Critique Graveyard of the Dead [2009]

Avis critique rédigé par Nicolas L. le lundi 10 mars 2014 à 09h59

Vengeance d’outre-tombe

Quelque part en Espagne, durant le moyen-âge... 
Du moins, c’est ce que l’on voudrait nous faire croire. Peine perdue. Les efforts de mise en scène de Vick Campbell, le réalisateur, sont tués dans l’œuf autant par son manque d’incompétence que par les moyens mis à sa disposition. Dés les premières images, nombre d’éléments anachroniques crèvent l’écran, comme ces rampes en métal des plus modernes devant laquelle passe une procession de quatre gars portant de médiocres panoplies de moines soldats (mention spéciale à leurs emblèmes pseudo-ésotériques, rapidement gribouillés à l’encre rouge sur des toges made in China). Marchant d’un pas faussement cérémonial, ces templiers de pacotille suivent un sentier forestier, trébuchant parfois involontairement, leurs sandales (de celles chaussant les touristes qui envahissent nos plages en période estivale) buttant sur un caillou. Oula! Il n’y a pas de doute, sous cette œuvre catalane se posant comme un hommage au cinéma d'Amando de Ossorio se cache une bonne vieille série Z des chaumières.

A détour d’un chemin, sous le regard hésitant d’une caméra grand public, les quatre templiers (apparemment quelque peu désargentés car seul l’un d’entre d’eux possède une arme) interpellent deux figurants en chemises de nuit appuyés à une souche. Probablement des copains du réalisateur. A leurs attitudes empruntées, certainement pas des acteurs. 
- Villageois! Où est la sorcière?» annone le chef des templiers, reconnaissable à son épée et à sa cape noire. On dirait qu’il a la bouche pleine de foin. Assurément, il aurait dû mieux apprendre son texte.
A cette question, le villageois à la coupe parfaite et au visage étonnamment glabre pour le bouseux qu’il est censé être répond, avec assurance: «Qu’est-ce que vous lui voulez?» 
Quoi? Mais quelle effronterie! Quel manque de respect envers les autorités de l’église! Il va devoir payer pour cet affront, le mécréant!
- A genoux, bâtard! ordonne le chef des inquisiteurs. Il se tourne alors vers son confrère «Frappe-le fort! Je veux voir du sang!». Ah, chouette, la réalisation est pourrie mais, au moins, ça va saigner comme dans un splatter alllemand. 

Euh, pas de bol, du sang, il n’y en aura pas des masses. Le bourreau a beau user violemment de son instrument en flanelle, aucune trace de flagellation, et encore moins de sang, ne vient souiller le dos du paysan irrespectueux. Bon, cela ne l’empêche toutefois pas de gueuler comme si on l’écorchait vif, tout comme son pote, qui joue (très mal) le témoin horrifié. Puis, soudain, par la magie du faux raccord, des plaies apparaissent sur le dos de l’outrecuidant paysan, sans pour autant le faire plier. Las, le chef des templiers décide alors d’user de son épée pour lui couper une main en latex. Pourquoi une main? Aucune idée, mais dans tous les cas, la technique marche. Cédant à la douleur, le supplicié avoue. 
- Tout ce que je sais, c’est qu’elle était dans les champs, sanglote le macho manchot. On voit le sang gicler de son poignet mutilé. C’est rigolo. 

Après avoir abrégé les souffrances du paysan et crever sa bedaine comme un s’il s’agissait d’un vulgaire coussin (en fait, il s’agit VRAIMENT d’un coussin!), les inquisiteurs se dirigent vers les champs (le réalisateur, gonflé, nous ressert le même plan de transition où l’on voit les moines marcher sur le sentier forestier). Le plan suivant, par un nouveau raccord moisi, nous les montre surgissant dans un pré où une mignonne coupe de l’herbe aves sa serpette. Le chef du groupe s'avance vers elle.
- Femme, tu es en état d’arrestation pour actes de sorcellerie! 
Sous une volée de malédictions et de molles protestations, les templiers trainent alors la jeune femme dans leur temple. En fait une vieille cave désaffectée, envahie de salpêtre (et maintenant également de sales prêtres). Ils l’accrochent au mur avec des ficelles magiques qui tiennent toutes seules. A ce moment, alors que le métrage s’aventure vers le torture porn et le WIP, on se prend à espérer un traitement un peu plus osé. On va vite déchanter. La femme meurt sous le fouet, en cinq minutes. Déçus, les templiers vont chercher une autre sorcière. Avec celle-ci, ils vont prendre leur temps. Leurs visages déformés par des grimaces sadiques, déchirent un bout de la robe de leur prisonnière, faisant apparaitre un sein, et commencent à la fouetter en champ contre champ. C’est aussi trash qu’un extrait des Ch’tis à Las Vegas. Rien à voir avec la jaquette du DVD, nettement plus aguicheuse. Le fouet, comme précédemment, ne laisse aucune trace sur le corps de la femme. Cela ne l’empêche pas se retrouver barbouillée de sang. Il y en a même sur les murs. Du sang, hein, pas des seins. Par contre, on peut noter que la fille n’a pas les aisselles épilées. On appréciera l’effort de Vick Campbell pour nous plonger dans une ambiance rustique.

