NIFFF 2013 : Compétition Internationale
Mise à jour 13 juillet : critique de tous les films de la compétition

Vendredi dernier, le Festival International du Film Fantastique de Neuchatel a ouvert ses portes avec Stoker de Park Chan-Wook, donnant le coup d'envoi de dix jours de festivités. Entre Compétition Internationale, New Cinéma From Asia, Ultra-movie, Films of the third kind, Courts-métrages, masterclass et rétrospectives diverses, ce sont près de quatre-vingt dix longs-métrages qui vont rythmer le séjour des festivaliers.

Avec trente degrés à l'ombre, le lac, les montagnes et le cadre enchanteur de la ville, avouons qu'il est dur d'aller s'enfermer dans une salle de cinéma (d'autant qu'il est agréable de voir dans le ciel cette grosse boule de feu dont on a presque oublié le nom). Le programme se doit donc d'être à la hauteur pour attirer et retenir les spectateurs !

Petit bilan des films en compétition internationale.

 

Classement du staff :

1/Dark Touch (8/10)
2/Ghost Graduation (7,5/10)
3/You're Next (7,5/10)
4/Chimères (7/10)
5/Haunter (6,3/10)
6/We are what we are (4,8/10)
7/Mars et Avril (4,5/10)
8/Raze (4,5/10)
9/Kiss of the Damned (4,5/10)
10/The Dyatlov Pass Incident (4,3/10)
11/Contracted (3,5/10)
12/Here Comes the Devil (3,5/10)
13/The crack (3,3/10)
14/Der Ausflug (1,7/10)

 

Chimères
d'Olivier Beguin

Livia, originaire de Romanie, décide de faire connaître son pays d'origine à  son compagnon Alexandre. Commençant dans le cadre d'une virée particulièrement romantique, après une soirée bien arosé, le jeune homme va être renversé par une voiture.  Hospitalisé dans un état assez critique, Alexandre va devoir subir une transfusion sanguine. A peine sorti d'hopital, Alexandre ne se sent pas très bien et commence à penser que son corps subit une mutation. Voyant Alexandre rentrer dans un état de plus en plus schizophrénique, Livia ne sait plus trop comment agir, pour autant elle entreprend de tout mettre en oeuvre pour ne pas perdre l'homme dont elle est complètement éprise.

Après avoir dirigé plusieurs couts métrages, Olivier Beguin décide de passer à l'étape supérieure et signer son premier long métrage. Le film de genre en Suisse, tout comme en France, n'étant pas toujours apprécié par ceux capables d'amener les fonts nécessaires à ce type de cinéma, le jeune réalisateur a utilisé une partie de ses propres ressources pour donner vie à une histoire qu'il a coécrite avec Colin Vettier. Vu ainsi, il est vrai qu'on peu toujours craindre un résultat fauché, reste que c'est aussi dans ces moments-là que naissent les plus belles aventures, ou réalisateur ainsi qu'équipe technique mettent tout en oeuvre pour livrer le meilleur film possible. Et à la vue du résultat sur grand écran, on peut qu'être réellement impressionné : multiples lieux de tournages, paysages particulièrement enchanteurs, le tout accompagné par un travail sur la lumière et l'image souvent de premier ordre. Tout juste pourra-t-on trouver par moment quelques séquences intérieures – souvent situé dans le cadre d'une cuisine - mises en image de manière un peu plus plan-plan.

Scénaristiquement, Olivier Beguin et Colin Vettier ne cherchent pas le scénario malin, mais se contente d'une histoire humble, humaine, ou le but ici est avant tout de livrer une fable vampirique aussi macabre que poétique. Le but est donc de créer un lien avec le public vis-à-vis des deux protagonistes, et ça fonctionne. De même qu'il est amusant de voir que Chimères s'amuse beaucoup avec la mythologie des suceurs de sang, et aime à en réinterpréter quelques codes. Par moment l'ombre de La Mouche de David Cronenberg ou de Thirst, ceci est mon sang Thirst de de Park Chan-Wook n'est jamais loin, mais le film à pour autant sa propre identité. Les deux scénaristes n'oublient pas de satisfaire les amateurs de sang et les séquences-chocs ne manquent donc pas.

D'ailleurs, pour l'anecdote on se réjouira de voir que David Scherer fait toujours preuve de générosité lorsqu'il est question de faire couler du sang, et on affectionnera la participation aux effets visuels de Hugues Martin (réalisateur de Djinns). Puisqu'on est arrivé à citer quelques noms, on signalera et s'amusera du cameo de Ruggero Deodato (déjà présent sur le court-métrage Dead Bones) comme on appréciera la présence de Catriona MacColl en troisième rôle (qui avait elle aussi déjà collaboré avec le réalisateur sur Employé du mois).

Sinon, pour ce qui concerne le casting principal, on a un faible pour la justesse d'interprétation de la comédienne Jasna Kohoutova, apparaissant particulièrement touchante, notamment dans la deuxième partie du film où l'actrice se met à déborder d'énergie, communiquant au passage celle-ci au spectateur. On est cependant un peu moins emballé par Yannick Rosset, qui parvient à transmettre parfaitement les sentiments de son personnage par son langage corporel, mais n'est pas toujours très juste lors de ses phases de dialogues.

En terme de réalisation pure, on peut apprécier la mise en place établie autour des jeux de miroirs, soit via le cadre de l'objet lui-même, soit via les différents autoportraits photographiques qui apparaitront, soit par certains comportements amenant une psychologie assez narcissique autour du personnage d'Alexandre, et en parallèle de l'artiste en général.

Chimères s'inscrit donc comme l'une des belles surprises et réussites de la compétition internationale, et pourrait potentiellement ne pas repartir les mains vides. Au passage, Olivier Beguin prouve que rien n'est impossible, et qu'aidé pas des gens de talents, même avec un budget ultra modeste, on peut aboutir à un résultat digne de ce nom. Pari donc réussit et on espère, au vu de sa qualité, voir le film se frayer un chemin vers nos salles. (Richard B.)

