Critique Walter Kurtz était à pied [2020]

Avis critique rédigé par Nathalie Z. le jeudi 20 février 2020 à 09h00

Futur de bitume glaçant !

Les éditions Mu ont intégré le catalogue Mnémos récemment et Walter Kurtz allait à pied est le premier roman qui sortira en mars sous le label Mu. Avec une couverture graphique et une jolie édition, le roman pourrait passer pour de la littérature blanche. Emmanuel Brault n'est d’ailleurs pas un habitué du fantastique même si dans Les Peaux Rouges, il abordait le racisme dans une anticipation sombre. Il nous offre ici une dystopie dans laquelle la voiture est symbole de réussite absolue.

Le nouveau catalogue Mu (la critique du livre jaune déjà sur SFU ici)

Dany est une Roues, un citoyen qui vit dans sa voiture. Cela pourrait sembler négatif dans notre civilisation mais dans la sienne, la voiture symbolise la citoyenneté. Cela pourrait sembler ridicule et pourtant l'auteur rend cette vision du monde crédible et effrayante à la fois.

Dany est un adolescent et il se languit de conduire, d'arpenter les routes, de parcourir les kilomètres pour obtenir des points qui lui serviront de monnaie et à s'émanciper. Il rêve d'être le maître de l'asphalte au volant d'une belle américaine comme ces gens puissants qui le double parfois sur l'autoroute.

Pour l'instant, il roule avec son père et sa jeune sœur Sarah. Leur voiture ne ferait pas rêver les automobilistes actuels : une Peugeot 203. Pourtant dans cet univers fictif, cette voiture permet d'abattre les kilomètres et elle est la plus grande fierté du père de Dany.

Parfois, la famille fait une halte dans une station, et consomme. Ces stations sont d'immenses malls où le seul but est d'acheter, de ravitailler. Triste mais simplement une vision extrême de notre société de consommation, de notre monde de sédentarité.

Un jour, Dany rencontre Sam, un jeune de son âge qui a déjà sa voiture. Sam est cool mais a des idées bien arrêtés. Il raconte à Dany que les attaques des Pieds, des marginaux qui n'ont même pas de voiture, des sauvages qui mendient, se multiplient sur les routes. Il pense comme beaucoup d'autres qu'il faudrait les écraser à vue.

Dany partage son avis mais il ne se base que sur ce qu’il entend depuis son plus jeune âge : les légendes sont nombreuses et parfois folles, les Pieds mangeraient les autres gens. Les Pieds, chasseurs et cueilleurs, voient leur territoire quadrillé de  routes de plus en plus nombreuses et sont désormais obligés de traverser régulièrement alors que les Roues passent à toute vitesse. C’est très dangereux. Mais cela Dany ne le voit pas. Jusqu’au jour où un accident oblige le jeune homme et sa sœur à attendre les secours sur un bord de route. Il découvre alors une autre civilisation pour le meilleur et pour le pire.

Roman proche du post-apo, conte étrange et déroutant au début, l’histoire de Dany nous prend très vite aux tripes. Le personnage principal est un garçon comme les autres dans un monde différent du nôtre sans l’être, une version poussée à l’extrême de la société capitaliste de consommation : la sédentarité absolue tout en étant en perpétuel mouvement, le shopping comme seule activité, la solitude de l’habitacle comme vie sociale. Lors de la découverte du village des Pieds, le lecteur découvre une forme de civilisation différente d'un point de vue presque ethnologique et plus il pénètre dans ce nouveau mode de vie plus la société des Roues prend de l'épaisseur et un nouveau sens. Ces deux formes d'humanité si différentes ne peuvent que se confronter dans une réflexion qui renvoie à notre civilisation actuelle. Le propos est clair, intelligent, presque philosophique. Emmanuel Brault accélère ensuite le rythme pour un final dur et réaliste. Peu de personnages dans ce roman centré surtout sur Dany et sa sœur. La relation de la fratrie est d'ailleurs essentielle au propos : la place que chacun veut dans ce monde, leurs attentes différentes et la confrontation qui s'en suit. On peut noter d'autres personnages comme les frères marchands qui montrent une alternative pour lier deux sociétés que tout oppose. La dernière partie du roman est plus crue plus violente et à déconseiller aux jeunes lecteurs.

Walter Kurtz était à pied est un roman fantastique surprenant et accessible aux lecteurs qui ne lisent pas d'imaginaire d'habitude. 

La conclusion de à propos du Roman : Walter Kurtz était à pied [2020]

Auteur Nathalie Z.
87

Walter Kurtz était à pied est un roman du label Mu chez Mnémos. Emmanuel Brault y dépeint un monde futuriste où l’homme et la voiture ne font qu’un. Rouler est synonyme de richesse, réussite sociale et citoyenneté. Dans ce monde de bitume et de gaz d’échappement, Dany et sa sœur cherchent une place différente. Déroutant et original, ce roman fait réfléchir sur le monde actuel.

On a aimé

  • Original et glaçant
  • De l'imaginaire abordable pour les réfractaires au genre
  • Une vision d'un futur à réfléchir

On a moins bien aimé

  • Entrée dans le roman qui peut dérouter

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