Philip K. Dick : Le génie halluciné ! > La descente en enfer

1964/1974

Au printemps 1964 Dick quitte Anne et retourne à BERKELEY. Il y rencontre une jeune femme, Grania, avec qui il se met en ménage. Il s'intègre, cette fois, totalement avec l'esprit de l'époque. Allant même jusqu'à écouter du rock'n'roll. Sa paranoïa, elle, ne le lâche pas. En instance de divorce il se croit espionné de toutes parts et essai de cacher sa liaison avec Grania. Il se constitue une petite cour de fans passionnés. Il joue avec délice le cinglé, l'original, voire même le drogué alors qu'il n'a jamais, jusqu'alors, consommé la moindre substance illicite (mis à part ses médicaments évidemment). Quand parait Le Dieu venu du Centaure, tous les lecteurs y avaient lu LE grand roman de l'acide. Dick ne les avait pas contredits. Il fait quelques essais d'acide mais ses trips sont si mauvais qu'il laisse immédiatement tomber. Seule drogue qu'il puisse consommer : la marijuana et des tonnes d'amphétamines.
Le Dieu venu du Centaure est le premier roman de Dick à prendre la science-fiction à la gorge, à la secouer sans ménagement et à la mettre au pas selon ses exigences à lui. John Lennon le lut, l'admira, et exprima le projet d'en faire un film. Projet sans suite...
L'écrivain soumet régulièrement ses amis à des tests compliqués pour savoir s'ils sont des espions à la solde du FBI. Grania, fatiguée par les excentricités de Dick, finit par déménager. Elle dira plus tard : « Bien sûr qu'il était cinglé ! Complètement cinglé ! Mais il était aussi beaucoup plus que ça ; c'était quelqu'un de très riche et de très complexe. Sa dinguerie n'était qu'une facette de l'homme incroyablement compliqué, brillant, humain et profondément mystique qu'il était ».
Au printemps 1965 il se met en ménage avec Nancy Hackett, qui devient sa nouvelle muse. La jeune femme représente pour lui l'essence même de l'humanité : Tendre, compatissante, vulnérable. Ses oeuvres à venir vont s'en ressentir. Il introduit dans ses récits ce qui pour lui est le contraire de Nancy, donc de l'humanité : le robot. C'est à cette époque qu'il écrit Blade Runner (Les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?).
En 1967 Nancy accouche d'une fille qu'ils baptisent Isolde Freya mais qui sera toujours surnommée Isa. L'arrivée du bébé dégrade les relations du couple. Philip a peur d'être supplanté par Isa dans le cœur de Nancy et par Nancy dans le cœur d'Isa. Il retombe immédiatement dans une surconsommation de médicaments qui renforce son délire paranoïaque. Le tout aidé par le fisc qui lui tombe sur le dos, aussi modestes soient ses revenus. C'est la période la plus fertile en nouvelles et romans paranos tels que : la foi de nos pères, La vérité avant-dernière ou Ubik.
En 1968 Dick est très impressionné par le film de Kubrick : 2001, l'Odyssée de l'espace. Il s'en inspire pour son roman Au bout du Labyrinthe. Au cours de l'hiver 1969, l'abus d'amphétamines envoi l'écrivain à l'hôpital. A peine sorti, il recommence. Il débute le roman Coulez mes larmes, où un homme se réveille privé de son identité. Toute trace de lui à disparu, il n'est plus rien.
A son retour de l'hôpital il est accueilli chez un groupe de fans à FULLERTON en Californie du Sud. Vivre au milieu de jeunes gens lui redonne le moral. Il continue de tirer le Yi-King pour gouverner sa vie et tombe une nouvelle fois amoureux. Cette fois-ci c'est une jeune fille de 18 ans (il en a 45) : Tessa. Il s'installe dans un nouvel appartement avec elle et se remet à l'écriture. A l'automne 1972 Tessa est enceinte. Pour avoir quelque chose à lui dédier, il reprend l'écriture de Coulez mes larmes, roman qu'il n'avait jamais réussi à finir. Ce travail lui prend plusieurs mois, il ne consomme plus d'amphétamines et n'écrit donc plus aussi vite qu'autrefois. Au printemps 1973 il se met à écrire son Grand Oeuvre. Substance Mort(A Scanner Darkly) : La somme de ses expériences dans le monde de drogue, d'égarement et de traîtrise où il avait plongé après le départ de Nancy. En 1973 naît son fils, il le prénomme Christopher.