Monsters ► Anecdotes du film

Cette section rassemble les anecdotes du film Monsters, regroupées en différentes catégories.

Interview de Gareth Edwards, réalisateur de Monsters (Anecdote)

Depuis que "Monsters" fut dévoilé dans le cadre de l'étrange festival de Paris, le film fut souvent sujet à forte polémique. Véritable coup de coeur de l'année 2010 pour ce qui me concerne, nous avons eu la chance de rencontrer le réalisateur Gareth Edwards, afin de lui poser - durant une quinzaine de minutes - nos quelques questions autour de son film.

Le projet "Monsters" a-t-il demandé beaucoup de temps de réflexion et d'écriture ?

Pour être honnête avec vous, j’ai fait pour mon film de fin d'études, à 21 ans, un film de monstre, enfin du genre « film de monstre », non, c’était un film de monstre. Alors, j’imagine que je voulais en faire un depuis cette époque. Et ça m’a pris quatorze ans pour faire ce film, donc ça n'a rien à voir avec mon film de fin d'études, non pas que je ne sois pas fier de mon film, je suis très content de ce film de fin d'études. J'ai toujours aimé la science-fiction, j’adore Ray Harryhausen, les films de série B des années 50 et 60, ou les films de science-fiction. Donc, ce qui s'est passé c'est, lorsqu'il se présente un premier film pour un réalisateur, tu es forcément attiré par le film de genre, comme le film de zombies, les films d'horreur. Parce qu'il y a les nouvelles technologies digitales et mon expérience acquise dans les effets visuels, je me suis dit que je pouvais aller un peu plus loin que faire du zombie ou ce type de films, comme faire un film de monstre. Avec le digital, les ordinateurs, je pouvais mettre la créature derrière de vrais trucs pour que ça fasse de vraies choses sur le premier plan.

Donc, j'étais juste en train de chercher pour un début d'idée en quelque sorte, quelque chose que je pouvais faire avec peu d'argent en vidéo, du genre « Blair Witch » avec un monstre. J'avais même commencé à écrire quelque chose du style « Blair Witch » rencontre « la guerre des mondes ». Là j'étais parti pour le faire, et c'est le moment ou « Cloverfield » est arrivé, je me suis dit, bon ça, c'est fait, je ne peux pas le faire, quelle est l'étape suivante ? Je me suis dit que « Cloverfield » c'était un peu comme le 11 septembre, donc l'étape suivante serait la guerre en Afghanistan. C'est-à-dire que là, il y a une guerre contre la créature, les gens n'y font plus attention, c'est un peu naturel pour eux, ils voient ça à la télé, mais ils ne réagissent pas vraiment, c'est un peu de cette façon que ça a commencé.

Je ne comprends pas la promotion, pourquoi comparer « District 9 » à « Monsters » alors qu'ils sont complètement différents ?

Je peux comprendre pourquoi les gens comparent ces films avant d'avoir vu Monsters, mais ces 2 films sont totalement différents. Si vous aimez « District 9 » cela ne veut pas dire que vous aimez « Monsters », c'est vraiment 2 expériences cinématographiques différentes, je trouve même ça inquiétant, que les gens aillent en salle en pensant voir un « District 10 » alors qu'ils vont voir quelque chose de complètement différent. Il s'agit d'un film sur une relation, entre un « road movie » et une « histoire d'amour ».

J'ai le sentiment que comme Neill Blomkamp est venu des effets visuels pour devenir réalisateur, et que c'était aussi ma voix pour arriver à la réalisation... enfin c'est ce que je pense, car je ne peux pas parler pour lui. Pour moi, lorsque tu fais des effets visuels, ce que tu fais, c'est coller des choses un peu bizarres de « Science fiction » et de « Fantasy » dans des images réelles. Tu fais des tests sur ton ordinateur, tu utilises ce que tu as filmé toi-même. Cela veut dire que tu vas prendre ta caméra, tu vas aller dehors, tu vas filmer la rue et après, tu ajoutera le monstre sur ton ordinateur, ou même un robot ou un vaisseau spatial.

