Critique Super Mario Bros. le film [2023]

Critique de la version français en 2D.

Quand la force de frappe de l'animation en images de synthèse occidentale est combinée à celle des univers Nintendo, on s'attend forcément à du très grand spectacle familial. Et on est pas déçu.

L'histoire est connue, Super Mario Bros (1993) est considéré comme un nanar intersidéral et un des mètres étalon de l'impossibilité de créer de bons films adaptés de jeu vidéo. Tant et si bien que Nintendo (société japonaise créatrice de la licence Mario) refusa pendant très longtemps de vendre les droits d'adaptation de ses prestigieuses licences. Il faudra attendre que le créateur star de la firme, Shigeru Miyamoto (considéré comme le papa de Mario ou de Zelda, entre autres) se replonge dans ses anciens jeux pour y comprendre le potentiel cinématographique de ses univers. Ca et le fait que Nintendo travaille main dans la main avec Universal en ce sur des parcs d'attraction. C'est par ce biais que Miyamoto rencontra Chris Meledandri, créateur et président des studios d'animation Illumination (appartenant aussi à Universal et reponsable de la saga Moi, Moche et Méchant pour ne citer qu'un exemple). Un rapprochement qui permit le développement d'un film d'animation (alors quel a branche cinéma de Sony tenta en vain d'obtenir les droits d'adaptation de Mario au début des années 2000) où Miyamoto et Meledandri servirent de producteurs tandis que les équipes de Nintendo travaillèrent avec la branche parisienne d’Illumination pour un résultat aussi produit et distribué par Universal. Avec un scénario écrit par Matthew Vogel, le projet est confié aux réalisateurs américains Aaron Horvath et Michael Jelenic issus du monde des séries animées dont Teen Titans Go ! (2013) et ses films dérivés. C’est donc leur premier long-métrage au cinéma à la tête d'une production de 100 millions de dollars pour une sortie au printemps 2023 dans le monde.

Dans notre monde, Mario et Luigi sont deux frères New-Yorkais qui viennent de se lancer dans une carrière de plombiers en souhaitant vraiment réussir malgré le scepticisme qui les entoure. Après une intervention ratée, ils apprennent qu'une inondation massive a lieu à Brooklyn et Mario sait que la solution se trouve dans les égouts. Malheureusement, nos deux héros vont tomber malgré eux sur un tuyau les envoyant dans un autre monde après les avoir séparés. Dans cet univers parallèle au notre, le monde tremble puisque l'infâme Bowser vient de dérober une étoile magique au sein d'un royaume de glace et fait marche vers le Royaume Champignon gouverné par la Princesse Peach. Tandis que Luigi se trouve dans un lieu sinistre rempli de menaces, Mario est guidé par l'intrépide champignon Toad auprès de Peach. Cette dernière doit se préparer à l'attaque de Bowser et va faire de Mario son allié car c'est en la suivant qu'il pourra sauver son frère. Pour ce faire, ils vont devoir aller dans le royaume de la jungle afin de demander de l'aide à la puissante armée des Kong...

Assez paradoxalement, le scénario de Super Mario Bros. le film est autant une réussite qu'un de ses principaux défauts. Il est une réussite dans le sens où il adapte magnifiquement l'univers de Mario qui pourtant ne s'y prête pas aisément. Il est aussi bien rythmé avec des enjeux simples et un bon renouvellement des péripéties capable de contenter toute la famille. La structure du long-métrage est très classique, sans grosse prises de risque, et se déroule sans accroc car le divertissement est le principal objectif visé par le film. Il remplit ici son rôle rendant ses personnages attachants, réussissant son humour tout en ayant quelques scènes d'action bien satisfaisantes. Il faut néanmoins avouer que l'intrigue reste trop classique se concentrant principalement sur la thématique du dépassement de soi, le fait de ne jamais abandonner et de croire en ses chances. Une bonne idée quand on adapte un jeu vidéo mais qui tourne un peu en rond dans le film. Les personnages sont aussi malheureusement assez unidimensionnels n'évoluant que très peu tout au long du film. Mario est un bon gars qui ne renonce jamais, Luigi a du mal à croire en lui, Peach est un meneuse née tandis que Bowser est un méchant enamouré... Et rien ne va perturber leurs traits de caractère assez archétypaux. Ensuite, il ne faut pas non plus trop se poser de questions lors d'un film qui abuse un peu des facilités de scénario pour faire progresser son intrigue. Si on est content de retrouver cet univers adapaté au cinéma, il faut avouer qu'il peine à tenir debout si on se pose trop de questions.

