Critique Frayeurs [1980]

Avis critique rédigé par Nicolas L. le lundi 19 mai 2008 à 01h06

Un éprouvant poème macabre presque parfait

Dans une petite ville du Massachusetts – Dunwich, joli hommage au maître de l’horreur qu’est Howard Philips Lovecraft – un prêtre commet l’odieux péché de se pendre au cœur d’un cimetière. Au même moment, à des lieues de là, dans la grande ville de New York, une femme douée de dons de voyances vit l’évènement en direct. Ne supportant pas cette vision, la jeune femme tombe dans un profond coma, au seuil du trépas. La croyant décédée, ses proches l’enterrent vivante, et elle n’est sauvée d’une mort horrible par suffocation que par l’esprit d’initiative d’un journaliste, Peter Bell. Ensemble, ils décident de résoudre le mystère de cette vision, et ils essayent de localiser le lieu où le prêtre a été inhumé. Dans leur macabre enquête, ils vont découvrir une horrible vérité : la porte des Enfers est ouverte et les morts sont sur le point de sortir pour dévorer les vivants. Cela sera le jour de la Toussaint…


Reprenant la même recette que lors de l’opus précédent (l’Enfer des zombies), Lucio Fulcio réalise là ce que l’on appelle aujourd’hui le deuxième volet de la Trilogie des Morts, bien que les deux histoires n’aient strictement rien à voir. Car ce qui relie essentiellement les deux films, c’est les similitudes narratives et graphiques, le cinéaste restant dans la même thématique qui a fait le succès, un an plus tôt, du célèbre Zombi 2 ; réaliser un poème macabre et viscéralement terrifiant sur le thème des zombis.
On peut noter cependant quelques petits changements, où ce que l’on pourrait aussi désigner comme des évolutions. Le scénario, tout d’abord, qui se démarque totalement de l’aspect folklorique vaudou pour se rapprocher plus du fantastique lovecraftien, de part le cadre qui est la Nouvelle Angleterre, l’introduction du spiritisme (l’héroïne est une médium), et enfin la notion de porte des Enfers. Même si leur apparence ne les différencient pas de ceux des autres films de la période (air abruti ou inexpressif, démarche lente et incertaine, voracité exacerbée, non utilisation de couverts pour le dîner), les ignobles créatures qui doivent anéantir l’humanité s’éloignent par ces détails, du moins symboliquement, des archétypes de zombis, ou même de goules. Ce sont des Morts qui ne se voient pas refuser une entrée dans l’au-delà, comme ceux de Romero (‘’Quand il n’y a plus de place en Enfer, les morts reviennent sur la terre’’, dit-on dans Dawn of the Dead), mais qui au contraire, en ressortent (c’est vrai que de l’autre coté, cela n’a pas l’air terrible…). Le monde des Morts se rapproche plus, par cette façon de penser, à une autre dimension, un monde parallèle relié au notre par des portes.

Fulci a joué aussi le jeu de la démesure graphique. Un des aspects qui a fait le succès de l’Enfer des Zombies est la débauche d’effets gore et de scènes bien crades. Et on pensait, tout en espérant le contraire, que ces extrémités ne pourraient être dépassées avant bien longtemps. Les premiers spectateurs, qui, en 1980, ont visionné Frayeurs, se sont rapidement aperçus du contraire. Car le deuxième opus dépasse largement en morbide, en macabre et en glauque son prédécesseur. Et, il est même encore plus fantasmagorique de part le cadre des évènements et l’approche métaphysique du sujet. Bref, il est beaucoup plus impressionnant !
Encore aujourd’hui, il reste une valeur étalon du jusqu’au-boutisme horrifique. Oui, horrifique car Frayeurs reste avant tout un film d’horreur et non pas un vulgaire film ‘’vomitif’’, ces œuvres qui atteignent la démesure dans le craspec, qui donne envie de vomir son quatre heures, mais qui n’ont aucun impact sur notre psyché – comme les films de cannibales par exemple. Les séquences chocs sont cependant nombreuses et certaines sont devenues célèbres, comme le jeune homme qui se fait trouver le crâne à la perceuse ou la jeune fille vomissant ses entrailles. Gratuitement provocantes, elles ne sortent pas trop, heureusement, de la trame narrative du film mais elles sentent parfois dangereusement le hors sujet. Tendance qui s’amplifiera hélas dans l’Au-delà, son film suivant.
Au milieu de ces scènes extrêmes, peut-être un peu inutiles, Lucio Fulci récidive la prouesse de nous offrir des séquences d’une magnifique poésie macabre comme celle de la résurrection des morts dans le caveau maudit. Là, le maître du gore italien abandonne avec réussite le paroxysme viscéral pour construire des scènes d’une esthétique extraordinaire qui, aidées par une photographie somptueuse et la musique de Fabio Frizzi, emprunte la voie de la terreur pure, du fantasmagorique spectral.

Dans le rôle de Mary, la jeune médium, Catriona McCall est en tout point semblable à la Tisa Farrow de Zombi 2, et c’est elle qui nous offre la meilleure prestation, au milieu des autres comédiens, qui hélas ne paraissent pas trop bien dirigés. Il faut bien l’avouer, la direction d’acteurs et le jeu des interprètes laissent parfois un peu à désirer, comme si Fulci était trop préoccupé par les autres aspects de son film pour s’en apercevoir. C’est un des gros points faibles du film et cela ne vient pas de la valeur intrinsèque des acteurs car quand on se penche sur la distribution, on constate qu’elle n’est pas de médiocre qualité : le vieux routard Christopher Georges, Janet Agren, Giovanni Lombardo-Radice, Venantino Vetantini… Bref, que des spécialistes de la série B des années 70. Quel dommage, car Frayeurs aurait été certainement un véritable chef d’œuvre si cet aspect avait été mieux maîtrisé.

La conclusion de à propos du Film : Frayeurs [1980]

Auteur Nicolas L.
80

Frayeurs est presque le film d’horreur parfait. Seule une interprétation médiocre plombe la qualité du métrage, autrement exemplaire. Doté d’un meilleur scénario que le précédent opus, Fulci dépasse les limites fixée jusqu’alors tout en arrivant à garder suffisamment de maîtrise pour nous offrir un véritable poème macabre, dont la fin ambiguë laisse la porte grande ouverte à notre imagination.

On a aimé

  • Une histoire intéressante
  • Des effets gore saisissants
  • Un extraordinaire ambiance macabre
  • Une portée métaphysique assez originale

On a moins bien aimé

  • Une direction d'acteur un peu trop poussive

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