Quand tu fais tes effets visuels, c'est ce que tu as sur ton ordinateur, c'est à dire beaucoup de plans tournés, de choses très réalistes, qui font très caméra à l'épaule, totalement en image réelle, mais avec une chose étrange que tu as ajoutée dedans. Cela crée un effet, quand tu le regardes, tu te dis que c'est intéressant, « Pourquoi ne ferait-on pas justement un film comme ça ? Tu peux faire un film dans cet esprit-là,  Blair Witch avait été fait dans cet esprit là! ». Bref, je pense que l'idée d'avoir une image très réaliste, très document réalité et d'y rajouter des éléments fantastiques, c'est quelque chose qui n'est pas une nouvelle idée pour les personnes qui font des effets visuels pour vivre. Donc que je pense que c'est de là que sont nées les similarités.

Mon seul souci avec « Cloverfield » c'est vraiment que ... J’aurais souhaité que ce soit un gars dans son garage ou un gosse dans sa chambre qui fasse le film. Parce qu’on a tout le temps l’impression que c’est une fabrication maison, alors que c’est fait par un studio.

Il y a dans « Monsters » comme un croisement entre Terrence Mallick et Steven Spielberg. Cela était-il dans cet état d’esprit que vous avez abordé le film ?

C’est la meilleure louange que vous auriez pu me faire. Je n’oserais jamais me comparer à eux. C’est évident que Spielberg était une grande influence pour moi, comme beaucoup de gens de mon âge qui ont grandi avec « Rencontre du 3éme type », « E.T », « les dents de la mer », et je pense inévitablement que tout ceci est ressorti et se ressent sur le film, donc oui, il a été une très très grosse influence, sinon là plus grande pendant ma croissance.

Terrence Mallick, même s'il n'a pas fait tant de films que ça, j'adore ses films. Je pense que c'est vraiment un honneur, ses films sont vraiment poétiques, je pense qu'il est incroyable, il élève ses films au-delà de leur simple thématique, grâce à la texture de ses plans et sa façon de filmer, sa musique, l'atmosphère générale, il y a toute une fournée d'idées qui sont développées derrière l'idée principale, il te montre de l'herbe et cela te fait penser à quelque chose par exemple, et je pense que c'est ce que devrait être le vrai cinéma, oui l'idée c'est que clairement j'oserais jamais me comparer à ça, mais ce sont de très grands réalisateurs... je sais pas trop quoi dire à ça, c'est difficile... quand les gens sont trop positifs sur mon film ça me ferme un peu.

Que pouvez-vous nous dire au sujet de cette superbe séquence se déroulant sur le fleuve ? N'est-elle pas très poétique ?

Oui, nous avons été très chanceux ce jour-là, c'était très joli. En fait, c'était un coucher de soleil et dans le film on l'a utilisé comme un lever de soleil. Le soleil était en train de descendre, et c'était tellement beau, qu'on s'est dit qu'il fallait vraiment filmer ça, donc on a demandé aux acteurs de venir, nous avons vraiment été très chanceux avec la lumière ce jour-là.

Je ne filme jamais en me disant « ça doit être comme tel film, puis là, cela doit être comme tel film! », mais par contre quand tu es devant la table de montage tu peux te dire «  oh mon dieu, je suis en train de copier tels films », mais de manière inconsciente. Le truc qui m'a toujours le plus embarrassé, c'est avec « rencontre du 3éme type », c'est l'un des meilleurs films jamais faits selon moi, le problème est que, sur le film, je n’avais vraiment aucune envie de copier « rencontre du 3éme type », je pensais même aller dans une direction opposée, et soudain lorsque j'ai regardé mon film, je me suis dit, « il y a un type, il a plus ou moins quitté sa famille pour poursuivre son obsession pour les extraterrestres, il y a une femme blonde qui a aussi laissé sa famille pour vivre ce voyage avec lui, ils portent des masques à gaz, ils terminent dans un endroit où ils doivent se faire évacuer, c'est un « road trip », et à la fin, ce qui est effrayant, les extraterrestres, ça devient beau, presque hypnotique ». C'était vraiment au moment du montage, je me suis dit « oh mon dieu! », c'est plutôt embarrassant, mais c'est totalement subconscient.

