16ème Festival du Film Fantastique de Neuchatel : on y était !
Zombies, vampires, grand-mère démoniaque et John Carpenter au programme...

Du 1er au 9 juillet s'est tenue la seizième édition du Festival International du Film Fantatique de Neuchatel (NIFFF). C'est dans un cadre paradisiaque - qui plus est mis en valeur par un climat plus qu'agréable - qu'ont été projetés plus de soixante-dix films tout au long de ces neuf jours de festival, entre des inédits de tous horizons et une rétrospective du cinéma de John Carpenter.


​Pas dégueu comme cadre, hein ?


​Comme chaque année, le NIFFF s'est articulé autour de quatre grandes catégories de films : la traditionnelle et incontournable compétition internationale, les new cinema from asia (des films venus de toute l'asie, du japon à l'inde), les ultra-movies (le titre est suffisamment explicite) et les "3th kind" (des films se trouvant aux limites du cinéma de genre). Un très beau melting-pot permettant de découvrir à la fois de véritables curiosités (qui, bien souvent, ne trouveront malheureusement pas le chemin du marché française), les nouveaux opus de réalisateurs installés ainsi que quelques longs-métrages d'ores et déjà attendus.

Autour de ces projections, le NIFFF propose de nombreuses autres activités sattellites : des conférences (notamment les Imagine the future, des conférences multidisciplinaires qui traitent de problématiques liées à la production et à l'utilisation d'images numériques), des concerts (dont celui, très attendu, de John Carpenter, voir ci-dessous), un off très sympathique mêlant concerts et moments d'échanges entre festivaliers, des rencontres avec les nombreux invités, des diffusion en plein air ouvertes à tous,... Autant dire que le programme de ces neufs jours était bien chargé pour quiconque souhaitait en profiter à bloc. Pourtant, ici, pas de course acharnée entre deux séances ou d'emplois du temps surchargés, le tout se fait à un rythme zen permettant de profiter du festival, du cadre enchanteur et des "fameuses" bières suisse...

Bref, tout est pensé pour que l'amateur de cinéma de genre passe de très agréable vacances, et ce d'autant plus que le pass illimité permettant d'accéder à l'ensemble du festival est à un prix raisonnable (heureusement d'ailleurs, car le niveau de vie à Neuchatel est conséquent pour une bourse française). Nous y avons quant à nous passé trois jours, suffisamment pour pouvoir assister à une petite dizaine de projections variées.


Et puis comment ne pas évoquer dans ces quelques lignes l'évènement majeur de cette seizième édition : la venue du maître incontesté du genre, John Carpenter, pour un concert exceptionnel donné à guichet fermé (petit extrait dans la vidéo ci-dessous). L'équipe du NIFFF en a d'ailleurs profité pour proposer aux festivaliers une rétrospective de l'ensemble de la carrière de Carpenter, permettant de (re)voir tous ses films sur écran géant, y compris les moins connus (Dark star, son premier film, était diffusé), dans des séances parfois intimistes, parfois ouvertes au plus grand nombre (en plein air). Franchement, revoir New York 1997 ou Fog sur grand écran, quel pied !


Extrait du concert donné par John Carpenter au NIFFF
 

Avec cette seizième édition, le NIFFF confirme haut la main qu'il est l'un des festival européen les plus réussis, entre une programmation variées et de qualité et une ambiance très très agréable. Misons sur le fait qu'on y retournera pour vous en parler en 2017 !

PETITE RETROSPECTIVES DES FILMS VUS :

Détour, de Christopher Smith (compétition internationale) : Christopher Smith n'en est pas à son coup d'essai : Creep, Severance, Black Death, Triangle. Le britannique n'est pas un manchot, et son nouveau long-métrage s'annonçait comme un des évènements important de ce seizième NIFFF. Perdu... En fait, avec Détour, Christopher Smith signe son film le plus faible. Si, une nouvelle fois, le réalisateur démontre qu'il est un excellent conteur d'histoire et si, comme d'habitude, son film fait preuve de qualités formelles indéniables, le tout ne parvient à pas à faire illusion dès lors que son scénario dévoile ce qu'il a au fond des tripes. Malgré les nombreux tours de passe-passe proposés (on n'en dira pas plus pour ne pas spoiler), l'histoire s'avère si ridiculement banale qu'elle peine à justifier tous les artifices mis en place pour la raconter (qui, ici, ressemblent plus à des caches-misères). En plus, le film est desservit par un casting très peu charismatique (mention spéciale à Tye Sheridan pour sa paralysie faciale). Au final, si Détour n'ennuie jamais (Christopher Smith n'est pas un manchot, et il a du talent), on ressort de la projection avec un sentiment assez désagréable de vacuité.