Moyenne staff : 7/10
Richard B. : 7,5/10
Vincent L. : 6,5/10

 

 

Contracted
d'Eric England


Après avoir couché avec un homme dont elle ne sait rien, Samatha attrape une MST inconnue et fulgurante. C'est le début d'une lente décrépitude...

Contracted, c'est l'histoire d'un échec qui prend petit à petit forme sous les yeux des spectateurs. En effet, le point de départ du film est efficace, la réalisation ne cède pas au voyeurisme et propose quelque chose d'un minimum classieux, et les transformations physiques, bien craspecs, montrent avec efficacité la déchéance physique et mentale de l'héroïne (l'ombre de David Cronenberg est omniprésente).

Seulement voilà, il aurait fallu qu'Eric England ne s'appuie pas tant sur ses atouts formels que sur un scénario bien construit, notamment dans la construction de ses divers personnages. Et c'est malheureusement à ce niveau que le film se vautre en beauté. En faisant de son héroïne une grosse Gourde (oui, avec une majuscule), agissant de manière aussi incohérente qu'incompréhensible, il ne parvient jamais à susciter la moindre empathie du public vis à vis de son personnage principal et du calvaire enduré.

Ainsi, la terrible transformation physique de Samantha n'est, d'un point de vue psychologique, jamais crédible, et ce notamment parce que le personnage n'est jamais clairement posé, et que ses relations avec les autres protagonistes (notamment sa mère) sont floues et trop rapidement expédiées (on sent bien une timide thématique autour du tabou, mais elle est trop survolée pour être convaincante). A un moment donné, la décrépitude physique est telle qu'il est inconcevable pour le spectateur que l'héroïne ne se rende pas dans un hôpital...

Du coup, petit à petit, on finit par se désintéresser complètement de ce qui peut lui arriver, rendant la partie dramatique du film (pourtant centrale) complètement inefficiente. On se console donc avec un aspect technique très réussi, ainsi que quelques très bonnes idées disséminées ici et là. On ressort de Contracted avec l'impression d'être passé à côté d'un vrai bon film, pour n'avoir au final qu'un résultat tout juste passable. (Vincent L.)

Moyenne staff : 3,5/10
Richard B. : 3,5/10
Vincent L. : 3,5/10

 

 

Dark Touch
de Marina de Van

Seule rescapée du massacre de sa famille, causé par leur maison qui s'est mise à vivre et a lancé son contenu sur ses occupants, Neve, 11 ans, est recueillie par des amis de ses parents. Mais les évènements étranges ne s'arrêtent pas pour autant.

Dark Touch est un film vraiment dérangeant, de par sa thématique principale bien sur (l'inceste et la maltraitance des enfants), mais également dans la parfaite justesse de son traitement. Ainsi, le nouveau film de Marina de Van n'est pas glauque juste pour être glauque, ne cherche jamais le malsain par simple complaisance. Bien à l'opposé, Dark Touch possède un fond, et c'est ce fond qui le rend si dérangeant, et par extension si réussi.

L'argument paranormal sur lequel s'appuie le film ne manque pas de faire penser à Carrie au bal du diable (entres autres, mais surtout), notamment en ce que la partie strictement fantastique n'est là que pour construire et solidifier le récit, et ainsi lui donner une ampleur et une profondeur qui n'aurait pas été possible avec un simple récit dramatique. Ici, le surnaturel vient renforcer l'intelligence du propos, ainsi que toutes les thématiques sur lesquelles le film s'appuie. Dark Touch est un long métrage qui fait réfléchir, et, surtout, ne caresse pas le spectateur dans le sens du poil.

En faisant d'un enfant son personnage principal, Marina de Van prenait en effet de gros risques. Au final, elle s'en sort avec les honneurs, ne déviant jamais de sa ligne directrice. La jeune héroïne n'est ainsi pas affublée d'une psychologie et d'une morale d'adulte : elle raisonne et agit comme un enfant. En tenant son propos jusqu'au bout, elle crée une cohérence (là aussi) dérangeante, car en dehors des canons habituels auquel le cinéma peut nous habituer.

Dans Dark Touch, Marina de Van expose ainsi des faits, met les spectateurs face à nombre d'atrocités (certes suggérées, mais malgré tout très difficiles) qui vont l'amener à interpréter chaque acte, chaque geste et chaque parole, à chercher le malaise et le sous-entendu là où il n'est pas forcément. Le film ne va enfin jamais juger et se montrer explicatif, il se contente de poser une situation et laisse le spectateur avec ses doutes, ses réflexions et son malaise. Cela ne rend clairement pas la vision du film agréable. On en ressort dérangé, mal à l'aise, comme si l'on nous avait forcé à regarder un aspect de la nature humaine que l'on aurait préféré continuer à ignorer. Rien qu'en cela, Dark Touch est une grande réussite. (Vincent L.)

Moyenne staff : 8/10
Richard B. : 7,5/10
Vincent L. : 8,5/10

 

 

Der Ausflug
de Mathieu Seiler


Natalie et Maxim quittent Berlin avec Flore, leur petite fille, et Stella, la soeur de Natalie, pour une expédition dans les bois de Brandebourg. Durant le trajet et entre deux disputes, Flore demande à faire une pause pipi. La jeune fille profite d'ailleurs de ce même arrêt pour cueillir quelques fraises des bois et en offrir presque à tout le monde. Arrivé à destination et suite à la nouvelle mise en tension tout ce petit monde opte pour une petite sieste. À leur réveil, Nathalie, Flore et Stella sont séparées dans divers lieux de la forêt avec de fortes égratignures et quand elles finissent par se retrouver, constatent que Maxim a bel et bien disparu.

