Critique Silent Hill 3 [2003]
Avis critique rédigé par Bastien L. le jeudi 28 août 2025 à 09h00
Heather perdue
Critique de la version PS2
Il fut une époque où Konami était capable d'enchaîner les chef-d’œuvre dans de nombreux genres et nous offrir des suites de très très grandes qualités à l'image de Silent Hill 3.
De 1995 à 2005 environ, les joueurs purent se plonger avec bonheur et effrois dans l'âge d'or du survival-horror, principalement japonais, de sa popularisation à son climax avant de se fondre dans l'action, se faire plus discret ou devenir plus indépendant. Le genre n'est pas vraiment mort mais il n'était pas autant sur le devant de la scène que lors de cette décennie bénie. Si on peut évidemment citer la saga Resident Evil qui en est la pièce maîtresse il y en a d'autres comme Project Zero, Forbidden Siren mais surtout Silent Hill qui est souvent présentée comme l'élève ayant dépassé le maître. Après un excellent premier opus en 1999 et l'incontournable/cultissime Silent Hill 2 en 2001, les studios Konami planchèrent sur une diversification de la licence. Un double développement qui se fit ainsi au sein de la Team Silent du studio KCET basé à Tokyo. Une production qui devint plus tard Silent Hill 4 : The Room. Et aussi surprenant que cela puisse paraître, un projet qui fut d'abord pensé comme un rail shooter... Cela s'expliquait par les ventes assez décevantes du second opus avant qu'heureusement la décision de faire une véritable suite fut prise sans avoir fait perdre un temps important à l'équipe. Si le jeu fut dirigé pour la première fois par Kazuhide Nakazawa (ayant eu un poste clef sur Silent Hill 2) qui pu compter sur la présence de membres importants de l'équipe du second opus comme le scénariste Hiroyuki Owaku, le génial directeur artistique Masahiro Ito et surtout le compositeur et sound designer Akira Yamaoka passant producteur sur cette suite. Silent Hill 3 sortit finalement en 2003 sur PS2 puis PC (avant de connaître un remaster HD pas très glorieux sur PS3 et Xbox 360 en 2012) pour devenir une œuvre aujourd'hui considérée comme culte.
Silent Hill 3 commence dans le cauchemar de l'adolescente de 17 ans Heather qui explore un parc d'attraction maudit. La jeune femme se réveille dans un centre commercial alors qu'elle est en train de rentrer chez elle auprès de son père. Elle est rapidement alpaguée par un détective privée, Douglas, apparemment engagé pour retrouver sa trace. En parallèle, le centre commercial semble vide et infestée de créatures belliqueuses. Heather va devoir trouver un moyen de s'en échapper mais la situation empire : elle fait la rencontre de la mystique Claudia qui lui annonce qu'elle est bien plus que qui elle croît être. De plus, le centre commercial plonge dans une version maudite, putride et rouillée de celui qu'elle était en train d'explorer. Une exploration et une progression qui va lui offrir plus de questions que de réponses même quant elle réussit à en sortir. Douglas semble au final plus désolé de son apparition tandis que Heather va devoir se rendre dans la ville de Silent Hill où elle va découvrir qui elle est vraiment...