February, de Osgood Perkins (compétition internationale) : Premier film du petit-fils d'Anthony Perkins (souvenez-vous, Norman Bates, c'était lui !), February est un petit film d'horreur comme on en fait des dizaines chaque année. Clairement, Osgood Perkins connaît ses classiques, il en reprend en effet à la fois des plans évocateurs ainsi qu'un certain nombre de ficelles narratives. Mais dupliquer le travail de ses maîtres ne suffit malheureusement pas à faire un bon film (ça se saurait si ça fonctionnait à tous les coups). February ressemble ainsi à un court-métrage que l'on aurait artificiellement rallongé pour qu'il tienne sur ses quatre-vingt dix minutes réglementaires. Si la narration explosée peut à la rigueur se justifier (encore que...), la propension qu'a le film à étirer chaque situation outre mesure, qui plus est en les surdramatisant, finit par sérieusement agacer. En fait, February est un film d'horreur dans lequel les personnage savent qu'ils sont dans un film d'horreur. Du coup, chaque situation normalement anecdotique devient ici potentiellement dangereuse et terrifiante (à l'image, par exemple, où l'héroïne flippe parce que la ventilation fait du bruit). La dernière partie parvient tout de même à relever suffisamment le niveau pour éviter le naufrage avec quelques séquences de trouilles plutôt réussies, ainsi qu'un final assez plaisant.

Le complexe de Frankenstein, d'Alexandre Poncet et Gilles Penso (Histoire du genre) : Après l'excellent Ray Harryhausen, le titan des effets spéciaux, Alexandre Poncet et Gilles Penso continuent leur exploration de l'histoire des effets spéciaux. Ce nouveau documentaire se situe dans la continuité du précédent, recueillant les témoignages de celles et ceux qui ont oeuvré au développement de cet art, des marionnettes aux C.G.I. en passant par les animatronics : Rick Baker, Phil Tippett, Tom Woodruff, Chris Walas, Greg Nicotero ou Alec Gillis parmis de très nombreux autres. Autour d'eux, des réalisateurs comme (là aussi entre de nombreux autres) John Landis, Guillermo Del Toro ou Joe Dante partagent leurs expériences diverses sur des films précurseurs du genre comme Le Loup-garou de Londres, Gremlins ou Hellboy. Du requin de Les Dents de la Mer aux Naviis d'Avatar en passant par les révolutions que furent (par exemple) Terminator 2 ou Jurassic Park, ce sont trois décennies d'évolution des effets spéciaux qui sont passées en revue, les intervenants présentant nombre d'aspects techniques passionnants et livrant des réflexions intéressantes sur l'avenir des effets spéciaux dans le cinéma. Bien que le tout manque cruellement d'extraits de films (et suppose donc une bonne connaissance des films ou des scènes évoqués), ce documentaire n'en demeure pas moins être une grande réussite, dans la droite lignée de son prédécesseur.

Miruthan, de Shakti Soundar Rajan (compétition internationale) : Le premier film de zombies du cinéma de bollywood (si, si !), cela ne pouvait que créer l'évènement au NIFFF. Le résultat est très exactement ce que l'on pouvait en attendre, à savoir du Bollywood sauce zombies contenant tous les éléments classiques de ce cinéma (chants, danses, entracte, ventilateurs dans les cheveux, romance) mixé avec les éléments classiques du film du zombies inspirés (pour ne pas dire un plagiés) des classiques du genre (notamment 28 jours plus tard et L'Armée des morts). Alors pour peu que l'on apprécie le côté "exotique" du cinéma bollywoodien, Miruthan fait vraiment plaisir à voir. C'est un petit peu une carte postale du pays (bien mis en valeur, d'ailleurs, par de magnifiques plans aériens) que l'on est content de recevoir. Si, par contre, le cinéma indien n'est pas votre truc, Miruthan risque d'être une épreuve : le jeu des acteurs est approximatif (ils n'ont pas l'air de tous jouer dans le même film), l'humour vole au raz des paquerettes, la mise en scène est aussi cliquante que vide, les musiques sont kitchissimes,... En tout cas, si vous n'avez jamais eu l'occasion de voir un film bollywoodien, celui là est une bonne entrée en matière, et ce d'autant plus qu'il s'étale sur une durée très raisonnable (1h40, ça change du format 3h habituel).