Lorsqu'arrive un premier long-métrage, de plus lorsqu'il est doté d'un budget modeste, on sait que le film sera rarement parfait, mais qu'en contre-partie il aura cette énergie qui, par la suite, aura tendance à disparaître chez les cinéastes. Parfois, on a même de très belles surprises en la matière, et des budgets modestes peuvent surpasser des films aux moyens plus considérables. En allant à la découverte d'un film comme Der Ausflug on n'attendait donc pas un film, parfait, mais un film ingénieux, généreux armé de personnages à minima solides. On aurait voulu ne pas être méchant, mais à la vue du résultat, le constat est pourtant sans appel : Der Ausflug est le plus bas niveau de cette sélection internationale, mais également un film réellement très mauvais.

Dès le début ça commence plutôt mal, avec son générique façon James Bond du pauvre ou série télévisée des années soixante (on vous laisse le choix), mais on pourrait penser, vu la photographie du film (délavée et télévisuelle), que cela s'inscrit dans les intentions. Hors il en est rien, au fur et à mesure que défilent les quantre-vingt dix minutes de Der Ausflug (qui semble en durer le double), le film accumule les mauvaises idées : esthétique et ambiance très années soixante, mais personnages équipés de téléphones cellulaire et quelques autres attirails modernes, protagonistes crétins, final prévisible, soulignement de chaque détail, dialogues balourds, sans compter le très mauvais jeu des acteurs (magré la barrière de la langue, ça se voit). Rien ne semble fonctionner dans Der Ausflug, tout juste trouvera ton à rire du ridicule de certaine situation, tel le moment où les trois héroïnes se cachent derrière des arbres encore plus fins qu'elle pour éviter de croiser le chemin de trois chasseurs ivres (évidemment !), l'un d'eux se balladant même avec un pendule qui lui indique le chemin de ses proies. En gros le meilleur passage interviendra lorsque le générique de fin arrive, mettant fin à notre calvaire et nous permettant de sortir de la salle. (Richard B.)

Moyenne staff : 1,7/10
Richard B. : 2/10
Vincent L. : 1,5/10

 

 

Ghost Graduation
de Javier Ruiz Caldera


Modesto voit les morts ! Un sixième sens qui lui bousille tout simplement son quotidien de prof. Déjà viré de sept écoles différentes pour avoir trop bavardé avec le néant, Modesto débarque dans un nouvel établissement qui s’avère être - une fois de plus - hanté.

Au premier abord, Ghost Graduation (Promocion Fantasma) n'était pas l'un des films dont nous attendions grand-chose. Le premier film de Javier Ruiz Caldera, Spanish Movie, bien qu'ayant eu un grand succès en Espagne, était loin d'avoir attiré notre attention. Mais voilà, entre les deux films les noms des scénaristes ne sont plus les mêmes. Spanish Movie était écrit par Paco Cabezas et Eneko Lizarraga, alors qu'ici nous trouvons (toujours un duo) Cristóbal Garrido et Adolfo Valor. L'air de rien cela va jouer beaucoup sur le résultat qualificatif du film. Cristóbal Garrido et Adolfo Valor, peut-être par nostalgie, conçoivent une histoire qui semble toute droite issue du regretté John Hugues, plus particulièrement de ses débuts. L'ombre de The Breakfast Club n'est jamais loin et elle s'additionne ici, à celle de SOS Fantômes, autre film des années 80, mais écrit cette fois par Dan Aykroyd et Harold Ramis. Le résultat est juste grandiose, les répliques font mouches perpétuellement, les personnages sont remarquablement construit et placés là où il faut, l'humour joue sur divers registres, l'émotion et la nostalgie ne sont pas oubliées au détriment d'autres éléments, enfin les rebondissements semblent toujours arriver aux bons moments. Il est vraiment très difficile de faire fine bouche devant une écriture que l'on pourrait presque qualifier de subtile, cela même si certains gags peuvent paraître complètement démesurés.

La réalisation n'est pas en reste, Javier Ruiz Caldera, certainement tombé amoureux du scénario, donne l'impression de donner le meilleur de lui-même, il se dégage une énergie, voire une folie, qui devient quasi communicative avec le spectateur. Par exemple, comment rester indifférent à une séquence bibliothécaire, reprenant quasiment l'efficacité de l'introduction de SOS Fantômes, pour ensuite, revoir une situation assez proche, mais sous l'angle des fantômes. De même qu'il paraît impossible de ne pas avoir en tête à l'issue du film la musique "Total Eclipse of the Heart" de Bonnie Tyler ici magnifiée et incrustée avec grande intelligence dans le film. Javier Ruiz trouve une inspiration à travers le passé (du moins celui des années 80), mais tout en n’oubliant pas d'y conférer une personnalité au demeurant bien hispanique donnant au film une identité propre.

À travers ce film, on remarquera que le réalisateur semble vouloir se créer une « famille du cinéma » puisqu'il retrouve ici quelques noms associés à son précédent film comme Alexandra Jiménez, Carlos Areces (décidément très côté ces derniers temps en Espagne) ou encore Sílvia Abril. Les petits nouveaux semblent n'avoir pas pour autant été intimidé et semble avoir bien pris leur marque à l'instar de Raúl Arévalo (qui pour l'anecdote faisait une apparition dans Balada Triste de Trompeta où jouait aussi Carlos Areces) représentant parfait du monsieur tout le monde, légèrement intimidé par les femmes, un poil gaffeur, mais cachant une énergie et une persévérance qui finira bien entendu par se dévoiler.

Reste donc plus qu'espérer voir arriver en France – et si possible en salles – cette pépite du bien-être, et que la foule se précipite pour encourager des films tels que celui-ci qui respectent le spectateur en offrant une histoire et une mise en scène dignes de ce nom. (Richard B.)

Moyenne staff : 7,5/10
Richard B. : 8,5/10
Vincent L. : 6,5/10

 

 

Here Comes the Devil
de Adrián Bogliano


Une famille en crise part se ressourcer en montagne. Très vite, l’angoisse et la peur s’installent, les deux enfants disparaissant soudainement avant de réapparaître le lendemain, métamorphosés...