Sans en révéler trop, même s'il y a prescription je pense, Silent Hill 3 est bien plus une suite de Silent Hill contrairement au second opus. En effet, Heather est intimement liée aux événements du jeu de 1999 avec quelques personnages qui reviennent ou qui sont impactés par ce qu'il s'y est passé. Le titre se passe ainsi 17 ans après mais met du temps à véritablement démarrer. Silent Hill 3 est un jeu incroyable sur de nombreux points mais il ne peut cacher un développement accéléré notamment via un scénario bien trop discret dans sa première moitié se rappelant à nous ensuite. Il faut donc prendre son mal en patience pour enfin que l'identité de Heather se révèle ainsi que son combat qu'elle va devoir mener à Silent Hill. La manière dont l'intrigue se rattache au premier jeu et permet de mieux comprendre l'aspect démoniaque de la ville offre une histoire très plaisante pour les amateurs de la série. D'autant plus que le jeu ose aborder des thèmes encore une fois très forts notamment en lien avec la religion, pour ne pas dire le fanatisme. Le personnage de Claudia démontre la folie dans laquelle peut pousser une croyance où la recherche d'un prétendu paradis idyllique peut justifier toute la violence qu'on pense devoir faire. Un autre personnage, Vincent, montre une image plus manipulatrice voire intéressée de la religion où Heather devient une sorte de pion de par sa nature si particulière. Notre héroïne représente une adolescente plongée dans un monde d'adultes qui ont tant de projet pour elle et qui a du mal à les affronter comme à les accepter. On peut aussi voir dans le parcours de Heather, une sorte de mal qui poursuit les femmes partout où elles se rendent à travers des lieux du quotidien comme un centre commercial, le métro ou un hôpital... D'autant plus que le jeu est rempli de symboles et de paraboles qui peuvent permettre de nombreuses analyses et thématiques abordées faisant sa richesse.
On sent aussi que les créateurs du jeu se sont beaucoup inspirés de la littérature fantastique et du cinéma américain qu'il soit d'horreur ou pas. On pense ainsi aux œuvres de David Lynch ou l'étrangeté comme l'horreur peut être contrebalancé par une certaine ironie ou un certain détachement notamment de la part de Heather qui doit l'héroïne d'un survival horror la plus stoïque qui soit quand bien même elle va souffrir. Le jeu nous offre d'ailleurs de nombreuses cinématiques durant sa seconde moitié qui mettent surtout l'accent sur le peu d'être humains que l'on croise. Et même 20 ans après, on reste impressionné par la qualité des animations faciales des personnages. Dommage que les doubleurs américains soient assez inégaux dans leurs interprétations... Mais si on joue à Silent Hill 3 c'est surtout pour son ambiance fantastique à base de dimension parallèle démoniaque dans laquelle on plonge souvent en plein milieu de l'exploration d'un lieu. L'ensemble devient poisseux, sale, plein de rouille et de sang avec des monstres plus différents et aggressifs. Notre héroïne enchaîne alors les visions d'horreur parfaitement travaillées par Masahiro Ito autant dans la conception des décors que dans la création des montres qui sont des difformités dans lesquelles on devine des forme vaguement humaines. On apprécie ainsi traverser des lieux nouveaux comme un centre commercial, le metro ou des bureaux quelconques comme retrouver l'inévitable hôpital ainsi que le parc d'attraction bien plus grand que dans le premier opus.
Et si le titre fonctionne aussi bien c'est qu'il était très solide d'un point de vue technique et graphique à l'époque. Notamment l'incroyable travail sur les lumières dans un titre très sombre où le halo de la lampe d'Heather trahit une faible trace d'humanité dans un monde d'horreurs sans nom. Les décors sont souvent perturbants avec des textures aussi basiques que parfois indistinctes et quelques passages joueront beaucoup sur un effet de flou très efficace. Les membres de la Team Silent ont peint des toiles de maîtres dans lesquelles on déambule avec une sorte d'attirance macabre qui nous emmène de surprise en surprise. On reste souvent fasciné devant la beauté monstrueuse d'un décor avec des jeux de lumières parfaitement mis en scène. Silent Hill 3 fait peur mais surtout par son ambiance qui provoque beaucoup plus une appréhension sourde que de véritables sursauts. Quelques fois le jeu veut nous surprendre mais il n'en joue jamais. Il est un train fantôme de malaise, de violence et d'étrangeté repoussante sur lequel on monte pourtant avec plaisir. Et quand il embrasse complètement ce statut, cela donne un des moments les plus géniaux du jeu : la maison hanté. Si cela fonctionne aussi bien c'est grâce à un sound design diabolique où bruits indistincts et parfois aussi brefs que hors-sujets accentuent le malaise. Tout cela permet d'aboutir à ce qui fait l'essence de cet âge d'or du survival horror nippon : la peur comme la nécessité de progresser. Pour revenir au travail de Akira Yamaoka, ses compositions fonctionnent toujours autant tout en proposant quelques surprises qu'on se plaît à écouter.