Orgueil & Préjugés et Zombies, de Burr Steers (ultra movies) : On ne pouvait pas passer à côté de cette adaptation du roman de Seth Grahame-Smith, avec tout de même, avouons le, quelques doutes quant à la qualité générale du produit (rappelons que la précédente adaptation de Seth Grahame-Smith, c'était Abraham Lincoln, Chasseur de Vampires, et que le réalisateur, Burr Steers, avait commis 17 ans encore avec Zac Efron). Et au final, et bien on s'est retrouvé devant un film très plaisant. Alors non, Orgueil & Préjugés et Zombies n'est pas un chef d'oeuvre du septième art, et oui, ses détracteurs pourront soulever tout plein de défauts difficiles à excuser. Mais pris dans son ensemble, on doit reconnaître que le film fait le taff et ne se contente pas de son simple concept de départ (comme Zombeavers, par exemple, présenté il y a deux ans au NIFFF). On est donc vraiment dans un Jane Austin façon série B : les personnages se disputent en faisant du karaté, les demoiselles vont boire le thé en cachant un arsenal mortel sous leurs robes, tous les protagonistes sont outrageusement badass,... Le casting participe également à cette réussite en déployant une bonne humeur et une énergie communicative (mention spéciale à Matt Smith), et ce même si certains comédiens sont malheureusement sous-exploités (Lena Headey, qu'on aurait aimé plus présente). Un bon film pop-corn, à savourer avec des potes, des bières et des cahuettes.

The Transfiguration, de Michael O'Shea (compétition internationale) : Premier long-métrage de Michael O'Shea, The Transfiguration propose une variation relativement nouvelle sur le thème du vampire. Présenté au dernier Festival de Cannes dans la sélection Un certain regard, le film avait fait sa petite sensation, suffisamment en tout cas pour que l'équipe du NIFFF décide de le programmer dans le cadre de cette seizième édition. N'y allons pas par quatre chemins, The Transfiguration est un film bancal, particulièrement réussi dans quelques-uns de ses aspects, mais également fort peu inspiré dans un certain nombre d'autres. Au niveau des moins, on va trouver une mise en scène peu inspirée (ça ressemble à tous les films indés américain), un propos social faible, des personnages caricaturaux ainsi qu'une propension agaçante à utiliser des effets sonore de mauvaise série B. Au niveau des plus, on mettra en avant le travail impeccable en terme de direction d'acteurs (l'acteur principal, Eric Ruffin, est impressionnant du haut de ses quatorze ans), une relecture intéressante (et relativement nouvelle) du mythe basée sur la pop-culture, une belle montée en puissance dramatique ainsi qu'un parti-pri réussi de faire un vrai film de vampire sans surnaturel. The Transfiguration est donc bancal, mais jamais déplaisant, et méritait amplement sa place dans la compétition internationale.

The Wave, de Roar Uthaug (films of the third kind) : Gros carton au box office norvégien, The Wave s'en va jouer sur le terrain d'Hollywood en proposant un film catastrophe dans la plus pure tradition du genre. Doté d'un budget nettement plus limité que ses équivalents outre-atlantique (cinquante millions de couronnes, soit un peu plus de cinq millions d'euros), The Wave fait assez largement illusion sur un plan formel, proposant une belle catastrophe digne de ce nom (l'effondrement d'un fjord), certes sans fioritures, mais suffisamment efficace pour tenir le spectateur en haleine tout du long de sa première partie. Mais cette réussite formelle mise à part, The Wave n'est un film catastrophe de plus qui reprend des formules éculées, aligne tous les poncifs possibles et imaginables et finit par se perdre dans de trop nombreuses péripéties, toutes plus prévisibles les unes que les autres. En terme d'écriture, les personnages sont plutôt faibles, et malgré un casting de qualité, on peine à ressentir quoi que ce soit pour ces protagonistes. Au final, malgré une première partie efficace (à défaut d'être originale), The Wave finit par ennuyer, puis par sombrer dans le grotesque lors d'un épilogue plus que poussif. Dommage...

Trash Fire, de Richard Bates Jr (compétition internationale) : Richard Bates Jr s'était beaucoup fait remarquer dans les festivals avec son premier film, Excision. Il revient avec Trash Fire et nous démontre qu'il est clairement un cinéaste avec lequel on devra compter dans les années à venir. Son deuxième long-métrage est en effet une grande réussite, un numéro d'équilibriste périlleux qui alterne habilement entre comédie (noire) et thriller claustrophobe. On rit beaucoup, mais cela n'empêche pas au réalisateur d'installer, petit à petit, une ambiance lourde et pesante (parce que Bates sait jouer avec les nerfs des spectateurs, certaines séquences s'avèrent particulièrement stressantes). Le tout est de plus mis en valeur par un scénario bien écrit (les dialogues sont juste géniaux), des comédiens parfaits (Fionnula Flanagan est exceptionnelle de méchanceté) ainsi que des thématiques vraiment bien traitées sur le poids de l'héritage familial. On pourra regretter que l'histoire reste somme toute classique, mais au regard de l'éclatante réussite de tous les autres aspects, ce n'est pour ainsi dire presque rien.




 

Auteur : Vincent L.
Publié le vendredi 8 juillet 2016 à 17h04

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