Critique Abandon ship [2009]

Avis critique rédigé par Amaury L. le dimanche 13 juin 2010 à 20h44

Ohé ! Ohé ! Pauvres rats abandonnés…

De nos jours, l’évolution des espèces animales, végétales ou minérales surprend par son adaptation rapide face aux changements radicaux de son environnement. Les rats ont acquis des compétences extraordinaires et organisent des croisières désordonnées et désorganisées sur tous les océans du monde. Les tours opérateurs dirigés par des rongeurs cupides ne comptabilisent plus les navires échoués ou coulés par temps calme. Mais le succès étant au rendez vous, on continue… Justement, un paquebot à échelle de nos virevoltants muridés tente une confrontation avec un iceberg de l’océan Arctique. Quelques minutes plus tard, le capitaine Rattus Norvegicus agite frénétiquement la ficelle de la cloche utilisée en cas d’urgence. Le bateau coule, il est temps que les rats quittent le navire… « Chouette, s’écrie Rattus Rattus, enfin de l’action… »

 


Navire en boîte…

L’illustration humoristique de la couverture suscite une curiosité impatiente. L’ouverture de la boîte concrétise étonnamment nos attentes avec un matériel atypique. Le plateau de jeu en deux parties comporte une partie cartonnée qui symbolise un océan parsemé d’icebergs, et un autre qui coulisse sur le premier représentant un paquebot de croisière. Complètement déplié, on atteint une longueur avoisinant les cent vingt centimètres. Prévoyez une table en conséquence. On continue avec sept figurines Rat en bois, huit dés spéciaux, sept tuiles Objectifs secrets, huit jetons Bateau qui coule, cinq portions de fromage et une règle en anglais. Pour les anglophobes, le lien suivant vous dirige vers une traduction française de l’éditeur américain AEG, un effort appréciable. Un matériel qui ne donne pas envie de quitter le navire !

http://www.alderac.com/abandonship/abandonship_rulebook_fr.pdf

 


Navire en règle…

Le but du jeu est de marquer le plus de points en sauvant prioritairement les rats avec les trois couleurs présentes sur la tuile Objectif secret reçue en début de partie. Les portions de fromage récoltées en chemin comptent dans le calcul final pour désigner le vainqueur.

Les tuiles Objectif secret (rat dans une barque naviguant sur trois couleurs indiquant les rats à sauver pour le joueur, les jetons Bateau qui coule (chiffre jaune sur fond bleu), les Portions de fromage (chiffre noir sur fond rouge).

En début de partie, les sept rats sont placés sur l’emplacement numéroté 10 du paquebot. Chaque joueur reçoit une tuile Objectif secret qu’il abrite du regard inquisiteur des autres participants.

On désigne un premier joueur qui lance les huit dés (7 aux couleurs des rats plus un neutre), en choisit un et applique son effet (faire avancer le rat correspondant du chiffre indiqué par le dé, le faire reculer…) puis le retire temporairement du jeu jusqu’à la fin du round. Il donne les dés restants au joueur de gauche. On poursuit ainsi et la manche se termine quand il reste uniquement un seul dé. A la fin d’une manche, on retourne face visible un jeton Bateau qui coule. On fait coulisser d’un nombre de cases le plateau Paquebot égal au chiffre inscrit sur le jeton (entre trois et huit). Si un rat se situe dans la partie immergée du paquebot, il est éliminé et le dé de sa couleur définitivement retiré. S’ils sont plusieurs, un sursis éphémère sauvera tous les rats qui s’échapperont des cases submergées sauf le dernier. Paix à son âme. Lorsqu’un rat atteint ou dépasse la case numérotée 36 du plateau Paquebot, il sauve sa peau et fera marquer des points de victoire à son ou ses propriétaires. Toutefois, le premier arrivé est considéré comme un lâche et marque donc 0 point, le second 5 points, le troisième 3, le quatrième 2. Le jeu prend fin quand quatre rats sont parvenus au sommet du paquebot.

Le plateau Paquebot.

