Critique Demi-monde, Hiver #1 [2013]

Avis critique rédigé par Manu B. le dimanche 30 décembre 2012 à 20h46

Enfer virtuel

"Norma retroussa son jupon et prit ses jambes à son cou. Courut comme elle n'avait jamais couru de sa vie. Courut comme si elle avait toutes les hordes de l'enfer à ses trousses.
Oh merde, mais c'est ça... J'ai les hordes de l'enfer à mes trousses !
La jeune femme cavalait dans la nuit quand elle entendit des coups de feu éclater derrière elle, des tirs qui ricochèrent dans les rues silencieuses de Londres. Elle comprit aussitôt que Mata-Hari et ses souffrigettes avaient tenu parole. Elles allaient tout faire pour retenir le plus longtemps possible ces enfoirés de SS. Elles étaient du genre coriace, ces souffrigettes..."


Norma court à s'en faire éclater les poumons. Elle ne doit absolument pas tomber entre les griffes des SS et certainement pas entre celles de Clement, le chien de garde de l'infâme Heydrich, ce cinglé de première. Mais pourquoi courir après tout, puisque le Demi-Monde dans lequel elle s'essouffle petit à petit n'est qu'une simulation numérique, extrêmement réaliste certes, mais cela n'en constitue pas moins une chimère digitale. Et après tout, elle est la fille du président des Etats-Unis et il suffirait certainement que son père soit au courant pour que tout ce cauchemar s'arrête.
Sauf qu'elle n'est pas tout à fait sûre que cela suffirait. Peut-être que lorsqu'on pénètre dans cette simulation, on n'en ressort pas en appuyant simplement sur un bouton. Il va falloir qu'on l'aide, que quelqu'un de l'extérieur vienne pour la sortir saine et sauve...

On en sait assez peu sur l'auteur Rod Rees. En quatrième de couverture, on apprend cependant qu'il parcouru le monde en exerçant diverses activités et qu'il est revenu en Angleterre où il est écrivain à temps plein. Demi-monde, Hiver est son premier texte, publié aux éd. J’ai Lu coll. Nouveaux Millénaires et premier d'une tétralogie où l'on comptera logiquement les quatre saisons. Ce roman évoque en dépit du titre un monde numérique et complet, saisissant de réalisme.

En accord avec le titre, l'action se déroule par un froid hiver où la neige empêche les acteurs d'y voir à plusieurs dizaines de mètres. Conformément à son titre, l'aventure qu'est sur le point de vivre Ella n'en est qu'à sa genèse. Rapport au titre, l'atmosphère qui règne dans le demi-monde est froid et angoissant.
Mais les liens qui lient les habitants ce monde sont chauds, très chauds.
Expliquons un peu le contexte (possible spoiler inside mais rien de plus que le quatrième de couv').
L'armée, pour pouvoir entraîner ses soldats à la guérilla urbaine, se dote d'un logiciel de simulation qui doit être la plus réaliste possible. Pour ce faire, il ont besoin d'un lieu où les personnages non joueurs doivent être naturellement tendus et à tout instant au bord de la guerre. Pour ce faire, réduisons l'espace vital. Mettons 30 millions de personnes dans un espace trop petit. Créons ensuite des quartiers adjacents où les habitants ont des convictions dogmatiques et sociales inverses. Mettons des puritains à côté de libertaires, de misogines, de féministes et de racistes. Recréons ensuite des avatars particulièrement agressifs, des leaders, des individus de type alpha qui vont se faire un plaisir de soumettre les autres à leurs idées. Dans le genre, mettons un Robespierre, un Beria, un Heydrich, un Chaka Zoulou, une impératrice Wu Zetian, un Tudor et un Ivan le Terrible. Le tout est géré par le plus puissant ordinateur, capable d'auto-apprentissage.
Voilà un cocktail explosif, idéal pour entraîner les soldats d'élite. Mais tout a commencé à aller de travers lorsque le système a pris trop de libertés, ce qui n'aurait pas posé de problèmes (en le rebootant) s'il n'y avaient pas ces gens - des vrais - piégés dans ce monde. Et devinez la dernière ? Norma, la fille du président des US en fait partie.
C'est donc à ce moment qu'on propose à Ella d'accepter une mission de sauvetage d'un genre particulier...

L'idée n'est pas nouvelle depuis l'avènement du cyberpunk des années 80 (William Gibson, Bruce Sterling ou Walter Jon Williams), en passant par les mangas cultes (Ghost in the Shell) et les films plus récents (TRON ou Matrix, par exemple). Christophe Lambert a même écrit un roman sur les mêmes fondements (La brèche).
Ceci étant dit, créer un univers numérique en guerre est original, pour peu qu'on occulte les nombreux jeux vidéo en ligne où le but est de trouer le plus de crânes possible.
Alors quoi ?
Alors le deuxième degré.
Réunir autant de clichés dans un roman ne peut être le résultat que d'un texte écrit au deuxième degré. Imaginez que l'héroïne - une afro américaine - est envoyée au milieu d'un quartier tenu par des SS, qu'elle est là pour retrouver la fille du président.  Ça ne vous rappelle rien ? Snake Plissken ?
Du coup, l'ensemble semble plus léger et digeste. On est plus facilement pris au jeu du rebondissement à outrance, du retournement de situation improbable, de la coïncidence malencontreuse et des procédés parfois maladroits.
Par exemple, on pardonne alors beaucoup à certains personnages de passer du statut de jeune fille insipide à chef de guerre cruel et implacable.

Pour résumer, Demi-monde, Hiver c'est un mélange improbable, de l'aventure et de l'action. Et on s'amuse aussi beaucoup.

La conclusion de à propos du Roman : Demi-monde, Hiver #1 [2013]

Auteur Manu B.
75

A la croisée des chemins de La brèche, Matrix et de New York 1997 - et de multiples autres références d'incarnations numériques -, Demi-monde, Hiver séduit par ses aventures débridées et sa marmite d'idées piochées à droite et à gauche. L'originalité provient de l'association des idées plutôt que par les idées elles-mêmes. Le roman n'en constitue pas moins un grand divertissement.
Son énorme cliffhanger en fin de roman n’est pas suffisant pour nous faire renoncer à la suite.

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