C'est comme, il y a une scène dans le film, c'est un peu comme « Jurassic Park », dans une version très inférieure, et c'est étrange, car tout le monde me dit, « est-ce que vous avez copié Jurassic Park  ? », et moi je réponds que non, que quelque chose m’est arrivé quand j'étais en Bolivie, qui était comme « Jurassic Park », donc voilà on était là-bas, je devais faire pas mal de visuels pour la BBC, je travaillais pour un documentaire à propos d'une ancienne civilisation au milieu de la forêt amazonienne, et donc on est allé en Bolivie pour filmer cette scène-là, avec des hommes armés de machettes, et donc ça nous a pris 2 jours pour aller là-bas, et au retour, on ne voyait rien, c'était le noir total, le camion qui roulait dans la jungle devant nous s'est arrêté soudainement, les hommes du camion ont éclairé avec leur torche autour d'eux les arbres, et là, on se demandait ce qu'ils étaient en train de faire ? Qu'est ce qu'ils pouvaient regarder ? Pourquoi ils regardaient les arbres ? Qui avait-il d'intéressant dedans ? Moi j'étais super excité, j'aimais beaucoup le fantastique, j'avais vraiment envie qu'un truc étrange sorte des arbres, donc je me demandais ce qu'il se passait, nous étions tous un peu inquiets, mais je voulais vraiment que quelque chose sorte, je trouvais ça vraiment cool, nous plaisantions en disant « on se croirait dans Jurassic Park! » voilà, quand j'ai fait cette scène dans le film, je me suis dit que c'était l'occasion de raconter mon expérience en Bolivie, mais cette fois-ci quelque chose sortira des arbres, et c'est donc à ça que je faisais référence dans mon esprit, mais ça un peu échoué, puisqu'il s’avère que ça rappelle Jurassic Park et que les gens n'y voient pas mon expérience Bolivienne.

C'est la même chose avec la scène de l'aileron qui sort de l'eau, et avec le bateau. Cette scène avec l'aileron est basée sur quelque chose qui met arrivé en Australie, alors que nous faisions de la randonné à sac à dos avec des amis, nous cherchions des crocodiles en étant en bateau, nous prenions des photos, et d'un coup quelque chose est sorti de l'eau et on l'a regardé, nous nous sommes dit : « Ah voilà un crocodile et il se rapproche », quand il s'est rapproché, on s'est rendu compte que ce n'était pas un crocodile, mais un cochon retourné, il avait l'aspect d'un truc mort, il avait les jambes raides, le cochon était vraiment retourné, et on prenait des photos sans trop savoir de quoi il s'agissait et après c'est reparti sous l'eau et il est réapparu, on s'est rendu compte à ce moment qu'un crocodile avait le cochon dans la gueule, donc quand j'en suis venu à faire cette séquence dans le film, je me suis rappelé la scène du crocodile et du cochon, je me suis dit qu'on pouvait remplacer le cochon par un de ces véhicules militaires et puis je me suis dit que non, il y a les avions, ils ont des ailes, et donc je pourrais faire des ailerons, un truc comme « les dents de la mer ».

Tout ceci est agrandi de beaucoup de choses qui m’arrivent dans la vraie vie, mais le problème, c'est que j'aille n'importe où, dès que je vois des choses, je le réfère à des films, c'est pour ça que l'on croit qu'il y a tant de référence dans mon film, parce que je pense sans arrêt à des films, même lorsque ce sont des choses réelles qui arrivent.

Pouvez-vous nous dire quel est le budget réel de « Monsters » ? Et, comment avez-vous réparti ce budget ?

