C'est quoi ce truc ? Society
Quand tu regardes le film de partouze ultime...

C’est quoi ce truc ? est une petite rubrique apériodique (n’attendez donc pas le prochain article avec impatience) qui met en lumière quelques films méconnus. Nanars, séries B ou chef d’œuvre inconnus, nous vous présentons ici une sélection de longs-métrages sélectionnés avec amour !

ÇA PARLE DE QUOI CE TRUC ?

Le jeune Bill ne se sent pas très bien... Non... Son psy a beau lui expliquer que tout ça, c'est dans sa tête, il se rend bien compte que quelque chose cloche dans les beaux quartiers de Beverly Hills. Enquêtant tant bien que mal, grattant la surface vernis des pavillons bourgeois, il se rend compte que sa soeur et ses parents participent à des orgies complètement démentes qui réunissent tout le gratin de la société... Une voyage de l'autre côté du décor, là où tout est possible, là d'où on ne revient pas indemne...


Avoir la tête dans le cul... littéralement...

MAIS QU'EST CE QUE C'EST QUE CE TRUC ?

Ce truc, c'est Society ! On n'avait jamais vu ça avant, et on n'a plus jamais revu ça après. Il s'agit d'un film unique en son genre, marqué au fer rouge par les visions délirantes de son auteur. Rien ne peut vous préparer à ce que vous propose ce long métrage. Au mieux, les quelques photos qui illustrent cet article peuvent vous donner une tonalité, mais c'est tout. Personne n'attendait un tel film, et le cinéma de genre ne s'est jamais vraiment remis de l'expérience proposée par Society...

MAIS QUI A FAIT CE TRUC ?

Society est sorti de l'esprit de Brian Yuzna. Réalisateur philippin arrivé sur le tard dans le milieu cinématographique (il était dentiste à l'origine, et il avait 40 ans lorsqu'il a réalisé ce film), Yuzna s'est fait connaître en produisant deux des adaptations de Lovecraft les plus côtées : Réanimator et Aux portes de l'au-delà (tout deux réalisés par le regretté Stuart Gordon). Après avoir produit Chérie, j'ai rétreci les gosses (dont il fut question qu'il assure la mise en scène, preuve que la cocaïne devait tourner chez les exécutifs de l'époque), il saute le pas avec SocietyBrian Yuzna n'a jamais réitéré ce premier coup d'éclat, sa carrière allant ensuite en dent de scie, alternant entre séries B sympathoches (Le Retour des morts-vivants 3, Le Dentiste) et gros nanars (Necronomicon, Faust). Son dernier fait d'armes remonte à 2010 avec l'oubliable Deep Water.

L'autre artisan "coupable" de ce long-métrage complètement fou est Screaming Mad George, artisan japonais spécialiste des maquillages et des prothèses. Connu pour avoir participé aux effets spéciaux des Griffes du cauchemar et du Cauchemar de Freddy, il est parvenu à donner corps aux visions délirantes de Brian Yuzna. Sa carrière s'est depuis malheureusement limitée aux films bis de piètre qualité, de Douce nuit sanglante nuit 4 et 5 aux Démons du maïs 3, ce qui est d'autant plus regrettable que les effets spéciaux de Society sont en tout point réussis et, pour la plupart (pas tous mais la grande majorité), ont très bien passé l'épreuve du temps.

Devant la caméra, on retrouve un casting typique des séries B fauchées, principalement composés de comédiens médiocres. Le premier rôle est tenu par Billy Warlock, que l'on retrouvera plus tard dans Alerte à Malibu ou le soap Des jours et des vies. Rien de bien notable donc, même si, au vu du propos du film, il n'est pas exclu que Brian Yuzna ait volontairement casté des comédiens lisses et fades (ce que fera aussi Paul Verhoeven dans son Starship Troopers).

ET ÇA A MARCHÉ CE TRUC ?

Le film a été produit pour deux millions de dollars, et les chiffres au box-office n'ont pas été communiqués. Toutefois, le film n'étant pas sorti en salle dans nombre de pays (dont les États-Unis, où il a connu une sortie timide trois ans plus tard), autant dire que le film n'a pas dû être un carton monumental. Il a cependant considérablement marqué toute la "génération vidéo-club" de cette époque au point de s'imposer quasi-instantanément comme un petit classique du genre.

Au début des années 2010, Time Out London a effectué un sondage auprès de plusieurs auteurs, réalisateurs, acteurs et critiques venant du monde de l'horreur pour établir un classement des meilleurs films d'horreur. Society s'est classée au 95e rang.​ Pas mal !

MAIS C'EST BIEN CE TRUC ?

C'est énorme ! Unique, incomparable, complètement fou, Society est un film incroyablement barré, une explosion de perversion, de fluides et de libido malsaine, une plongée proprement hallucinante dans la débauche et la pornographie. La dernière demi-heure du film est un véritable monument de cinéma bis, un sommet du body horror porté par les idées délirantes de Brian Yuzna. À redécouvrir à froid trente ans plus tard, le film conserve toute sa force et son impact (une qualité que l'on doit notamment à la qualité des effets spéciaux qui restent globalement réussis).

Society n'est cependant pas simplement une démonstration visuelle complètement barge. Il y a un propos dans ce qui est raconté, une manière de critiquer la société lisse et bien pensante des puissants (ici matérialisés par les bourgeois de Beverly Hills). Certes, Brian Yuzna ne fait pas dans la finesse. Il ne cherche jamais être métaphorique, bien au contraire : il fonce comme un bulldozer pour défoncer tout ce qui se trouve à portée. La haute société est ici représentée comme pervertie, incestueuse, sectaire, et l'immense partouze finale n'en est que l'illustration la plus primaire. Oui, Society n'est pas bien subtil, mais il n'en demeure pas moins un vrai film social dans sa représentation des rapports entre classes sociales.

Les deux-tiers du film, qui reprennent une esthétique soap digne des pires représentations télévisuelles de Beverly Hills (dont la série Beverly Hills) sont à la fois complètement raccord avec le propos (on sent que Brian Yuzna a exacerbé cette imagerie pour mieux susciter le choc avec l'acte final), mais s'avère également être l'une des faiblesses du films. Avant d'en arriver à cet incroyable final orgiaque, on doit se farcir une grosse heure fade et insipide, pleine de personnages sans aucun intérêt, et portée par des comédiens très approximatifs (Billy Warlock, dans le rôle principal, est affreusement mauvais). Heureusement, il y a quelques visions fulgurantes, ici et là, qui maintiennent en haleine et permettent d'avoir un délicieux avant-goût de ce qui nous attend après.

Trente ans plus tard, on comprend encore aisément pourquoi Society a marqué celles et ceux qui l'ont découvert sans avoir été prévenus de ce qui les attendait. Aujourd'hui, le film mérite largement d'être redécouvert !

ET ON PEUT LE VOIR OU CE TRUC ?

La plateforme de "screaming" Shadowz est active depuis le mois de mars dernier. Consacrée au cinéma d'horreur, elle contient dans son catalogue ce petit bijou.

En DVD et Blu-Ray, le film a été maintes fois édité. Une excellente édition limitée a été proposée il y a trois ans par The Ecstasy of Film. Si le film ne peut plus être acheté sur le site du distributeur, il se trouve encore ici et là sur certains sites. Il est autrement possible d'acquérir l'édition éditée par Mad Movie a un prix modique.

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Auteur : Vincent L.
Publié le mardi 26 mai 2020 à 14h00

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