces éléments consiste dans le totem possédé par chacun pour prouver qu'il n'est pas dans un rêve. Une idée toute simple mais excellente néanmoins.

La dimension psychologique et l'acceptation font partie des thèmes récurrents des longs-métrages chez Nolan, celui de la culpabilité en tête (Batman semble en figurer le parangon). Inception ne fait pas exception à la règle par l'intermédiaire torturé du personnage principal - Dom Cobb - et ses rapports avec sa femme, Mall. Si l'on compare rapidement l'approche de Nolan à celle d'un Dick ou d'un autre film comme Matrix, ce n'est bien sûr pas innocent. Deux points centraux gravitent dans le film de l'américain, celui de la réalité et celui de l'idée. La première reste trouble et cela presque tout au long du film, Nolan enchaîne les niveaux de lecture et n'hésite pas à brouiller ses cartes pour donner le vertige aux spectateurs et jouer à un jeu de dominos géants. On pense notamment aux conséquences d'une chute dans un niveau du rêve qui engendre une apesanteur pour le second niveau, un effet visuellement impressionnant, très loin des éclats tape-à-l'œil  hollywoodiens et surtout extrêmement efficace. Confondant rêve et réalité, Inception joue sur notre propre perception et nous pousse à nous y confronter comme Leonardo DiCaprio se retrouve forcé de le faire. Mais ce n'est pas tout. Puisqu'on trouve aussi cette notion d'idée, en filigrane tout le long du film. Une simple idée peut tout bouleverser, peut renverser les perceptions d'un homme, de sa vie entière...Du monde. L'idée dans Inception s'affiche comme l'arme la plus puissante du monde, elle peut tout faire s'écrouler ou au contraire, bâtir des empires. Et Inception est un film d'idées, un film puissant. Très puissant.

On pourrait reprocher à Christopher Nolan de rester trop sage dans sa réalisation et son manque de lisibilité dans certaines scènes d'actions (on pense à la course poursuite un peu brouillonne),mais il est indéniable que le réalisateur sait manier une caméra, et de très belle façon. Contrairement au mouvement actuel, il ne cède pas aux sirènes de la surenchère technique et emploie le ralenti à bon escient sans en faire un simple effet de style. Les passages en apesanteur, les gunfights et tous ces autres petits moments d'éclats s'avèrent excellemment gérés et mis en valeur. Voir Joseph Gordon-Levitt se battre dans tous les plans de l'espace avec classe et raffinement n'en est que plus délectable. Le seul véritable reproche dans l'ambition de Nolan se situe au niveau des Limbes, étrangement sages et malheureusement sous-exploitées.

On sent aussi d'autres influences sur le long-métrage. Celle de James Bond assurément tant Dom Cobb ramène à l'espion anglais par sa classe et son efficacité. Mais également à Blade Runner pour l'esthétique urbaine que l'on retrouve tout du long. Il y a du Scott dans cet Inception, et l'on ne peut que s'en réjouir. Pourtant, un des principaux atouts du métrage se concentre dans son casting exceptionnel et sa galerie de personnages excellentissime. Leonardo DiCaprio enchante une nouvelle fois dans le rôle principal de Dom Cobb, un homme torturé et brisé mais néanmoins déterminé. Après sa prestation impeccable dans le dernier Scorsese, Shutter Island, DiCaprio se taille une filmographie extrêmement impressionnante. A ses côtés, Tom Hardy et Joseph Gordon-Levitt étonnent par la justesse de leur jeu, le premier incarnant le pince-sans-rire Eames et le second campant le classe et énigmatique Arthur. Quant à Ken Watanabe, il trouve ici un nouveau grand rôle en la personne de Saito pour déployer un talent qu'on avait déjà pu juger dans Lettres d'Iwo Jima. Les femmes du casting ne dérogent pas à la perfection d'ensemble, Marion Cotillard dans la peau de Mall et Ellen Page dans celle d'Ariane, les deux actrices s'avèrent parfaites. Enfin, on mentionnera le toujours impeccable Cillian Murphy dans le statut du pigeon de service, un rôle pas forcément évident mais si bien négocié par l'acteur. Autant d'arguments supplémentaires pour courir voir le film. Et s'il n'en fallait pas assez, Nolan nous offre une fin aussi simple que géniale, laissant libre cours à plusieurs interprétations que l'on devine déjà très discutées.

Remerciements à Amandine V. pour la relecture

La conclusion de à propos du Film : Inception [2010]

Auteur Nicolas W.
95

Inception a tout bon. Voilà un film intelligent et original dans une période de remakes et de métrages affligeants de médiocrité. En y ajoutant un casting aussi prestigieux qu'intouchable, DiCaprio et Gordon-Levitt en tête, Christopher Nolan démontre qu'on peut faire un long-métrage de qualité, bourré d'idées ingénieuses et sans avoir recours à une surenchère technique aussi prétentieuse qu'inutile. Mieux, il nous livre un de ses meilleurs films (le meilleur ?) et certainement le grand film de cette année. Inception rentre simplement dans la catégorie de ces classiques instantanés, quelque part entre Blade Runner et Total Recall.

On a aimé

  • Les acteurs
  • L'inception
  • Les niveaux de rêves
  • L'économie de moyens
  • L'originalité
  • La cohérence

On a moins bien aimé

  • Manque de lisibilité dans l'action
  • Des Limbes peu exploités
  • Réalisation trop sage

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