Critique Kane: la croisade des ténèbres #1 [2007]

Avis critique rédigé par Nicolas L. le vendredi 19 février 2010 à 13h14

Le prophète dément et le chien de guerre

La poussière masquait les détails de la bataille, mais Kane pouvait voir que les cornes de son croissant, renforcées par les premières lignes de cavalerie légère qui se portaient vers les flancs, avaient englouti toute la charge de Santdotnéri. Les forces de Jarvo étaient cernées. La bataille était à présent une immense mêlée, et Kane avait l’avantage du nombre. Le seul espoir pour Jarvo d’échapper à l’annihilation était de s’arracher au piège satakiste, de reformer ses hommes en une retraite agressive…

Dans La Croisade des Ténèbres, Kane, après été chassé par des intrigues de palais de la cité de Santdonéri, part proposer ses services à Ortède, un prophète illuminé qui, par ses propos enflammés, a levé une armée de va-nu-pieds et de mécréants pour mener une horrible croisade faite de massacres et de démonstration de magie noire. Kane, aveuglé par son désir de vengeance et sa soif de pouvoir, en épousant la cause des Sakatistes, oublie seulement une chose : qu’il est parfois dangereux de s’allier avec les démons ! 

Dans ce court roman de 280 pages, l’auteur nous présente à nouveau un héros au profil psychologique complexe et versatile. Un homme tour à tour réfléchi et impulsif, manipulateur et naïf, guerrier et sorcier. Néanmoins, au-delà de l’aspect insaisissable de ses traits de caractère et du manque de connaissance sur son passé, on prend conscience que Kane, ce colosse roux aussi doué sur les champs de bataille que dans les alcôves des harems et sous les tentes de négociations, poursuit ici, encore, le même but, cherche à assouvir sa même obsession : sa mégalomanie. Un personnage riche donc, aux objectifs bien définis, et disposant de nombreuses voies possibles pour parvenir à ses fins. Mais, attention, car Kane n’est pas le seul personnage important de La croisade des ténèbres.

En effet, encore une fois, le récit vaut également pour la profondeur de ses personnages secondaires et la place importante qui leurs est accordée. Jarvo, l’ennemi juré de Kane, occupe ainsi un rôle aussi important que le mercenaire érudit, et il apparaît même, dans la deuxième partie du roman, comme le véritable héros du texte. Une histoire ne vaut rien sans un beau méchant, a-t-on coutume de dire. Dans les romans de Karl Edward Wagner, cependant, au-delà des habituelles notions manichéennes de Bien et de Mal, les protagonistes sont amenés à endosser des tenues différentes au gré du récit, pour entrainer au final la conception d’un univers de dark fantasy à dimension humaine. Enfin, sachez également que, sword & sorcery moderne oblige, les personnages féminins ne sont pas en reste, avec  Esketra et Erill. La première épouse le profil – assez classique - de la courtisane de palais arriviste, la deuxième est une femme forte, foraine de son métier, qui joue dans le récit le rôle de noyau autour duquel gravitent les électrons Jarvo et Kane.

A coté de cela, La Croisade des Ténèbres est un roman épique très violent. Karl Edward Wagnery démontre sa méfiance envers le dogmatisme et le principe de foi en général, la nature nihiliste de l’Homme, le tout à travers une plume sans fioriture mais dénuée de toute rusticité. On se rend ainsi compte, si ce n’était déjà fait, que, malgré les apparences (Karl Edward Wagner apparaît pour beaucoup comme un rocker graisseux perché sur sa Harley, une blonde à forte poitrine sur l’arrière de la selle), le romancier était un excellent écrivain qui privilégiait l’efficacité sans oublier le style. On peut ainsi le comparer à Michael Moorcock et je me demande si le final,  reposant sur un principe de dimensions peuplées de démons (Arioch n’est pas bien loin), n’est pas un hommage de Wagner au créateur du  Multivers. Cela serait vraiment bienvenu tant le créateur de Kane semble lui devoir.

La conclusion de à propos du Roman : Kane: la croisade des ténèbres #1 [2007]

Auteur Nicolas L.
80

Deuxième roman figurant dans le premier tome de l’intégrale Kane, publiée cher Dénoël, La croisade des Ténèbres est un excellent roman de sword & sorcery. Fort de nombreux personnages bien construits et d’une intrigue dénuée de tout manichéisme puéril, le texte – court, un peu moins de 300 pages – évoque un peu Moorcock et Howard tout en possédant sa propre imagerie et atmosphère. De la très, très bonne littérature fantasy.

On a aimé

  • Un récit captivant
  • Kane, un personnage complexe
  • Des personnages secondaires bien construits
  • Une aventure épique et sanglante

On a moins bien aimé

  • Un peu court
  • On en sait toujours aussi peu sur Kane

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