POUR : Here Comes the Devil s'amorce avec des atouts "charmes" puisqu'il est offert au spectateur de contempler deux ravissantes lesbiennes en plein exercice sportif. Peu après, l'une est agressée par un intrus plutôt du genre costaud, avant que l'autre tente de se porter à son secours en donnant un méchant coup sur la tête à ce dernier. Bien amoché, il s'enfuit. La suite n'a de prime abord aucun lien, puisqu'il nous est amené à découvrir une famille partie se ressourcer dans les collines rocheuses. Mais voilà, alors que les parents batifolent dans la voiture, les enfants partis jouer dans la nature ne reviennent pas à l'heure prévue.

Dès cet instant, Here Comes the Devil nous balade sur divers événements inattendus et difficilement divulgables à travers un scénario très habile, même s’il aurait peut-être été plus intéressant que le réalisateur termine son film à un moment clé, ainsi, il aurait ainsi pu nous amener vers une fin moins explicite (plus frustrante aussi ?), même si l'actuelle reste bien marquante.

Le réalisateur confère à son long-métrage une ambiance aussi mystique qu'effrayante aux multiples thématiques souvent dérangeantes (tel l'inceste, le viol, la vengeance, les relations de couple). Laura Caro se distingue par une prestation assez complexe, partant d'une femme de prime abord plutôt effacée (presque soumise à son mari) qui va pourtant se montrer bien plus intelligente et forte que ce qu'on aurait pu croire au départ. (Richard B.)


CONTRE : Bogliano et moi, c'est une grande histoire de non-cinéma. Avant lui, je pensais savoir ce qu'était un mauvais film. Comme j'étais naïf à l'époque... Un jour, c'était à l'édition 2008 du BIFFF, en séance de minuit (je m'en souviens comme si c'était hier), j'ai vu son deuxième film, I'll Never Die Alone. Et là, ce sont plusieurs années de cinéphilie qui se sont écroulées. Non, je ne savais pas vraiment ce qu'était un mauvais film, et aujourd'hui encore, je pense sincèrement qu'on ne peut pas le savoir sans avoir vu ce film, cette sorte de viol visuel et auditif de quatre-vingt dix minutes non-stop.

Je m'étais donc juré que jamais, au grand jamais, je ne retournerai voir un machin de Bogliano. J'ai même été jusqu'à allumer des cierges dans des églises, envoyer des offrandes à Raél et sacrifier de petits animaux aux Grands Anciens pour que jamais, au grand jamais, on ne le laisse plus toucher une caméra. Certaines choses ne doivent pas être vues par le commun des mortels... Mais voilà, pris par l'engouement du NIFFF, bien décidé à aller voir les films de la compétition internationale, j'ai pris ma place sans me renseigner...

Evidemment, mon collègue Richard se sera bien gardé de me donner cette information. C'est d'ailleurs un ami chroniqueur belge de chez un autre site très bien qui me l'a révélé quelques minutes avant la projection, me précisant quand même que c'était un cran au dessus d'I'll Never Die Alone (ce qui n'est pas étonnant, je vois mal comment on peut faire pire). Après avoir ravalé mon vomi, je me suis donc rendu à la projection.

Au final, c'est vrai que c'est un cran au dessus d'I'll Never Die Alone. Bogliano a cette fois en main un budget plus conséquent, ce qui lui permet de faire quelque chose qui, visuellement, ressemble à peu près à un film (entendez par là : il y a un montage et des champs/contre-champs). Au niveau sonore, par contre, il doit encore se dire qu'un ingénieur-son, c'est très surfait, car le film est une punition auditive de chaque instant. Le budget lui a également permis de se payer quelques acteurs, certes très moyens, mais le personnage principal est malgré tout bien campé par Laura Caro, convaincante dans un rôle qui ne l'est pas du tout.

Sur le fond, par contre, ça reste du Bogliano, aussi détestable que pouvez l'être I'll Never Die Alone. Visiblement, mes suppliques n'ont pas été entendues, il va falloir que j'envoie plus d'argent à Raél... Le film se veut donc dérangeant, Bogliano cherchant à choquer à tout prix. Mais pour choquer, pour déranger, il faut que ça ait un sens, qu'il y ait du fond. Dans Here Come The Devil, ce n'est jamais le cas.

Prenons la séquence d'ouverture : une scène de cul lesbienne. Cela permet à Bogliano de montrer deux actrices nues en plein acte sexuel. Mais pensez-vous que ça a une importance dans la suite du scénario ? Pas du tout. Ca n'a même absolument rien à voir avec le reste de l'histoire. C'est juste gratuit et voyeuriste. Et tout le film est de cet accabit. Ici, ce n'est même plus du "plan nichon gratuit", c'est le dégré au dessus, la moindre occasion de dévêtir les actrices est saisie, qui plus est en le teintant d'un semblant de glauque et de dérangeant (on est presque surpris de ne pas voir la petite fille se faire sauter à l'écran).

Here Come The Devil ne raconte rien, est esthétiquement très moche (certaines compositions de plan sont d'une laideur esthétique incroyable), est auditivement atroce. Reste un aspect technique juste normal (ce qui, quand on a vu I'll Never Die Alone, est appréciable) et des actrices nues qui se font tringler à la moindre occasion. Chouette... (Vincent L.)

Moyenne staff : 3,5/10
Richard B. : 5,5/10
Vincent L. : 1,5/10

 

Haunter
de Vincenzo Natali


Lisa, un esprit piégé dans une grande maison depuis la mort de sa famille en 1986 dans de ‘sinistres circonstances’, décide de posséder et de hanter Olivia, une jeune fille qui vient d’emménager dans la propriété, afin de lui éviter la même fin macabre.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que Vincenzo Natali n'est pas un réalisateur très pressé. Depuis son premier long-métrage, le cultissime Cube, il n'aura tourné que quatre films en quatorze ans. Prenant le temps de bien faire, il s'est construit au fil des années une filmographie intéressante. Ainsi, si tous ses longs-métrages ne sont pas parfaitement réussis, Natali s'est petit à petit imposé comme un cinéaste intelligent et intéressant, dans la réussite (Cube, Cypher) comme dans l'échec (Nothing, Splice).