Je ne me suis pas occupé du budget, car c'est le travail des producteurs. C'est la seule chose où je n’avais aucun contrôle. J'aime que ça soit fait de cette façon, et honnêtement je ne sais pas quel est le budget, je sais simplement que Vertigo, les producteurs qui ont fait le film, m'avaient donné un chiffre, mais la question est : « où est-ce que tu mets la limite pour définir le budget d'un film? », il y a beaucoup d’exemple de films qui ont été fait justement pour « 15 000 dollars », mais cela veut dire qu'ils n’ont pas payé des gens, car même les films qui sont faits pour très très peu comme « Paranormal Activity », il y a toujours à un moment donné une grosse somme, par exemple le mix Dolby surround 5.1 coûte des milliers de dollars.

Donc, ça tu ne peux pas le faire pour une petite somme d’argent, c'est la question, « où tu mets la limite ? Est-ce que tu veux dire pour combien d'argent tu l'as tourné ? Ou, est-ce que tu comptes juste l'équipement utilisé ? » Il y a toute sorte de paramètres, et la meilleure réponse que je peux vous donner, c'est que l'équipement qu'on avait, il y en avait pour 15 000 dollars et c'est de là que la rumeur des 15 000 est venue, parce que quelqu'un a parlé de cette somme et ça vient de là.

La réalité c'est que moi j'ai eu un salaire, le monteur, les acteurs, je ne sais pas combien ils ont été payés, ce n'est pas mon problème et cela ne me regarde pas, mon idée la plus précise c'est que c'est en dessous du million. En terme de filmage, cela a vraiment coûté moins de 500.000, mais aussi bien plus que 15 000 dollars. Voilà, le chiffre se trouve quelque part entre ça, je ne sais pas exactement, je pourrais avoir une idée plus claire, plus précise là-dessus, mais je veux pas le savoir, parce que je ne veux pas que les gens le sachent exactement, je pense qu'après les gens il rate le truc, lorsqu'ils deviennent obsédés par le budget d'un film, parce que la raison pour laquelle ils veulent savoir c’est « est-ce que moi, je peux me permettre de le faire ? », voilà ils veulent savoir s'ils ont assez d'argent pour faire un film comme ça.

La réponse est que si tu as déjà l'équipement, si tu as déjà 10 000 livres à dépenser dans l'équipement, alors tu as l'équipement nécessaire pour le faire! Combien de temps ça va me prendre et de combien ai-je besoin pour survivre ? Si je prends une année, ou deux années de libres pour le faire ? Tu vas aller à l'étranger, tu vas rester dans des hôtels, ou rester chez des amis, tout ce genre de chose, tout dépend du projet et des gens impliqués, nous on a fait vraiment ça en mode guérilla, on monté ça sur un PC en utilisant Adobe première, donc tout ce qui est vraiment économique, mais je ne sais pas exactement le chiffre précis.

Quels sont vos projets ?

J'ai un « deal » de développement avec Timur Bekmambetov qui fait actuellement « Abraham Lincoln: Vampire Hunter » avec Tim Burton. C'est une histoire de science-fiction dont je lui ai parlé il y a quelques mois, il me finance pour que je le développe et l'écrive, et donc j'espère que ça va se faire en dehors du système du studio pour que je puisse avoir le contrôle créatif dessus. Puis, quand c'est arrivé à un certain point tu le montres aux gens pour les impliquer sur le projet, ça, c'est la chose que j'ai apprise, tu peux faire un film gratuitement, mais si tu chopes pas un studio, si tu as pas un studio impliqué ou un distributeur... quelle que soit la raison pour laquelle tu fais le film, à un moment donné, tu dois balancer beaucoup d'argent et prendre un risque, et après tu arrives à combien d'affiches il y aura ? Combien de bandes-annonces ? Combien de panneaux publicitaires achèteront-ils ? Et ça, c'est très très cher ! C'est vraiment au-delà du système « petit-budget », si c'est un gros film d'Hollywood, cela va de 10 à 30, cela dépend de ce que tu crois, dès fois il y a des centaines de millions à mettre là dedans, dans la promotion, dont aucune technologie digitale peut se passer, donc on verra.

Interview de Richard Bourderionnet - Traduction de Romain Basset

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