Critique Spectre [2007]

Avis critique rédigé par Nicolas L. le jeudi 1 mars 2007 à 15h04

Un conte romantique et macabre

Tomas cache un terrible secret, et ce fardeau moral pèse sur sa conscience depuis plus de 40 ans. Aussi, suite à la mort de sa femme, décédée de manière dramatique (un suicide), il décide de retourner sur les lieux où s’est produit cet acte ignoble dont il se sent responsable. Un pèlerinage qui est l’occasion d’en découvrir plus sur ces anciens évènements, à travers une série de flash-back qui apparaissent aux yeux de Tomas sous la forme d’un douloureux album souvenir.
On assiste donc à une double narration de cette histoire - Tomas jouant le rôle de lien entre les deux fils - qui apparaît comme une sorte de transcription ibérique du Fantôme de Milburn, c'est-à-dire beaucoup moins flamboyante et nettement plus intimiste. On accompagne ainsi ce vieil homme sur son chemin de croix, hanté par des hallucinations qui ne sont que la matérialisation des tourments issus de sa mémoire (il se sent responsable de la mort des deux seules femmes qu’il n’ait jamais aimé), on assiste à sa rencontre avec ses anciens camarades (le cartésien et le prédicateur !), et on participe finalement à sa cruelle solitude. La solitude d’un homme maudit.
En sa compagnie, au détour d’un regard sur une vieille photographie ou un miroir, on est entraîné alors dans l’Espagne des années 60, pour y découvrir progressivement la dramatique aventure de Moira, une femme n’ayant pour seule tort que d’être différente de la masse des ouailles du village. Différente, mais si utile quand cette population exagérément dévote faute malgré ses immaculées prétentions. Pour éloigner les enfants, les adultes désignent alors la jeune et attirante femme sous le pseudonyme de Sorcière, mais cela ne fera en fait qu’attiser la curiosité de ces adolescents en crise hormonale. Et tout particulièrement Tomas, un jeune lycéen en quête de sensualité (et non de véritable amour).
S’en suit une histoire d’amour secrète. Une passion minée par les faux-semblants, les à priori, et la jalousie d’un homme-enfant dépassé par les évènements (et doutant de sa propre virilité). Une intrigue amoureuse calmement filmée, avec un grand cérémonial dans sa réalisation, par le cinéaste Matteo Gil. Prenant bien le temps de poser ces effets, ce dernier nous apporte, flashbacks après flashbacks, des pièces supplémentaires afin que l’on puisse construire le puzzle du drame qui s’est déroulé dans cette maison du tertre, il y a 40 ans (on le devine quand même un peu…). Et les derniers éléments, ceux de la révélation, ils nous seront fournis à l’occasion de la visite nocturne de la maison « hantée » d’un Tomas fou de chagrin et qui se décide enfin à affronter ses démons. Sous la forme d’un véritable exorcisme affectif et dans l’achèvement d’une étreinte interrompue il y a tant d’années.
Très sobre, la mise en scène de Matteo Gil s’appuie de belle manière sur le jeu d’acteurs talentueux et notamment une très ambiguë Natalia Millan dans le rôle de Moira. La photographie, qui alterne les séquences très lumineuses (les souvenirs de Tomas) et les scènes nettement plus glauques (la vie actuelle du vieil homme), est d’une étonnante justesse dans ses choix, le réalisateur se permettant même de jouer avec les sentiments des différents personnages (la mère très castratrice se voit attribué un dérangeant éclairage en contre-plongée). On peut cependant regretter quelques inutiles effets gratuits comme la séquence de la salle de bain un peu trop grand guignol et un manque de développement dans la relation entre Tomas et sa mère. Mais cela est bien peu de chose comparé aux qualités qui ressortent de ce téléfilm qui ne doit rien aux grands. Jusqu’à un final très romantique qui mettra en lumière le pacte signé il y a si longtemps entre les deux amants : "je suis ton amour éternel, je suis ta trinité, je suis ton cauchemar, je suis le fil de ton destin, je suis la pelote autour duquel s’enroule ce fil, et je suis le ciseau qui coupera le fil…"

La conclusion de à propos du Téléfilm : Spectre [2007]

Auteur Nicolas L.
70

Un script intelligemment écrit, une photographie de bonne facture, une réalisation mettant en valeur une excellente et très sobre interprétation. Voilà ce qu’est le Spectre. Il est vraiment dommage que la courte durée du métrage n’est pas permis de mettre plus en avant la relation tordue entre Tomas et sa mère et que à la base, le scénario soit si commun qu’il en devienne prévisible. Un bilan cependant largement positif

On a aimé

  • Scénario classique mais bien écrit
  • Réalisation de grande qualité
  • Une Natalia Millan troublante
  • Excellente atmosphère oppressante

On a moins bien aimé

  • Manque de développement
  • Une chute assez prévisible

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