Haunter, son cinquième long-métrage, appartient malheureusement à la deuxième catégorie. Relecture maline des codes traditionnel du film de fantômes, le film s'avère au final aussi intelligent que pas abouti. Ainsi, le scénario de Brian King propose une variation astucieuse du mythe, écrit à la façon d'un film puzzle. Le script part dans tous les sens, multiplie les pistes, manque à plusieurs reprise de se prendre les pieds dans le tapis, mais réussi au final à retomber sur ses pieds pour proposer une histoire cohérente, plutôt bien construite et, somme toute, assez originale.

Si la mise en scène de Natali exploite correctement toutes les originalités du scénario, elle ne réussi cependant pas à palier aux quelques défauts du scripts (un gros ventre mou au milieu du film), et, beaucoup plus embêtant, ne parvient jamais à faire peur. Plutôt que de s'appuyer sur l'ambiance et de faire naître la peur par des décalages subtils, il tombe dans le piège du jump scare et de l'effet de style facile. Au final, on sort donc sur une impression mitigée. Comme souvent chez Vincenzo Natali, le résultat est intelligent et très honnête (le réalisateur ne prend pas son public pour des crétins, ce qui est très agréable !), mais il manque le petit quelque-chose qui aurait réussi à transcender le tout, en l'occurence une mise en scène plus en phase avec son sujet.

Reste qu'Abigail Breslin porte bien le film sur ses épaule, et que Stephen McHattie nous offre un Pale Man absolument délicieux, ce qui, au final, rend Haunter sympathique, à défaut d'être transcendant. (Vincent L.)

Bientôt en France chez Wild Side.

Moyenne staff : 6,3/10
Richard B. : 6,5/10
Vincent L. : 6/10

 

 

Kiss of the Damned
de Xan Cassavetes


Deux ravissantes sœurs vampires vivent séparément dans une immense maison d'été dans le Connecticut. L'une d'elles a une liaison avec un scénariste qui souhaite la rejoindre dans l'immortalité. Cependant, l'autre sœur débarque dans leur existence et chamboule tout. Sa présence maléfique va anéantir peu à peu leur couple.

Fille du célèbre Nick Cassavetes, Xan Cassavetes fait ses premières armes de réalisatrice avec ce long-métrage cherchant à revisiter le mythe du vampire. Les suceurs de sang sont ici très proche de la vision d'Anne Rice, mais tout en conservant quelques traits d'humanités supplémentaires : il peuvent manger, boire, avoir des relations sexuelles (très important pour le quota cul !). Ils ne se nourrissent pas de sang humain non plus, cherchant à être "végétariens" eux aussi (l'héritage de la famille Cullen ?). Ils parlent, vont à des diners mondains, sont socialement organisés et aiment l'art sous toutes ses formes.

Le résultat final est extrêmement moyen, à la iimite du très mauvais. Si ce n'était quelques fulgurances éparses ici et là, Kiss of the Damned n'aurait absolument aucun intérêt. On ne parlera ainsi pas de "relecture" du mythe du vampire, mais plutôt d'assemblages d'éléments déjà vus ici et là, mixés et retranscrit sous une forme très prétentieuse, interprétés par des acteurs dont les prestations vont du mauvais (Joséphine de La Baume) au très moyen (Roxane Mesquida) en passant par le fade et transparent (Milo Ventimiglia)

Kiss of the Damned se pare de plus d'une mise en scène sur-esthétisante qui, si elle est incontestablement jolie, n'apporte strictement rien au film. De l'esthétisme juste pour de l'esthétisme, voici qui pourrait bien résumer le film. A moins, bien sur, qu'il ne s'agisse que de masquer volontairement la vacuité du propos.

Scénario prétentieux convenu, réalisation inutilement esthétisante, voilà un cocktail propre à rendre un film insupportable. Insupportable, Kiss of the Damned l'est très souvent, mais, ici et là, Xan Cassavetes réussi son coup et nous propose un passage intéressant, bien écrit et fichu. Des petites touches, ici et là, parfois quelques images, parfois quelques scènes entières, qui parsèment le film et redonnent un peu d'intérêt à l'entreprise. Suffisamment pour sauver le film de l'échec total, mais pas assez pour le rendre vraiment réussi. (Vincent L.)

Richard B. : 5/10
Vincent L. : 3,5/10

 

 

Mars et Avril
de Martin Villeneuve

Une incroyable histoire d’amour qui se passe dans un Québec futuriste ! Jacob Obus - musicien talentueux galvanise les foules avec ses instruments baroques, tous modelés à partir de corps de femmes. Arthur, fidèle concepteur pour le musicien, tombe alors sur Avril,une jeune photographe, à qui il souhaite redonner un second souffle en faisant d’elle l’instrument ultime.Mais, lorsque Jacob Obus rencontrera son modèle, lui aussi sera séduit par belle...

Mars et Avril est pour le coup vraiment un projet cinématographique atypique puisqu’issu d'un roman-photo écrit et dirigé déjà à l'époque par Martin Villeneuve qui conserve à cette occasion une distribution quasi commune entre les deux médias. Le film raconte l'histoire d'un trio amoureux (bah oui encore une fois !) dans un Québec futuriste (ça par contre c'est bien moins habituel !). D'un côté, nous avons Jacob Obus, vieux musicien charismatique dont toutes les jouvencelles aimeraient bien mettre le grappin dessus – un Johnny Halliday puissance 10 ? - de l'autre, nous avons Arthur, fidèle concepteur des divers instruments de l'artiste. En face il y a la merveilleuse Avril, femme fatale, pleine de vie, à l'approche directe, et peu encline à laisser un homme de marbre. En parallèle à cette histoire s'initie celle de la conquête de Mars où les premiers hommes s'apprêtent à atterrir sur la Terre rouge. Bien que ces deux conquêtes, celle de l'amour, celle de la planète, semblent sans rapport, elles se croiseront autour des thèmes du désir, du rêve et même au cours d'une partition lyrique.

