Critique Nightfall [2011]

Avis critique rédigé par Amaury L. le vendredi 27 mai 2011 à 17h21

A la nuit tombée, les vampires se gorgent de sang…

Un couple de jeunes amoureux s’engage dans une ruelle assombrie par une lune au rayonnement faiblard. Un bruit de succion intriguant parvient aux oreilles inexpérimentées de nos oisillons nocturnes. La pénombre altère les formes et malgré une prescience naturelle d’un danger imminent, l’attaque d’un lycanthrope affamé terrasse en quelques instants nos tourtereaux imprudents. Quelques membres arrachés plus tard, l’homme, dans un effort utopique de sauver son existence, la luette étouffée par le sang, murmure un pitoyable « au secours » avant qu’une gueule dégoulinante de bave abrège ses souffrances et sa présence au sein des communs des mortels. La nuit tombée, tout homme sage sait que les forces ténébreuses s’affrontent dans une lutte sanguinolente et reste prudemment cloîtré chez lui…

La nuit, toutes les cartes sont grises…

Nightfall est constitué uniquement de cartes (environ 350). On découvre un graphisme soigné, chaque carte bénéficiant d’une illustration réussie, reprenant une cosmogonie appréciée, celle du Monde des ténèbres. L’univers de Nightfall est peuplé de vampires, lycanthropes, de chasseurs et évidemment de magie. On dénombre trente cartes différentes principalement des suceurs de sang. Des intercalaires et des cartes Blessure complètent ce crépuscule attirant. Pas de faute de goût apparente.

La nuit tombée, une seule règle, vaincre !

A la fin de la partie, le joueur ayant reçu le moins de blessures régnera sur ce monde nocturne.

Une partie de Nightfall commence par une phase de draft où les joueurs sélectionnent leurs archives personnelles (des cartes uniquement pour leur usage, pas à la disposition des autres). Le principe demeure simple, on choisit une première carte parmi quatre, ensuite celles restantes sont données à son voisin de gauche qui fait de même. L’avant dernière termine dans la réserve commune, la dernière finit dans la boîte (pas utilisée pour cette partie). On complète la réserve commune afin de proposer huit possibilités.

Anatomie d'une carte.

Le joueur actif entame sa phase de combat. Toutes ses créatures en jeu doivent se battre et il décide quel(s) adversaire(s) elles attaquent. La cible choisit ses créatures qui le défendent et il prend une blessure par dégât non encaissé par ses sbires. Quand les affrontements sont résolus, on déclenche éventuellement une phase « Chain ». Sur chaque carte, une lune principale accompagnée d’un ou deux satellites (de couleur similaire ou distincte de la lune principale) sert pour constituer une chaîne.

Exemple de chaîne possible et de Kicker.

Le joueur actif pose une première carte. Pour en jouer une seconde voire plus, il faut impérativement que cette dernière possède une lune principale de même couleur qu’un des deux satellites de la carte précédemment posée. Quand le joueur actif ne souhaite pas continuer sa « chaîne », les adversaires, dans le sens horaire, peuvent la poursuivre. La « chaîne » se termine quand chacun a eu sa chance de la continuer. La résolution commence par la dernière carte posée. On applique immédiatement son effet « Chain » et la carte est placée devant son propriétaire s’il s’agit d’une créature ou dans sa pile de défausse si c’est un sort. Il existe des effets bonus appelés « Kicker ». Pour les activer, le symbole lune de l’effet Kicker doit correspondre avec la lune principale de la carte précédente.

Le joueur actif poursuit son tour en « achetant » des nouvelles cartes en dépensant de l’influence. Chaque carte a un coût (entre 2 et 4). Pour chaque carte défaussée de sa main, on augmente d’un son capital de départ (deux influences minimum à chaque tour). Pour clôturer son tour, le joueur actif pioche autant de cartes que nécessaires pour reconstituer sa main à cinq cartes. A ce moment, il peut défausser les cartes Blessures reçues afin de piocher des cartes supplémentaires.

La partie s’arrête quand la pile des cartes Blessures est épuisée (nombre de joueurs multiplié par dix). On termine la phase en cours et on procède au décompte des blessures, le joueur en ayant le moins remporte ce duel de nyctalopes.

Les cartes Blessure.

La nuit, le sang devient noir...

