Plongez dans les secrets de Polaris jusqu'au point Nemo
Rencontre avec Philippe Tessier

Polaris est un univers original de science-fiction française qui vous plonge dans un monde futuriste lointain dans lequel l’humanité a dû fuir la surface de la planète. Voici donc plusieurs nations sous les océans, avec leurs tensions géopolitiques et leurs spécificités. Des mutations accompagnent aussi cette nouvelle vie après des dizaines de générations. Dans le roman, Point Nemo, Philippe Tessier présente le monde en introduction mais également en annexes une présentation plus complexe et un glossaire. Même si la compréhension du roman n’est pas difficile, le style de l’auteur étant fluide, c’est agréable de mieux comprendre l’univers de l’histoire lue. Polaris est un univers de science-fiction avec ses propres repères et ses éléments techniques comme notamment des exosquelettes, impressionnantes armures sous-marines.

Dans Point Nemo, nous découvrons une galerie de personnages coincés depuis deux ans dans une station isolée. Ils ont envoyé des secours mais personne n’est jamais venu et ils survivent tant bien que mal. Karl le commandant est accompagné entre autres d’Olympe, une mécano au caractère bien trempée ou encore de Gully une créature bizarre, à la fois mignonne et dérangeante qu’on ne rencontre que dans ce monde sous-marin. Un jour débarque Phébur et sa troupe de pirates qui sous couvert de sourires ne semble pas bien fiable. Ils sont cependant la seule échappatoire de l’équipe de la station Nemo. Mais ils viennent aussi avec des nouvelles choquantes. En deux ans, le monde a totalement changé, l’équilibre fragile entre nations a été rompu.

Palpitant, le roman augure une belle série d’aventures dans cet univers et si vous aimez l’ambiance d’Abyss, vous serez servi ! De la SF qui change avec une ambiance océanique dépaysante.

Pour en savoir plus, nous avons rencontré Philippe Tessier qui dévoile ici la création de Polaris.

Philippe, peux-tu présenter en quelques mots ton parcours et comment es-tu devenu écrivain ?

Brièvement, mon parcours débute par des études de commerce international au début des années quatre-vingt. Un choix assez étrange puisque j’avais depuis des années la furieuse envie d’écrire. Je me rappelle qu’en première, mon professeur de français, Mademoiselle Richetin (à laquelle je suis infiniment reconnaissant, mais que je n’ai jamais réussi à retrouver) m’avait poussé dans cette voie. Malheureusement, je ne parvenais pas encore à concocter quelque chose de satisfaisant et donc à véritablement me lancer. À cette époque, j’ai découvert le jeu de rôles qui a été une sorte d’exutoire à mon envie d’écrire. Peu après j’ai ouvert un commerce de jeux qui m’a permis de rencontrer des gens comme Henri Balczesak (Jeux Descartes) et Guillaume Gille-Naves (Halloween Concept puis Darwin concept et aujourd’hui Origames). Le premier m’a fait travailler en tant que traducteur (pour les gammes Earthdawn, Star Wars et ADD) avant de me confier le projet Shadowrun France. Le second m’a fait faire mes premiers pas dans le milieu avec la relecture de la première édition de Shaan (de notre Igor national), la traduction/adaptation du Guide Tooniversel (pour Toon) avant d’accepter de publier la première édition de Polaris et de me faire participer à Prophecy. C’est aussi l’époque de mes premiers romans. Un essai, tout d’abord, Le cinquième âge, basé sur des légendes amérindiennes puis une série de romans pour les éditions Khom-Heïdon : La cité des âmes (republiée chez Black Book sous le titre : Les anges foudroyés) et les premiers romans situés dans l’univers de Polaris.

Par la suite, grâce à Eric Holweck, j’ai œuvré dans la traduction de jeux vidéo (notamment Baldur's Gate, Arcanum et l'extraordinaire Planescape torment) puis j’ai été journaliste pendant cinq ans dans le domaine du Poker, principalement en tant que traducteur.

Vers la fin des années 2000, je suis revenu vers la traduction de jeux de rôles et Black Book a republié le jeu de rôle Polaris tout en rééditant me premiers romans. BBE a aussi publié le premier tome des Chroniques hérétiques, les loups d’Uriam. Parallèlement, les éditions Oskar ont publié les deux premiers tomes de Sélénie des terres mortes, La ville sans nom et Le Voleur d’Histoire (une intégrale avec le troisième et dernier tome, Le Maréchal, est prévue aux éditions Leha en 2022).

Quelques années plus tard, Didier Guiserix m’a présenté Jean-Philippe Mocci qui était sur le point de créer les éditions Leha. Ce dernier a repris Les Chroniques hérétiques en les publiant en deux tomes (Les loups d’Uriam et Une saison de cendres) avant de publier Morts et de reprendre la série de livres consacrés à l’univers Polaris. Les éditions Leha rééditeront donc Rédemption et l’intégrale des Foudres de l’abîme et de Domination, tout en publiant les nouveaux romans dans cet univers dont Point Nemo est le premier.

Comment est née l'idée du monde sous-marin de Polaris ?

