Critique Santa Sangre [1989]

Avis critique rédigé par Christophe B. le samedi 3 juillet 2004 à 11h13

Un film violent, tourmenté et poétique !

L’histoire
Comment vais-je pouvoir m'y prendre pour vous décrire un film aussi inclassable et indescriptible que celui-ci ? Je ne suis pas certain de trouver le langage adéquat, et c'est peur-être pour cela que ce film fonctionne aussi bien.
Je vais donc commencer par tenter de synthétiser l'histoire : Phénix est un enfant de douze ans élevé dans un cirque ou il exécute quelques tours de magie. Son père est un lanceur de couteaux porté sur la bouteille et sa mère, Concha, une trapéziste qui exécute ses numéros accrochée par les cheveux dans les tringles du chapiteau. Elle est aussi la prêtresse d'un culte païen envers une mystérieuse sainte qui à eu les deux bras coupés. Un soir la mère de Phénix surprend son mari qui la trompe avec une autre femme. Ne pouvant le supporter, elle castre le lanceur de couteau avec de l'acide avant que celui-ci ne lui arrache les deux bras puis qu'il se suicide. Tout cela devant les yeux de l'enfant.
Bien des années plus tard on retrouve Phénix enfermé dans un asile d'aliénés. C'est sa mère qui, surgie de nulle part, viens le délivrer. Tous deux montent un spectacle étrange de mime, dans lequel Phénix "joue" les bras de sa mère. Phénix, totalement manipulé par Concha assassine à tours de bras. Reste à savoir ce qui, dans tout ceci, est réalité ou illusion…
Un film « psychanalytique »
La facilité pourrait me faire dire qu'il s'agit d'un film basé sur le concept du complexe d'Œdipe et qui prend la forme d'un "Slasher movie", mais c'est bien plus que cela. Phénix est les bras de sa mère, mais aussi sa chose, son esclave, sa pensée et ses actes, en une sorte d'amalgame trouble dont la perversion dépasse largement les concepts du complexe Œdipien.
Le film est violent, souvent gore. Dans « Santa Sangre », le sacrifice est toujours ritualisé et la violence comme le sexe y sont traités comme des actes d'énergie vitale nécessaires. Mais l'illusion de l'acte, justement, est présente dans chacune des images. Ce n'est pas un hasard si tout a lieu dans le monde du cirque et que Phénix est un magicien.
Magnifiquement filmé et bourré du langage figuré pour lequel Jodorowsky est justement connu, le film n'est jamais moins que visuellement beau. Une richesse artistique que l'on rencontre plus habituellement chez le peintre que chez le cinéaste.
Des références à la pelle
A la vision de "Santa Sangre" on pense tout d'abord à "Psychose" d'Hitchcock pour le propos, mais aussi aux Giallo italiens et à Argento en particulier (notamment pour les jeux de lumière). Mais se ne sont pas les seules références.
Dans ce film on retrouve Federico Fellini, avec son amour pour les personnages grotesques et très particuliers, les cirques et les défilés, et Luis Bunuel, avec son plaisir pour la perversion, la dépravation et le secret, sa conviction que la respectabilité n'est que le déguisement de l'individu.
Les séquences surréalistes rappellent encore Bunuel, mais elles atteignent leur propre identité. Elles sont comme calculées et intellectualisées d'une manière qui est presque l'antithèse de l'approche instinctive de Bunuel. D'ailleurs Jodorowsky a pris six ans pour écrire le film. On retrouve encore des clins d'œils à « Freaks » de Tod Browning ou encore à la BD avec « Mandrake ».
« Santa Sangre » est un extraordinaire film qui emmène le spectateur dans un inoubliable voyage. Un film qui vous emprisonne dès son ouverture et vous secoue pendant deux heures grâce aux excès imaginatifs de Jodo. A l'image de l'âme c'est un film bourré d'antagonismes. Simplicité de l'image face à la complexité du propos. Jodo parsème la pellicule d'images fortes, violentes, dont la poésie tourmentée reste gravée à jamais dans l'esprit du spectateur à l'image de la scène de la mort de l'éléphant, des visions, délires ou hallucinations de Phénix, du rite initiatique du tatouage ou de la scène de castration puis du suicide du père de Phénix.

La conclusion de à propos du Film : Santa Sangre [1989]

Auteur Christophe B.
85

« Santa Sangre » est un véritable retour à l'âge d'or du cinéma, aux jours où les réalisateurs savaient mettre en images leurs visions plutôt que de tenter de timidement reproduire les dernières ficelles de marché grand-public. Faire un film est un privilège trop précieux pour Jodorowsky, pour qu'il veuille en faire quelque-chose de conventionnel. Il orchestre sa mise en scène au-delà des stéréotypes du langage cinématographique et fait de ce film le représentant d'un cinéma contemporain résolument porté par une inspiration poétique. Chacun trouvera la morale qu'il voudra à ce film. Car moi je suis certain d'une seule chose : Seul Jodorowsky à la clé pour décrypter ses films.

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