C'est surtout au niveau du gameplay que Silent Hill 3 ne réinvente pas vraiment sa formule. A un point prêt : finies les déambulations angoissantes dans le brouillard de Silent Hill puisque les extérieurs de la ville se résument seulement à deux grosses rues. Néanmoins les différents lieux/niveaux visités sont suffisamment grands et variés pour que la pilule passe sans soucis. Heather est un personnage assez lourd à manier mais qui peut néanmoins se battre et esquiver sans aucun soucis. Il faudra évidemment compter sur les poncifs du genre : l'exploration dangereuse, les allers-retours à base d'objets improbables pour ouvrir des portes ou débloquer des pans entier du niveau et les monstres peu nombreux mais coriaces où il faudra économiser ses soins et ses munitions. L'arsenal de Heather permet de rendre le titre un poil plus action que les précédant puisque les habituels tuyaux, pistolet et fusil sont rejoint par un katana ou une mitraillette notamment. Il y a aussi quelques combats de boss que s'ils sont réussis d'un point de vue artistique, ne sont clairement pas les moments les plus marquant du titre.
Les amateurs du genre de la saga Silent Hill seront ainsi en terrain connu dans ce mélange d'exploration, réflexion avec quelques énigmes et de l'action. On retrouve ainsi le système de cartes que Heather met à jour en temps direct annotant les portes coincés, celles qui s'ouvrent ou les endroits où l'on va devoir faire quelque chose. Chaque pièce ou couloir visité devient un lieu inconnu d'où pourrait sortir un danger. On parcours des niveaux semi-ouverts quand on prend l'immeuble de bureau, le centre commercial ou l’hôpital (et ses inévitables infirmières) dans leur ensemble permettant d'offrir plusieurs approches de progression. Il y a néanmoins des passages où la progression est plus linéaire avec toujours une grande efficacité notamment dans le métro ou la parc d'attraction. Et si Heather peut se déplacer et tirer en même temps (contrairement aux Resident Evil de l'époque), l'action n'est pas la plus grand qualité du titre étant surtout un stress de savoir si on aura le temps d'éliminer l'ennemi ou s'il va falloir opérer une retraite stratégique. Tout en sachant qu'il va vraiment falloir économiser ses munitions. Et comme dans un bon représentant du genre, chaque mort vous renvoi à votre dernière sauvegarde qui sont illimitées. Silent Hill 3 ne révolutionne donc pas le survival horror dans son gameplay mais il en constitue un point d'orgue d'une efficacité redoutable. Enfin, le jeu se veut aussi accessible que difficile avec différents modes de difficulté que ce soit pour l'action ou les énigmes rendant le titre aussi jouable que très recommandable après tout ce temps. Pour ce qui est de sa durée de vie, comptez entre 6 et 8 heures...
On vous le conseille si vous aimez Silent Hill, Silent Hill 2, Resident Evil 3 : Nemesis...
La conclusion de Bastien L. à propos du Jeu Vidéo : Silent Hill 3 [2003]

Silent Hill 3 démontre la réussite insolente de Konami avec cette série depuis le premier opus. Une œuvre horrifique qui aborde le genre avec un très grand sérieux offrant une ambiance poisseuse incomparable, une histoire très satisfaisante, une direction artistique d'une beauté macabre rarement égalée ainsi qu'un gameplay très solide. Les déambulations d'Heather vous marqueront à jamais dans un des plus grands jeux de la PS2.
On a aimé
- Un des plus grands représentants de l'âge d'or du survival horror
- La direction artistique sublimement horrifique
- Les thématiques abordées dans une histoire plaisante à suivre
On a moins bien aimé
- L'histoire poussive dans sa première moitiée
- Un épisode peu innovant
- Les poncifs du genre
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