Il est difficile de donner un avis sur ce Mars et Avril qui force autant le respect que la tristesse de voir un film se focaliser une fois de plus sur la sexualité. Alors certes Caroline Dhavernas ne manque pas de charme et de charisme – comme de talent – et on comprend aisément que des hommes soient attirés par la belle au point d'en avoir le souffle coupé, reste qu'on aurait aimé qu'un tel projet montre autant d'ambition dans son histoire que dans sa conception. L'histoire semble venir tout droit des années 70, de ces bandes dessinées pseudo-intellectuelles qui aimaient mélanger cul et science-fiction, aux costumes souvent abracadabrants (mais qui ont leur charme) et peu réalistes. Si la note d'intention était là - et oui c'est particulièrement réussi - reste que le propos parait un peu dépassé et caricatural, et la relation qui transporte tout cela sur Mars plutôt abracadabrante.

Par contre, Martin Villeneuve fait preuve d'une ambition visuelle et conceptuelle qui force le respect. Cette coproducion indépendante Canada-France-Israël amène le film dans une approche artistique assez unique cinématographiquement parlant, qui démontre un talent indéniable de créateur d'univers. Et parce que Mars et Avril ne ressemble à aucun autre film de science-fiction (le plus proche serait Immortel, mais le résultat était bien plus laid), il mérite notre/votre curiosité. On espère donc revoir très vite Martin Villeneuve sur un projet de ce type, mais avec une histoire à la portée peut-être moins individualiste. (Richard B.)

Moyenne staff : 4,5/10
Richard B. : 5/10
Vincent L. : 4/10

 

 

Raze
de John C. Waller

Suite à son enlèvement, Jamie se retrouve enfermée dans une prison entièrement peuplée de femmes. La captive est contrainte de se battre à mains nues avec sa codétenue Sabrina, au centre d’une arène, pour le plaisir de spectateurs invisibles. Mais l’enjeu est de taille… Une personne proche de chacune des prisonnières est en danger de mort. Pour leur sauver la mise, ces femmes doivent combattre jusqu’à ce que mort s’ensuive. Ready... ? Fight !

Alors qu'au même moment des confrères assistaient à des combats dantesques entre monstres et robots (salaud de Jonathan), d'autres, en l'occurrence Vincent et moi même, découvrions des combats à une échelle bien plus modeste avec Raze.

Comme vous l'aurez compris via le sypnosis, le film de John C. Waller tente de ressusciter avec son film le Women In Prison cher au cinéma d'exploitation des années 70. Sur le papier, nous étions a priorir très enthousiastes. Franchement, voir de jolies midinettes (avec la présence annoncée de Rachel Nichols) se battre avec rage dans une espèce de jeu de la mort laissait augurer certes un spectacle primitif, mais certainement savoureux (j'avoue avoir hésité à employer le mot jouissif). Bref, j'espérais voir une sorte de Undisputed (entre nous, le troisième de la série était juste énorme) à la sauce féminine. Mais ça, c'était sur le papier, la réalité se trouve quant à elle être un véritable désenchantement.

Alors, oui, Raze proposes des combats de filles, sur ce point il n’y a aucun doute, les "versus" n'arrêtent même jamais ! Le problème est que, même si on suppose que les moyens financiers devaient être modestes, à aucun moment John C. Waller ne cherche jamais à surpasser la difficulté. Les décors sont quasiment toujours les mêmes (une pièce étroite) et, surtout, il n'y a aucune chorégraphie dans les combats ou nouvelles approches qui viendraient à les différencier. La conséquence est sans appel : après une première empoignade - assez efficace - dans lequel on se dit qu'on va passer un bon moment, on se trouve par la suite avec tout un tas d'autres combats, au mieux similaires, au pire totalement inférieurs et inoffensifs.

Alors que ce type de cinéma demande une montée crescendo des combats, seul les quinze dernières minutes viennent à nous réveiller, aors que le film décide de nous offrir quelque chose de nouveau, certes pas original et facilement devinable, mais on était enfin libéré de cette boucle interminable des trois coups de pied, quelques positions de judo au sol, un petit peu d'étranglement et du "je t'éclate la tête contre le mur".

Du coup, en plus de posséder une histoire ultra simpliste (ce qui est au final propre à tout Women In Prison), Raze manque vraiment de générosité et aurait pu et dû rester ce que ce projet était à l'initiale celui d'un court-métrage. C'est pas demain semble-t-il que Scott Adkins trouvera son pendant féminin. (Richard B.)

Moyenne staff : 4,5/10
Richard B. : 4/10
Vincent L. : 5/10

 

 

The crack
d'Alfonso Acosta

Histoire de passer du bon temps, la charmante Marcela quitte un jour la maison pour se rendre à une fête déguisée. Durant cette soirée elle se tape un type portant un masque de cochon sous le regard voyeur de son frère Tomàs. Au petit matin il découvre le corps inanimé de sa soeurette. Un an plus tard, la famille se retrouve en vacances dans une maison de campagne isolée, essayant de fuir et d’oublier cet épisode douloureux du passé. Mais rien ne se passe vraiment comme prévu et à la place de se réconcilier, les tensions fraternelles, ainsi que les hormones, montent en puissance. Les envies d'incestes vont de plus en plus se faire présent, les neveux fantasmes très durs sur la jolie tata, et celle-ci semble plutôt ne pas freiner leur hardeur. Moi je vous le dis, cette histoire va finir par mal se terminer !