Mais c'est parce que l'intérêt est ailleurs. Super Mario Bros. le film est avant-tout un divertissement qui veut offrir un spectacle autour de licences aussi célèbres que Mario et Donkey Kong avec le plaisir de retrouver les éléments cultes de ces séries. Que cela soit les personnages, les ennemis, les décors ou encore la multitude de références qui pullulent à l'écran, on est clairement dans une ambiance Nintendo très bien travaillée. Alors clairement, le film va grandement laisser de côte ceux qui ne sont pas familiers de ces univers. Mais pour les autres, quel régal par moments de partager près de 40 ans de pop culture avec un public de différentes générations. Le travail d'adaptation est donc fait très correctement et surtout très respectueusement en voulant toujours respecter le jeu vidéo en tant que média avec un film se mettant complètement à son service. Les clins d’œil sont fréquents et l'aspect jeu de plates-formes est bien présent. On retiendra aussi toute la séquence renvoyant à la série des Mario Kart qui est un des meilleurs moments du film. A ce niveau, Super Mario Bros. le film est une œuvre fan service ultime sans aucune distanciation si ce n'est faire passer un bon moment au spectateur. On peut évidemment grandement critiquer cette démarche mais force est de constater que cela fonctionne si on se prend au jeu. La seule véritable différence avec l'univers des jeux est l'inversion entre Peach et Luigi avec le second étant celui à délivrer tandis que la première devient la partenaire bien plus douée et expérimentée de Mario tout au long de l'aventure.

L'autre grande force du film est sa beauté visuelle. Encore une fois, l'ensemble se base grandement sur les directions artistiques de Nintendo qui sont reprises à la lettre mais avec une technique beaucoup plus poussée. L'impression de voir ces personnages cultes sortant de leurs cinématiques pour revêtir de bien plus belles images de synthèse. On retrouve ainsi les mondes colorés que l'on parcourt depuis plus de 40 ans avec quand même un aspect se rapprochant surtout des aventures de Mario des années 2010 avec cet univers très coloré et tout en rondeurs. Le fan service fonctionne encore une fois au maximum tant la fidélité aux œuvres originales est de rigueur et que les décors regorgent d'éléments issus des univers adaptés que cela soit les plus évidents comme les plus obscurs. Et cela fonctionne aussi car le film est techniquement très impressionnant. Illumination démontre sans aucun problème qu'il n'a pas à rougir face aux autres grands de l'animation en images de synthèse avec une incroyable fluidité et des textures dignes des ambitions affichées. Pour ce qui est des musiques, on a aussi le plaisir d'entendre les morceaux légendaires de Koji Kondo plutôt bien retravaillés par Brian Tyler. En revanche, l'utilisation de chansons connues datant des années 1980 à nos jours fera plus débat tant on obtient une sorte de pot pourri comme trop souvent dans les blockbusters actuels.

Comme il a été dit, Aaron Horvath et Michael Jelenic ne sont pas des réalisateurs expérimentés et cela se ressent autant que leur passif au sein des dessins animés pour un jeune public. On sent chez eux cette envie de nous faire vivre des aventures racontées de manière simple et très bien rythmée. Ils semblent avoir une tonne d'idées à proposer et beaucoup semblent s'être concrétisées. Cette volonté d'offrir un spectacle avant-tout divertissant paye car on est embarqué dans le film du début à la fin avec des scènes d'action agréables comme des moments comiques efficaces. Ils ont réussi à respecter un cahier des charges tout en réussissant à quelque peu tirer leur épingle du jeu. Un duo qu'on pourrait rapprocher de celui formé par Phil Lord et Chris Miller. On pourra néanmoins leur reprocher leur refus d'avoir des moments plus posés, plus contemplatifs qui sont toujours désamorcés par une blague ou un montage qui accélère. Alors que la version originale se reposait surtout sur des stars hollywoodiennes, la version française a décidé de faire confiance à des comédiens rompus dans l'exercice du doublage. Pierre Tessier est convaincant en Mario rendant son personnage très attachant tandis que Audrey Sourdive est parfaite dans le rôle de Peach. Le reste du casting est au diapason.

On vous le conseille si vous aimez Mario, Mario Kart, Donkey Kong...