Critique Le Pire est avenir [2004]

Avis critique rédigé par Manu B. le dimanche 9 mai 2010 à 12h22

No futueur

"Quelque chose bouge dans l'ombre que je ne connais pas.
Quelque chose rampe.
Je me lève, je sors sur le balcon qui semble ne pas vouloir s'écrouler tout de suite. L'aube paraît, grise. La ville s'étend sous mes yeux, éventrée, gorge profonde, les boyaux autrefois rectilignes, gaiement désorganisés. Le béton calciné a pris une couleur sale. L'air est saturé de poudre, ça ira mieux plus tard, quand le vent sera levé..."


Paris est coupé en deux. Au nord et presque tout autour, les "Vieux" tiennent leurs positions et le périphérique est le terrain du jeu mortel et invariable de minage et déminage. Au Sud, les "Jeunes" se sont dispersés en groupes dans une joyeuse anarchie. Paris, la ville romantique, est devenue un champ de ruines. Tout a commencé avec une espèce de mouvement de rébellion des jeunes contre leurs aînés. Puis cette vague s'est radicalisée et les premiers meurtres ont eu lieu. La vague s'est transformée en tsunami et la guerre s'est révélée inévitable. Ils ont pris les armes et ont mis la ville à feu et à sang.
Aujourd'hui, ils ont cent neuf jours pour se préparer à l'offensive de l'armée. L'ultimatum ne leur laisse le choix que de se rendre ou de mourir. Il n'y aura donc pas d'avenir à cette révolution au delà d'une centaine de jours...

Maïa Mazaurette est un auteur multigenre. Journaliste féministe, elle est surtout connue pour ses ouvrages sur la sexualité en lien avec la société. Après une parenthèse en fiction en 2004 avec Le Pire est avenir (réédité ici aux éditions Mnémos), elle y revient en 2008 avec Dehors les chiens, les infidèles. Elle a écrit depuis trois nouvelles dans le genre.

Et si les jeunes se soulevaient contre les vieux ? Idée originale s'il en est, c'est aussi le fantasme de tout un chacun pendant l'adolescence.
Mais comment procéder pour y parvenir et comment s'organiserait cette société sans l'influence des parents et des gouvernants ? Une bonne révolution et on n'en parle plus.
Mais d'abord, poser la règle arbitraire: on est jeune quand on a moins de vingt cinq ans. Le jour de son vingt cinquième anniversaire, ça y est, on est devenu un vieux con. Donc bon à jeter aux chiens, à être éliminé. C'est la règle.
Voilà le point de départ du roman: imaginer une rébellion des moins de vingt cinq ans contre tous les autres. Dans ce contexte, la révolution a eu lieu et les jeunes tiennent Paris. Tous se battent contre un avenir qui signifient la mort: ils ne veulent pas vieillir.
Mais tout ne se passe pas aussi bien que prévu car au-delà de la vigueur et de la hargne des rebelles, ce mouvement ne peut avoir d'avenir que s'il est organisé. Or, l'anarchie régnant sur les ruines encore fumantes, le mouvement est condamné à mourir. Dans ce chaos juvénile, des groupuscules apparaissent et des idées de pouvoir germent ici et là. Ce qu'ils ont combattu dans leur révolution, certains vont le contrefaire pour asseoir leurs ambitions personnelles.
Pour cette génération, rien ne change, l'histoire se répète.
Au milieu de tout cela, deux snipers d'exceptions jouent à qui mieux mieux. Il y a d'abord Silence qui, comme son nom le suggère, reste invisible. Personne ne sait à quoi il ressemble excepté quelques personnes de la Cellule. Il y a ensuite un petit nouveau, nommé l'Immortel, qui commence à faire parler de lui. Et ces deux là entrent dans une compétition mortelle, celle du meilleur tableau de chasse. Un lien invisible se tisse entre eux.

"Cinq mille ans d'histoire à assumer: les vieux nous submergent et nous parasitent. On en bouffe, du vieux. On s'en gave, de leur cadavres.(...) D'autant que nous constituons la première génération s'étant toujours pensée comme somme d'individus autonomes et non comme simple maillon d'une chaîne avec boulet - une génération pour qui même les concepts de nation,  de classe ou de famille restent abstraits.
Maintenant, c'est fini: rien ne nous survivra."


Le Pire est avenir est un roman fort. La prose de Maïa Mazaurette est une succession de phrases choc. Elle égratigne tout à son passage. Toute la société passe au rasoir littéraire de sa plume. Pouvoir, éducation, religion, politique, économie. Tout est écorché dans ce roman avec un cynisme et une rare violence.
Mais c'est gentiment utopique et l'on peine à y croire. Il faut être adolescent pour croire que ce roman est une tuerie. Passé l'âge, le roman perd une grande partie de sa force. On n'accorde qu'avec une certaine indulgence les revendications de ces jeunes qui ne connaissent rien à la vie, qui n'ont pas encore vécu et qui croient qu'ils peuvent s'octroyer le privilège de vivre leur vie comme ils l'entendent. Ça n'est pas si simple.
L'autre problème tient sans doute à son rythme. On monte dans les tours dès les premières phrases et on reste dans le rouge jusqu'à la moitié du roman. Du coup, on a cette impression de longueurs alors les formules fleuries  explosent. Un paradoxe.
La deuxième partie est plus maîtrisée et la fin est, pour le coup, d'un cynisme qui dépasse nos espérances. Un dénouement très réussi.

La conclusion de à propos du Roman : Le Pire est avenir [2004]

Auteur Manu B.
75

Avec un style très mordant, Le Pire est avenir est un roman intense et politiquement incorrect. Malheureusement, en s'adressant à une tranche d'âge assez limitée, elle exclue une bonne partie du lectorat qui peine à s'y retrouver.
La morale dans tout cela: l'histoire se répète génération après génération.

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