Après une visite assez glaciale au festival du Film fantastique de Gérardmer, The crack, d'Alfonso Acosta vient tenter de prendre un peu de soleil du côté de la ville de Neuchâtel. Autant dire que l'affaire n'est pas gagnée et on se demande encore ce qui suscite l'intérêt des programmateurs vis-à-vis de ce film certes auteurisant, mais au final aussi plat qu'ennuyeux.

Que dire sur The crack qui pourrait susciter l'intérêt ? Quasiment rien, hormis peut-être que la tata Angélica (interprété par Fiona Horsey) est particulièrement charmante et qu'elle peut ne pas laisser indifférent. Reste qu'en dehors de ce personnage plus ou moins complexe (pour lequel il est un peu plus incertain d'y attribuer une étiquette), tout le reste est aussi téléphoné que pénible à regarder. La mise en scène d'Alfonso Acosta est appuyée, soulignant sans demi-mesure chaque sentiment des personnages, et abuse des fondus au noir, créant un véritable supplice visuel. L'image, quant à elle, ne met pas du tout en avant les magnifiques lieux de tournage et ne confère aucune ambiance (alors même que par moment le scénario tente de faire des allusions mystiques autour de la forêt). L'ambivalence n'existe pourtant jamais et on sait parfaitement vers quelle direction Alfonso Acosta veut nous amener.

Bref, Alfonso Acosta tente l'addition désir incestueux, rythme lent et rancune pour s'octroyer une étiquette d'auteur, mais la recette ne marche pas vraiment et on reste perplexe devant cette caricature des personnages qui apparaissent presque tous comme des attardés. (Richard B.)

Moyenne staff : 3,3/10
Richard B. : 3/10
Vincent L. : 3,5/10

 

 

The Dyatlov Pass Incident
de Renny Harlin

En 1959, neuf randonneurs succombèrent d’une mort mystérieuse lors d’une expédition au mont Kholat Syakhl. Curieux de résoudre l’un des plus grands mystères, des étudiants décident de faire un reportage et d’investiguer sur place. Quelques jours après leur départ, ils disparurent. On ne retrouve que leurs affaires, parmi lesquelles se trouvait du matériel vidéo.

Et c'est reparti pour un found footage de plus ! La mode du POV (Point Of View) est toujours aussi active, et on se demande bien pourquoi. Là où cela devient triste, c'est lorsqu'on découvre cette année des noms tels que Barry Levinson (The Bay) ou maintenant Renny Harlin associés à ce type de cinéma. Est-ce qu'à de mon avis ces films seraient meilleur s'ils avaient été tournés sous forme plus traditionnelle ? Ma réponse est mille fois oui ! Car, si on regarde de prêts, la logique de ce procédé ne fonctionne jamais sur la longueur. Pour exemple : comment est-il concevable de penser qu'une personne se mette à filmer une avalanche alors que sa propre vie se trouve en péril ? Comment imaginer une seconde ce zoom final alors que la caméra est posée sur une table ? Comment justifier les parasites qui créeent un effet de style sans pour autant nuire à la netteté globale de l'image ? Tout cela sans compter que ce The Dyatlov Pass Incident (désormais raccourci à Devil's Pass pour l'exportation à l'international) possède un montage assez exemplaire, alors même qu'une seule caméra est retrouvée. À noter que paradoxalement, cette incohérence assez énorme permet au film de gagner en narration, en fluidité et en lisibilité par rapport aux autres found footages.

Chacun peut penser ce qu'il veut de Renny Harlin, reste que le bonhomme est loin d'être un tâcheron, et il connait bien son métier. Dans ses avantages, The Dyatlov Pass Incident n'est donc jamais ennuyeux, les décors naturels montagnards sont bien mis en valeur, l'action (hormis vers la fin) est toujours lisible et ne fait jamais mal aux yeux, et on a même quelques passages particulièrement impressionnant (et cela même s'ils ne tiennent pas la route, à l'instar de la fameuse avalanche). Tout n'est pas négatif en terme de "Point Of View", de temps à autre on dénote quelques bonnes idées, comme des protagonistes posant leur caméra en plan assez large, permettant d'une part des plans stables et d'autre part d'avoir toutes les personnes concernées dans le cadre. Les acteurs peuvent ainsi se laisser à interpréter leurs personnages sur des scènes entières sans être interrompu. On n'a pas non plus ces zooms intempestifs, les caméras sont parfois arrêtées ou justement mis de façon à ce que le spectateur puisse voir ce qu'il est sensé voir, bref Renny Harlin arrive à éviter quelques erreurs commises par quelques autres dans le passé, et ne sombre jamais dans le "non-cinéma" des Paranormal Activity (saga la plus inutile de l'histoire du cinéma).

L'intrigue en elle-même, dans la lignée d'un bon épisode d'X-Files, est assez amusante et joue autour de diverses mythologies (UFO, Yeti, zone expérimentale de l'armée...). Certes l'histoire n'a rien de révolutionnaire et cumule des incohérences assez frappantes (surtout vers sa fin), mais nous n'avons pas l'impression d'être devant une sempiternelle histoire de zombies ou de fantômes, et d'une certaine façon ça fait du bien.

Bien meilleurs et intéressant qu'une majorité de found footages, le nouveau film de Renny Harlin ne tient toutefois pas la route et démontre une fois de plus que ce procédé est une hérésie (hormis peut-être [REC.] ou Le projet Blair Witch) et dessert plus les films qu'il ne les aide (combien pensent comme moi que Chronicle aurait été bien meilleur sans le POV ?). Et il paraît évident que si The Dyatlov Pass Incident avait été traité de manière plus traditionnelle, il aurait grandement gagné en qualité, et cela se voit d'autant plus que le film possède déjà un montage d'une certaine qualité, ainsi qu'une image généralement belle. Bref, vivement que cette mode disparaisse ! (Richard B.)