 


Navire en détresse, rats en liesse…

Abandon ship a été créé par le célèbre (dans le monde du jeu) Reiner Knizia qui doit compter plus de 150 jeux édités. Son seul non écrit sur la boîte assure aux éditeurs la vente de quelques milliers de copies. Evidemment, quantité ne rime pas forcément avec qualité et nombre de ces jeux n’atteignent pas des sommets ludiques. De plus, l’homme profite de sa notoriété pour refourguer des déclinaisons de jeux déjà publiés et d’intérêt inégal aux quémandeurs éditeurs. Toutefois, AEG évite ce piège et livre aux amateurs une création originale de l’auteur qui satisfera autant les aficionados qu’un public éclectique. Le reproche principal, à juste titre, revenant fréquemment à l’encontre de cet auteur est de proposer des jeux où la thématique demeure secondaire et anecdotique. Abandon ship contredit complètement ces idées préconçues, certainement le travail du développeur Brent Keith s’impose comme une évidence à cette réussite, en délivrant un thème amusant en parfaite adéquation avec les mécanismes présentés.

Les rats n’ont pas encore quitté le navire.

Les joueurs incarnent des rats capricieux qui cherchent à quitter un navire en détresse. Le matériel augmente le plaisir de manipulation et l’envie de tester cette croisière burlesque. Malgré des règles accessibles, Abandon ship possède de solides arguments de séduction et une richesse surprenante. Tout d’abord, les joueurs reçoivent une tuile Objectif secret avec les couleurs des rats à sauver. Cela induit de retarder la découverte de vos rats préférés afin d’éviter toute gêne inopportune. En effet, la liberté de déplacer n’importe quel muridé facilite les entourloupes. Si on devine que tel rat appartient à tel joueur, on essaie soit de le faire arriver en premier (pas de points pour le premier arrivé), ou de freiner sa progression en lui assignant un dé avec un effet négatif ou faiblement positif. Le bluff s’invite naturellement, trouve une place agréable et bienvenue. Les décisions nombreuses entre faire avancer conséquemment un rat, tenter de récupérer une portion de fromage, bluffer, influencer innocemment les autres participants, appliquer l’effet d’un dé plutôt qu’un autre, apportent de la variété dans les parties et insufflent une dynamique intéressante dans un jeu où le hasard finalement se réserve un rôle de figuration. Un paradoxe pour un jeu basé essentiellement sur des lancers de dés !

Au secours, au secours, l’eau monte… On va tous se noyer !

Abandon ship joue la carte de la convivialité grâce à des parties intenses avec des temps d’attente minimes entre chacun de ses tours. Le fait de choisir un dé parmi un pool de plus en plus restreint accélère le rythme efficacement et réduit aussi la prise de décision de chacun des joueurs. Les participants ne s’ennuient jamais et s’investissent entièrement pendant la vingtaine de minutes que dure ce naufrage comique. On s’amuse du sort réservé aux rats malchanceux qui finissent leur parcours complètement noyés sous des mètres cubes d’eau. On ressent de l’inquiétude quand un de nos rats risquent de subir les effets d’un jeton Bateau qui coule, et de ce fait nous priver en fin de partie de précieux points de victoire. Cette sensation grisante de marcher constamment sur la corde raide accroît la tension et stimule une cogitation neuronale étonnante, surtout dans un jeu de dés, pour repérer la meilleure solution. Cela déclenche un désir de multiplier les parties lors d’une même soirée, un signe évident que Abandon ship procure une satisfaction ludique non feinte.

Les dés rats tisent sec…

Contrairement aux indications de l’éditeur qui stipulent une pratique uniquement de trois à sept joueurs, rien n’empêche de jouer à deux. Sans changer un iota des règles, Abandon ship reste excellent dans cette formule et offre un contrôle sur le déroulement global supérieur aux autres configurations. Evidemment, l’adage « plus on est de fous, plus on rit » prend toute sa signification autour de cette course contre la montre. Toutefois, si vous jouez principalement en couple, n’occultez pas Abandon ship de rejoindre votre ludothèque, il vous satisfera davantage que des jeux spécifiquement étudiés pour deux joueurs.

La conclusion de à propos du Jeu de société : Abandon ship [2009]

Auteur Amaury L.
75

Décidément, Alderac Entertainment Group dévoile une stratégie éditoriale incroyable en proposant des jeux intéressants, tous dotés d’un matériel réussi. Abandon ship séduira un public large, autant les familles que les joueurs confirmés, grâce à des mécanismes ingénieusement accessibles. On reconnaît le talent de Reiner Knizia qui arrive à transcender par des astuces innovantes, des mécanismes conventionnels. Se jouant avec autant de plaisir de deux à sept joueurs, Abandon ship se classe parmi les jeux légers qui se jouent rapidement et sans ennui. Un jeu à ne pas abandonner !

On a aimé

  • Pour tout public
  • Matériel agréable et amusant
  • Thématique rigolote et réussie
  • Très rapide à jouer et à comprendre

On a moins bien aimé

  • Prévoir une grande table

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