Dans le même temps, dehors, les paysans ont décidé d’agir. Armés de fourches et coiffés de chapeaux ridicules, ils se réunissent en une petite armée de cinq figurants recrutés au bar du coin pour se diriger illico vers le repaire des Templiers qui, eux, n’en finissent pas de fouetter la présumée sorcière - Re-plan nichon (le même, bien entendu). Les paysans surgissent alors dans la pièce. Se jetant sur les moines, ils les mettent rapidement hors de combat. Oui, ces Templiers sont vraiment nuls. Il y a même un, le con, qui se jette volontairement sur une fourche. C’est donc sidéré que l’on assiste à l’une des plus pourries chorégraphies d’affrontement jamais tournées, avec des combattants montrant le même degré d’énergie que des aïs sous Tranxène. Enfin, le chef des Templiers, capturé vivant (il n’a même pas réussi à repousser les paysans de son épée) est pendu par le cou et il expire, non sans avoir auparavant jeter sa malédiction: «Vous ne pouvez nous tuer, nous reviendrons pour nous venger!. On y compte bien !

Après cet instructif petit saut dans le passé, qui nous en a beaucoup appris sur les us et coutumes ancestrales de son pays, Vick Campbell (ah, ce bon pseudo qui sent bon le cinéma bis des années 70) revient au présent. Enfin, pas tout à fait puisque le récit se déroule en 1974. Un choix qui nous laisse à penser qu’il va y avoir des hippies, des pattes d’eph, de la marijuana, du cul, de l’alcool... et toujours des aisselles non épilées. On fait d’abord la connaissance de Jorge. A la recherche de sa sœur Miranda, il erre sur la route, en quête du monastère des Templiers (la vieille cave, suivez un peu, quoi!). La seule personne qu’il trouve pour lui indiquer son chemin est un ivrogne sirotant une bouteille vide. Le pochtron baragouine des avertissements et le traite d’inconscient, comme dans un épisode de Scoobidoo. Haussant les épaules, Jorge continue son chemin. Cette scène est donc très importante, que dis-je, primordiale, car elle nous enseigne que le monastère des Templiers, en plus de ressembler à une vieille église vue de l’extérieur (il est évident que ce n’est pas le même lieu qu’entrevu précédemment), est un endroit maudit. Des fois où l’on n’aurait pas compris... 

Jorge arrive au fameux monastère. On assiste alors à cinq bonnes minutes de vide total où un mec se balade autour d’une vieille bâtisse décrépie en gueulant «Mirrrranda! Mirrrranda!" Mirrrranda!! C’est le nom de sa sœur. On la voit d’ailleurs parfois passer dans son dos, style femelle vampire à la Jean Rollin, mais sans les éclairages (car dans ce film, tout est naturel, son direct, lumière de merde...). Dans ces moments, on a envie de gueuler «mais tourne-toi, nom de Dieu! Elle est derrière toi, ta conne de sœur!" Bref, tel Alfred Hitchcock, le cinéaste joue avec nos nerfs. Heureusement, Jorge finit par tomber sur sa frangine. On apprend alors qu’elle a perdu la parole et probablement la boule - apparemment, l’actrice, par la même occasion, a perdu son jeu. Et là, pof, d’un coup, Vick Campbell nous envoie un flashback dans la tronche.