Moyenne Staff : 4,3/10
Richard B. : 4,5/10
Vincent L. : 4/10

 

 

We are what we are
de Jim Mickle


Les Parker sont connus dans le village pour leur grande discrétion. derrière les portes closes de leur maison, le patriarche, Frank, dirige sa famille avec rigueur et fermeté. Après le décès brutal de leur mère, iris et rose, les deux adolescentes Parker, vont devoir s’occuper de leur jeune frère rory. Elles se retrouvent avec de nouvelles responsabilités et n’ont d’autre choix que de s’y soumettre, sous l’autorité écrasante de leur père, déterminé à perpétuer une coutume ancestrale à tout prix. Une tempête torrentielle s’abat sur la région, les fleuves débordent. Les autorités locales commencent à découvrir des indices qui les rapprochent du terrible secret des Parker.

A l'origine de We are what we are, il y a un film mexicain, Ne nous jugez pas, prix du jury à l'édition 2011 du festival de Gerardmer. Remake US écrit et réalisé par l'équipe à l'origine de Stake Land (Jim Mickle à la réalisation, Nick Damici et Jim Mickle au scénario), We are what we are reprend le pitch de base du film de Jorge Michel Grau pour en décliner une nouvelle histoire, basée cette fois non plus sur la pauvreté et les dérives sociales de la société mexicaine, mais sur les croyances religieuses de l'Amérique profonde.

Par son changement de thématique, le projet se justifie donc, proposant autre chose qu'une nouvelle version uniquement motivée par le côté mercantile. Ca, c'est la bonne nouvelle. D'une manière générale, si l'on peut reprocher un certain nombre de chose au travail de Jim Mickle, on ne peut cependant lui retirer son honnêteté. Même Stake Land, sorte de version low cost de Je suis une légende, possédait son intérêt intrinsèque. Ainsi, dans ce qu'il raconte, We are what we are est souvent intéressant (à défaut d'être vraiment original), les thématiques passant à travers des personnages bien construits, bien interprétés, et dont les relations apportent de la matière au sujet.

Le soucis de We are what we are ne se situe pas dans ce qui est raconté, il se trouve dans la manière dont l'histoire est racontée. Formellement, le film reprend l'intrigue d'Une petite ville tranquille, l'un des épisodes phare de X-Files saison 2. Mais là où l'épisode possédait un rythme soutenu sur quarante minutes, l'histoire s'étire ici plus que de raison sur plus d'une heure quarante. A l'instar de Stake Land, Mickle étire son propos en oubliant toute forme de rythme dans son long-métrage. Attention, on ne parle pas ici d'un rythme lent, mais bel et bien d'un film non rythmé, qui étire en longueur des séquences à l'intérêt discutable en mettant de côté toute notion de suspens, d'ambiance ou de dramaturgie. Les deux ne sont pas forcément incompatibles, mais Mickle ne parvient pas à les marier de manière convaincante.

Là-dessus, les nombreuses incohérences du scénario finissent par empêcher le film d'emporter l'adhésion, malgré son propos finalement assez futé. Au final, malgré la sincérité évidente de Jim Mickle, We are what we are s'avère plus ennuyeux qu'autre chose. Dommage. (Vincent L.)

En salle en France le 28 aout 2013.

Moyenne staff : 4,8/10
Richard B. : 5,5/10
Vincent L. : 4/10

 

 

You're Next
d'Adam Wingard


La famille Davison à la surface pourrait être assimilée à un modèle de perfection. Monsieur et madame vivent dans une belle et grande maison isolée, ils semblent assez ambourgoisés, et ont quatre enfants qui apparaissent chacun épanouis dans leur travail et en harmonie avec leurs compagnons respectifs. Vue ainsi, cette réunion familiale avait tout pour bien se dérouler. Pourtant a gratter un peu, on découvrira quelques tensions et jalousies, mais au final cela reste peu de choses face au danger imminent qui va se présenter à eux. En effets, en plus d'une forte dispute, leur soirée va se trouver animée par un groupe de personnes masquées qui aiment jouer aux fléchettes et à la hache. Résultat : va peut-être falloir s'unir pour faire face à ces chasseurs impitoyables, sans quoi cette réunion pourrait bien être la dernière.

Le film commençant par une séquence "petite culotte et généreux chemisier ouvert", il est fort probable que le public du BIFFF se serait exclamé "C'est un bon film !". Et il ne se serait pas trompé. You're Next à tout de la parfaite gâterie jouant harmonieusement avec l'humour noir, les séquences-chocs et les clichés. Bref, une très bonne surprise.

Adam Wingard nous livre là un survival entremêlé d'un home invasion horrifique complètement jouissive,rapportant un peu de fraîcheur à un genre qui avait tendance à se répéter. La réussite se retrouve autant dans l'écriture du scénario qui offre quelques dialogues savoureux que dans le fait que le réalisateur/scénariste récupère les codes du genre pour jouer avec et offrir quelques moments aussi inattendus que réjouissants. Les jump-scare pour une fois son pas omniprésent et lorsqu'ils font actes de présence provoquent de véritables moments de sursauts, la structure des révélations est complètement désamorcée pour se trouver non pas en fin de film, mais au centre de celui-ci et pour une fois certains personnages vont surprendre en se montrant bien moins stupide qu'habituellement. Puis on appréciera particulièrement la présence du réalisateur Ti West qui cette fois passe devant la caméra (les deux réalisateurs ont collaboré sur V/H/S 2).

Vous l'aurez donc compris You're Next est un film hautement recommandable ! (Richard B.)

En salle en France le 4 septembre 2013.

Moyenne staff : 7,5/10
Richard B. : 8/10
Vincent L. : 7/10

 
Auteur : Vincent L.
Publié le samedi 13 juillet 2013 à 10h00

Commentaires sur l'article

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    Trop durs avec We are what we are, les gars. Classique certes, un peu too much dans sa séquence finale mais plutôt réussi.
    Damien, le 12 juillet 2013 13h32