Critique The Children [2009]

Avis critique rédigé par Nicolas L. le jeudi 4 mars 2010 à 15h03

Pire que la rougeole ou la scarlatine

Deux sœurs et leurs familles se réunissent dans une maison de campagne pour y fêter les Rois. Les retrouvailles sont joyeuses, le sol est immaculé suite aux récentes chutes de neige – ce qui augure de belles glissades en luge -, l’on n’a pas oublié de se fournir en alcool et la dinde est imposante et bien lustrée.  Bref, l’on s’apprête à passer un excellent moment festif. C’est alors que le comportement des enfants commence à changer… à devenir inquiétant.

Les enfants tueurs impressionnent toujours. L’innocence, un couteau ensanglanté à la main, cela marque forcément l’esprit des adultes. Comment est-il possible qu’un être aussi inoffensif – en apparence - puisse porter atteinte à la vie d’autrui, et encore plus horrible, de ses parents ? Impensable. En fait, c’est oublier un peu vite la cruauté « naturelle » de ces chères têtes blondes, les enfants-soldats fanatisés et les gamins des favelas ou de Bogota. Mais dans une société sécurisée comme la nôtre, ce genre d’image frappe, choque… et déclenche des émotions fortes chéries par le cinéma d’horreur.

Ainsi, le cinéma d’épouvante a depuis longtemps utilisé les enfants pour faire peur. Un visage angélique cachant un tueur est d’autant plus efficace qu’il dissimule un être manipulateur et machiavélique. Le genre fourmille donc de dizaines de cas ou un enfant tueur envoie ad patres les représentants adultes (ou parfois même leur camarades), telle une habile taupe infiltrée dans des troupes ennemies. On pense bien entendu à La malédiction, Une si gentille petite fille, Le Village des damnés, Les Enfants du Maïs, Les révoltés de l'an 2000 (et Sa majesté des mouches) et La Mauvaise Graine, pour ne citer que les plus célèbres. Des films dont le principal but (même si le message diffère souvent, allant de la paupérisation de la cellule familiale à la banalisation de la violence) consiste à montrer des enfants trompant, en jouant sur l’affectif (détail très important), des adultes parfois un peu naïfs. Mais il y a aussi bon nombre de métrages qui utilisent ce très efficace générateur de terreur de manière ponctuelle, au sein de films au thème plus général. George A. Romero, par exemple, cède au cliché de très belle manière quand une jeune enfant zombifiée croque sa mère (la pauvre en reste coite) qui la tient dans ses bras.

The Children
ne révolutionne pas ce genre donc assez souvent exploité (pas toujours avec une grande réussite, d’ailleurs). Le réalisateur, Tom Shankland, n’en avait d’ailleurs certainement pas l’ambition. Et on ne peut que le féliciter d’avoir pris cette décision car le scénario ne se prêtait pas à un exercice plus ambitieux (et périlleux !). Bourré d’incohérences, de clichés, de désengagements prudents (les enfants ne sont pas naturellement violents mais sous l’influence d’un virus)  et d’astuces faciles, The Children présente à l’écran quatre adultes absolument crétins (l’amour parental n’excuse pas certains de leurs comportements, ni leur stupide aveuglement) coincés, comme par hasard, dans une maison isolée par la neige. Ainsi, on s’étonne de la manière où deux gamins parviennent à maitriser au sol une adulte et de ces futures victimes qui s’éloignent, seules, pour suivre des pistes ensanglantées. Surtout, on peut comprendre qu’un adulte ait toutes les peines du monde à éliminer ses enfants, mais il peut quand même faire preuve de prudence et s’en tenir à l’écart. L’attitude des parents est donc nettement moins crédible que celle de ceux du Le Village des damnés par exemple, où les enfants utilisent de puissants pouvoirs de suggestion pour arriver à leurs fins. Ici, la subtilité (un maquillage d’accident) n’a lieu que pour le premier meurtre. Ensuite, n’importe quel crétin peut se rendre compte que quelques chose cloche avec ces gosses au teint de macchabé, vomissant en boucle, et ayant une forte attirance pour tout ce qui est coupant ou pointu. N’importe qui, sauf les adultes débiles de ce film (l’ado l’est beaucoup moins). Enfin, il y a le très maladroit dénouement : un twist deviné depuis des lustres (même si avant, une petite surprise nous est réservée). Bref, l’on a bien affaire à un pur scénar de bis qui tache qui, dans d’autres mains que celles de Tom Shankland, aurait surement abouti à un divertissement badass et très gore. Lui a décidé de nous foutre la trouille.

Il y parvient en partie grâce à sa réalisation. Dans ce domaine, Tom Shankland fait très fort. Oh, il n’invente rien, on peut même dire que dans le registre du cadrage et du montage, il réutilise les très vieilles recettes de grands maîtres, comme celles de John Carpenter. Mais il le fait sacrément bien, avec une maestria qui laisse augurer, pour Tom Shankland, un avenir prometteur (même s’il n’est plus un débutant). Toutes les séquences sont soigneusement calculées et chaque plan apparaît comme étant le meilleur choix. Par exemple, le gore est très présent mais il ne devient pas envahissant et il utilise l’impact graphique du sang répandu sur la neige deux ou trois fois, pas plus, mais avec un véritable sens artistique. Bien au contraire, le gore est un apport complémentaire, un élément structurel de plus, marié avec une bande son ultra fignolée et de nombreuses variations de focales (le plan d’ensemble, cadré en plongée de la maison, sur les deux enfants immobiles dans le jardin, est absolument génial et évoque les grands moments d’Halloween). Tom Shankland oublie ici la vue subjective, la shaky cam et la caméra épaule pour offrir aux spectateurs un spectacle old school d’une très forte cinégénie. Un retour aux sources, celle d’où jaillit le véritable cinéma d’horreur, qui fait un bien fou. Youpi.


Autre point positif : les enfants. Ou plutôt la manière utilisée par Tom Shankland pour les mettre en scène et les filmer. Des plans courts, assez variés, qui font oublier, malgré des cadrages serrés, que l’on a affaire ici qu’à des comédiens très jeunes et inexpérimentés, l’utilisation fréquente de regards hors cadre, qui laisse au spectateur toute manière à réflexion… et inquiétude. Les champ-contre-champ entre parents et enfants dégagent fréquemment une émotion étrange, un brin fantasmagorique. Souvent immobiles, voire figées, emmitouflés dans leurs vêtements hivernaux, ces enfants n’en paraissent que plus inquiétants et évoquent un peu les David de Planète Hurlante.  Frissons (presque) garantis ! Bref, avec de tous petits moyens, Tom Shankland démontre ici qu’il sait se servir d’une caméra et d’un ban de montage.

La conclusion de à propos du Film : The Children [2009]

Auteur Nicolas L.
68

Belle petite surprise que The Children, petite série B britannique réalisée par un cinéaste encore peu expérimenté. Malgré de minuscules moyens et un scénario vraiment pas exceptionnel dans son originalité et dans sa rigueur, Tom Shankland parvient avec brio à mettre en forme un film dégageant une véritable ambiance horrifique. Se le film n’est pas toujours effrayant (voire pas du tout pour certains), le cinéphile ne pourra qu’être admiratif devant sa réalisation, fruit d’un travail consciencieux et inspiré.

On a aimé

  • Une réalisation old school admirable
  • Un gore bien dosé
  • Un film d’horreur « sérieux » qui ne tourne pas au ridicule

On a moins bien aimé

  • Un scénario perfectible
  • Quelques séquences peu crédibles

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