Un flashback qui nous ramène deux jours plus tôt, chez Miranda, pour y développer drame familial à base d’inceste. A partir de ce moment, le métrage va alterner entre deux trames. Il y a celle qui conte les évènements honteux qui se déroulent chez Miranda. Elle est composée de quelques séquences d’attouchements (avec un amusant plan fesses) mais surtout d’une pluie de scènes dialoguées ultra-chiantes qui nous montrent une famille en perpétuelle dispute, et où tout se termine invariablement sur le sofa. L’autre, la trame principale, est consacrée au réveil des Templiers morts-vivants, qui vont s’attaquer à une poignée de teufeurs. C’est évidemment cette deuxième composante qui est la plus amusante. Cela débute par des plans de nuit montrant les zombies sortant de leurs tombes, façon Retour des morts-vivants, montés en alternance avec des prises de vue sur la party, où gesticulent des danseurs rigolards et ventripotents - qui se la pètent terriblement - et leurs copines aux grosses miches. C’est nul mais on commence enfin à sourire. Enfin, la référence au cinéma de De Ossorio est évidente et, aussi surprenant que cela puisse paraitre, le design des Templiers morts-vivants assez réussi. On se demande juste pourquoi ils font des bruits de chaines quand ils déplacent, tels des Caspers espagnols, et qu’elle est la raison qui les poussent à sortir de leurs tombes à ce moment précis, après des siècles de sommeil. Les effets de la musique pourrie diffusée à la fête? Qui sait? «Ou est la Sorcière?» répètent-ils à l’envi, d’une voix de lendemain de cuite. Il devrait plutôt chercher le DJ.

Incroyablement, un mec moche et grassouillet, dansant comme un éléphant de mer sous psychotropes, arrive à pécho. Il s’éloigne donc avec sa conquête pour partager quelques moments d’intimité. Les Templiers morts-vivants, évidemment, n’attendaient que ça. Ce n’est pas parce qu’ils recherchent la Sorcière qu’ils n’ont pas le droit de s’amuser un peu. Cependant, avant de s’attaquer à ce plat de résistance, ils s’ouvrent l’appétit avec un type assis dans forêt, comme ça, sans raison, et une fille isolée qui devait probablement chercher un coin pour pisser. Le premier sera massacré par les Templiers à travers des effets gore très rudimentaires- le mec fait semblant d’avoir la jambe coupée à hauteur du genou, mais on voit très bien qu’il l’a simplement repliée derrière ses fesses ; la deuxième fera semblant de succomber à des coups d’épée qui ne l’atteignent même pas. Le festival de maquillages pourris (une main coupée, une éventration, une décapitation) perdure jusqu’à l’extermination des teufeurs, mollement assassinés par des Templiers qui, malgré leur lenteur, arrivent toujours à coincer ces crétins de jeunes qui, quand ils semblent pouvoir s’échapper, trouvent moyen de se tordre la cheville.

Comme l’on peut s’en douter, les Templiers morts-vivants vont poursuivre leurs proies jusque dans la demeure de Miranda. Les deux trames finissent donc par se recouper, pour un final que l’on espère bien sanglant. L’on est en partie récompensé de notre obstination de cinéphage acharné quand Campbell rend hommage à George A. Romero avec l’écartèlement de l’ultime teufeur. Enfin, un plan gore amusant ou l’on voit une victime coupée en deux à la taille mais continuant à hurler. C’est super mal foutu, mais il y a un semblant de craspec. Et c’est à ce moment, alors que l’on commençait à trouver le spectacle amusant, que le réalisateur-producteur-scénariste de cette bouse pelliculée a dû réaliser qu’il n’avait aucune idée de la manière dont il pouvait boucler son film. J’imagine bien Vick Campbell discuter avec ses potes : « 110 minutes, c’est amplement suffisant comme spectacle, mais comment le monde va-t-il pouvoir se débarrasser de ces monstres poussiéreux ? Allez, faut faire fissa, car ça va être l’heure des tapas et on ne rigole pas avec ça. Bon, on va faire au plus simple. On dit que le soleil se lève et surprend les Templiers morts-vivants en train d’essayer de choper une prisonnière qui a réussi à fuir le monastère. Du coup, les zombies s’écroulent comme des merdes. The End. Pour moi, cela sera une margarita ! »

La conclusion de à propos du Film (Direct to Vidéo) : Graveyard of the Dead [2009]

Auteur Nicolas L.
10

El retorno de los templarios est une sacrée bouse. Un film Z qui se pose comme un hommage aux œuvres macabres d’Amando de Ossorio mais qui, au final, n’arrive même pas à nous divertir par sa nullité. Comparer ce film amateur réalisé sans aucun talent aux oeuvres, certes imparfaites, mais oh combien géniales, composant la quadrilogie des Templiers, est faire insulte à leur créateur. Pour être intéressante, une série Z faisant dans l’horreur se doit d’être excessive, subversive ou burlesque. Ce n’est nullement une question de moyens, mais d’inspiration et d’envie. Vick Campbell n’a rien de tout ça.

On a aimé

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On a moins bien aimé

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