Comme beaucoup de mes histoires, par petites touches, par éléments disparates qui finissent par s’assembler et former un tout à peu près cohérent. J’ai toujours aimé la mer et les histoires de marins (je suis un grand lecteur de Jean Ray !), mais aussi tous les récits qui se passent à bord de sous-marins. À l’époque à laquelle j’ai rencontré Guillaume Gille-Naves, j’avais ma boutique de jeu, l’Arche perdue, et j’avais l’envie à la fois d’écrire des histoires et d’imaginer un univers de jeu. Polaris, à ce moment-là, se limitait à des terres ravagées par des catastrophes diverses sur lesquelles des survivants s’affrontaient en armures de combat pour le contrôle de précieuses ressources qu’ils rapportaient ensuite dans les fonds marins. Les océans n’étaient donc pas au cœur du récit, mais constituaient une sorte de toile de fond.

Lors d’un repas avec Guillaume, je lui ai raconté mon idée et c’est lui qui m’a suggéré d’inverser les choses : de partir de la situation dans les océans et d’utiliser la surface comme toile de fond. De plus, comme les jeux de rôles français avaient le vent en poupe à cette époque, il m’a suggéré d’en faire un jeu de rôle. La machine était lancée…

Polaris était d'abord un jeu de rôle ou un roman ?

C’est difficile à dire. C’était d’abord une idée, un contexte. Mais dès le moment où je me suis lancé dans le développement de cet univers, j’ai en fait développé les deux en même temps. La description de l’univers servait mon récit et mon récit servait la description de l’univers. C’est un exercice qui peut être utile, mais qui peut aussi s’avérer problématique surtout pour des lecteurs ne connaissant pas l’univers du jeu. C’est pour cette raison qu’après les Foudres de l’Abîme, j’ai écrit Rédemption qui est un roman Polarisavec beaucoup moins de personnages et un récit plus simple.

Quand j’ai discuté des prochains romans Polaris avec Jean-Philippe Mocci, nous sommes tombés d’accord sur le fait que pour relancer un cycle dans cet univers il fallait proposer un récit qui puisse s’adresser aussi bien aux fans de la première heure qu’à un public beaucoup plus large ne connaissant pas forcément le jeu ou même les précédents romans. Aussi, si au début Exode (racontant l’exil des humains sous les mers) devait être publié rapidement, j’ai changé mon fusil d’épaule et je me suis attelé à Point Nemo afin de proposer un récit qui se suffit à lui-même et qui puisse « immerger » un nouveau lectorat dans le monde des océans.

Envisages-tu de nouvelles aventures dans ce monde original ?

De nombreuses aventures sont prévues. Au fil des années, j’ai bien entendu affiné ma vision de cet univers et je l’ai en quelque sorte définie du début à la fin. Aussi, je compte écrire un certain nombre de romans se déroulant à différentes époques, un peu à la manière de la Romance de ténébreuse de Marion Zimmer Bradley. Les précédents romans constituent ainsi un cycle classique, Point Nemo inaugure le Cycle Azure, Exode le Cycle Origines, etc.

Pour l’instant Point Nemo recevant un très bon accueil je prévois deux suites à ce cycle qui s’appelleront très certainement Équinoxe et Les citadelles de la flibuste. Les événements importants qui s’y dérouleront me conduiront à écrire l’Élément Oméga (inaugurant ainsi le Cycle Oméga) qui se déroule un siècle plus tard puis Le Livre d’Imaël (Cycle Eden) se déroulant mille ans plus tard. Exode et La guerre du crépuscule (Cycle des Origines) sont également au programme. Bien entendu tous ces cycles ne sont pas fermés et peuvent faire l’objet d’autres aventures en fonction de l’inspiration et des ventes.

Quels sont tes projets futurs ?

Nombreux ! Trop nombreux ! Outre les romans Polaris, plusieurs choses sont en cours de développement dans cet univers sous la houlette de Nicolas Barry (Le petit Spirou, les enfants de Timpelbach, entre autres). Pour le jeu de rôle, je suis en discussion avec BBE pour savoir comment relancer la machine avec un programme solide qui pourrait être développé en parallèle des romans. Cela commencera très certainement par le nouveau et volumineux supplément consacré à l’Hégémonie et presque entièrement réécrit. J’ignore encore dans quelles conditions et dans quel délai tout ça va se faire, mais le but ne sera pas de se limiter à une réédition simple, mais bien de proposer quelque chose de nouveau aussi bien pour le système de jeu que pour les possibilités offertes par cet univers.

J’espère pouvoir en dire plus sur ces différents projets dans les mois qui viennent.

Mais il n’y a pas que Polaris dans la vie ! Aussi j’ai plusieurs romans sur le feu notamment un recueil de nouvelles (avec des histoires très variées dont une ou deux nouvelles se déroulant dans l’univers de Polaris), un récit se déroulant dans l’univers esquissé dans l’anthologie des imaginales 2019 Nature (Qui se souvient des hômlas) et qui devrait s’appeler Le cimetière de la dernière guerre, la suite de Morts et une histoire un peu loufoque, Qui se souvient des héros ?

Merci beaucoup Philippe, au plaisir de replonger dans Polaris !

Notre dossier sur le jeu de rôle Polaris c'est ici !

 

 

Auteur : Nathalie Z.
Publié le lundi 19 juillet 2021 à 08h00

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