Critique La Crécerelle #1 [2018]

Avis critique rédigé par Nathalie Z. le jeudi 15 février 2018 à 09h00

A-t-elle vraiment le goût du sang ?!

La Crécerelle, ils pensent tous la connaître : une meurtrière, une criminelle qui assassine, massacre et noie dans le sang, ses victimes, sans pitié aucune. Mille rumeurs courent à son sujet, suppôt de l'outremonde, sorcière coupable des crimes les plus horribles et les plus abjects. Sûrement. Mais si cette femme était en fait celle qui sauvera l'espère humaine ? Rencontrez au détour d'un chemin la femme la plus haïe et crainte de cet univers nommé la Perle, observez cette silhouette longiligne qui ne cille jamais, ses cheveux noirs et raides contrastant avec une peau pâle si diaphane qu'elle semble irréelle. Plus écoutez son histoire...


La Crécerelle vient du Sud fertile et verdoyant et parcoure les royaumes sableux et arides du Nord, terre des Cités-Etats où la magie est méprisée. La Crécerelle tue, au fil des lieux parcourus, pour une bonne raison, et à travers ses yeux, nous découvrons les secrets de la Perle, les mystères des Cités-Etats et des marécages qui les bordent à l’extrême nord du monde, mais également les mystères sombres de l'outremonde. Cet outremonde est une réalité différente, une réalité qui étreint toutes les contradictions, toutes les impossibilités et qui existe en dehors de l'espace et du temps, partout et tout le temps à la fois. Il est à la source de la magie de la Crécerelle, il est à la source de son malheur.

C'est une tranche de vie de cette tueuse redoutée qui est contée ici, quelques flashbacks évoquent son départ précipité du Sud, son apprentissage de la magie et enfin l'erreur qui la lia à tout jamais à l'outremonde. Cette tranche de vie commence par une deuxième erreur de notre héroïne : croire qu'elle peut se détacher de l'outremonde. Cette fois, elle va devoir absolument réparer son erreur et assumer les conséquences de ses actes.

Lorsqu'elle tue, la Crécerelle fait dans l'atroce et l'esthétique, elle tue en puisant dans l'espace intérieur des gens et le résultat est souvent spectaculaire. L'usage de la magie fait perler de la sueur sanglante sur le front et le long du dos de la meurtrière. Chaque scène de mort est délicieusement décrite par l'auteur, un raffinement dans l'horreur qui évoque la puissance occulte qui se trouve derrière ces crimes.

Comment imaginer une telle horreur de la part de ce rapace proche du faucon...

la Crécerelle, petit rapace

La Crécerelle pourtant est bel et bien cruelle. Elle est pris au piège d'une relation toxique avec un être innommable et piège à son tour une jeune femme dans une relation malsaine proche du syndrome de Stockholm. Ces être déteignent les uns sur les autres. Les deux personnages principaux, la Crécerelle et cet autre personnage féminin tout aussi haut en couleurs mais dont je tais volontairement le nom, évoluent tout au long du roman ce qui crée du suspense et fait ainsi avancer l'intrigue.

L'univers du roman est particulièrement réussi. Une des villes qu'elle traverse, la capitale du vice, décadente et antique, est aussi appelé cité du gouffre. Un gouffre sans fond semble changer de place au sein de la ville. Il en est la frontière, parfois au sud, d'autre fois à l'ouest. Mais les Nordiens ne croient pas en la magie, ne la perçoivent plus, pour eux tout est normal. La ville est bâtie sur les bords de ce précipice et tous pensent habiter le plus loin possible du gouffre, or celui-ci à ses rebords remplis de maisons tassés les unes contre les autres. L'emplacement du gouffre est impossible à déterminer. Qu'elle que soit la direction par laquelle on arrive en ville, le gouffre est toujours situé de l'autre bout de la cité. Dans ce roman, chaque lieu est très particulier par sa description, sa topologie et ses mœurs. Des exergues placés subtilement dans le roman permettent d'en apprendre plus sur ce monde sans ralentir l'histoire principale.

crecerelle roman

Dans cet univers baroque, la Crécerelle, exceptionnellement cruelle et particulièrement farouche, est entraînée dans un tourbillon de plus en plus dangereux où rien de moins que l'avenir de ce monde est en jeu. La structure même du roman est en spirale, rappelant les histoires cycliques médiévales typiques des légendes arthuriennes. Découpé en cinq spires, et non en chapitres, le roman voit son rythme s'accélérer crescendo, l'action est de plus en plus intense, les enjeux également.

Loin des clichés de la fantasy, grâce à des personnages percutants, ce premier roman de sword and sorcery est intelligent et original. Le mode narratif est surprenant et agréable. L'histoire se termine en laissant un goût de reviens-y et l'envie d'en lire plus de l'auteur.

L'auteur, Patrick Moran, à la fois britannique et français, a étudié la littérature médiéval. Admirateur de J.R.R. Tolkien, Michael Moorcock ou William Gibson, il a été influencé par le jeu de rôle et ses études dans l'écriture de ce roman à la fois simple et brutal.

La conclusion de à propos du Roman : La Crécerelle #1 [2018]

Auteur Nathalie Z.
93

Ce premier roman est un bijou grâce à une écriture incisive, à une narration qui renouvelle le genre et un personnage principal dense et d'une complexité passionnante. L'univers est loin des clichés habituels et ce monde offre des perspectives très intéressantes pour qui voudrait l'adapter en jeu de rôle. L'intrigue est simple mais c'est l'aspect brutal et esthétique de l'horreur et de l'action dans le roman qui en font une des pépites dont Mnémos a le secret. Rappelez vous il y a peu Nemrod, une belle surprise sf française chez ce même éditeur.

On a aimé

  • Premier roman original par sa narration et sa structure en spirale aux enjeux personnels et cosmiques
  • Une héroïne atrocement cruelle surprenante
  • Un univers riche et profond

On a moins bien aimé

  • Une histoire sombre avec de l'horreur et des descriptions déconseillées aux plus jeunes

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