Nightfall est un jeu qui s'inspire de la nouvelle vague surfant sur le principe de construction de deck, avec en tête d'affiche, l'inégalable Dominion (lire la critique). Cette déferlante incessante depuis l'avènement de Dominion, sacré jeu de l'année en Allemagne en 2009, interroge sur les craintes d'un épuisement accéléré de ce mécanisme incroyablement riche de « deck building ». Heureusement, Nightfall se préserve de cet écueil avec une conception ultra agressive de cet engrenage prisé. Si Heroes of graxia (lire la critique) et surtout Thunderstone (lire cette critique ou celle-ci) privilégient le combat au développement, Nightfall outrepasse allègrement l'agressivité de ces derniers et ne se concentre que sur un unique objectif, l'annihilation et la destruction directes de vos adversaires et de ses créatures noctambules.

Nightfall ne s'empêtre pas dans une copie conforme, améliorée ou non de Dominion, comme le fait l'excellent Tanto cuore (lire la critique du jeu de base ou de l'extension), il présente une thématique ténébreuse en corrélation avec ses principaux rouages, infliger un maximum de dommages à ses adversaires. Toutes les cartes, créatures et sorts, sont tournées vers cette finalité belliqueuse. Ce jeu de base, des extensions sont en cours de développement, ne s'embarrasse pas d'effets subtils et délicats. On ne pratique pas Nightfall pour trouver des interactions entre les cartes renforçant la compétitivité en gain de points de victoire. Toute programmation semble vaine et vouée à l'échec car ce monde des ténèbres ne laisse pas le temps d'accroître indéfiniment ses forces armées. Dès l'entame de la partie, les hostilités débutent car les règles imposent d'engager systématiquement toutes ses troupes disponibles dans le combat. Évidemment, pour les potentielles victimes, l'art oratoire afin de dissuader un agresseur de molester vos sbires occasionnent des échanges verbaux enflammés. Les entourloupes et les violations de pacte de non agression pullulent dans cet environnement ludique violent et sans concession.

Dans Nightfall, parvenir à réunir une vingtaine de cartes dans son deck reste un challenge considérable. On jongle avec en général une quinzaine de cartes avec lesquelles on s'emploie à optimiser les possibilités de chaîne, le vrai moteur menant vers la défaite de ses concurrents. Investir dans des cartes arborant des symboles Lune complémentaires assure une efficacité redoutable, surtout si on active les puissants effets Kicker, un bonus qui s'ajoute au pouvoir initial de la carte. Cette phase questionne systématiquement le joueur actif qui envisage les avantages ou les risques encourus en démarrant une chaîne. En sachant que ses propres effets agiront en dernier, il faut être sûr d'encaisser les dommages ou les crasses provenant de vos adversaires. Toutefois, il n'existe aucune autre solution pour engager de nouvelles créatures prêtes à en découdre et / ou protéger leur maître (vous en l’occurrence). Nightfall fustige les timorés et les attentistes. Les mécanismes proposés par l'auteur, David Gregg, martyrisent ces comportements indignes d'un seigneur des ténèbres, ne pas combattre s’apparente au suicide, avec la honte et l’opprobre comme récompenses.

Nightfall se différencie énormément de Dominion car il ne reprend pas les bases de celui-ci, construire un deck compétitif rémunérateur en points de victoire. Il s'aventure de préférence sur l'efficacité, avec des parties exclusivement orientées vers l'affrontement. On ne bâtit pas sa victoire en augmentant ses capacités d'achat, cela demeure insuffisant. Prendre de vitesse ses adversaire, mener des assauts dévastateurs et impitoyables, anticiper les effets des chaînes et maîtriser cette phase éminemment tactique instaurent les fondements ludiques de Nightfall.

De plus, Nightfall ne se traîne pas en longueur et les participants sont surpris par cette fin de partie inattendue. Pourtant, une soixantaine de minutes s'est écoulée, preuve d'une fluidité et d'un dynamisme conservés. Nightfall, une morsure fatale !

La conclusion de à propos du Jeu de cartes : Nightfall [2011]

Auteur Amaury L.
80

Nightfall se classe parmi les jeux utilisant un système très en vogue, le deck building. Toutefois, il se distingue aisément de la production actuelle par la mise en avant de mécanismes extrêmement agressifs. On ne cherche pas à marquer des points de victoire en développant tranquillement son deck. La finalité est de maltraiter, brutaliser, blesser gravement vos adversaires en envoyant un maximum de dégâts grâce à vos créatures vampiriques ou lycanthropiques. De plus, il se démarque par sa phase Chaîne, une trouvaille redoutablement tactique et originale qui donne encore plus d’interactions à l'ensemble. Un jeu qui devrait faire de nombreux mordus !

On a aimé

  • Un deck building hyper aggressif.
  • Fluide et direct.
  • Bientôt en français.
  • Anglais simple.
  • Parties dynamiques.
  • Bien dans la thématique.

On a moins bien aimé

  • Développement de decks léger.
  • Une carte trop puissante (Furious melee)?

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