Critique La Maison des Derviches [2012]

Avis critique rédigé par Manu B. le lundi 17 septembre 2012 à 21h22

Nanos dans le détroit du Bosphore

"La cigogne s'élève en spirale au-dessus d'Istanbul, ailes blanches aux bouts noirs portées par un courant ascendant. Son plumage reflète le soleil et elle vire sur les exhalaisons des vingt millions d'habitants de la ville - juste une cigogne parmi les dix mille qui ont suivi les circuits de convection reliant l'Afrique à l'Europe en se laissant planer de l'un à l'autre, parties du lac Victoria et de la vallée du Rift pour longer la ligne argentée du Nil puis traverser le Sinaï et le Liban jusqu'au grand quadrilatère de l'Asie Mineure..."

Dans un Istanbul de 2027, sur la place d'Adem Dede, des évènements majeurs sont sur le point de se dérouler. L'une de ses résidences - l'ancienne maison des Derviches - abrite deux frères, dont l'un étudie l'Islam et l'autre, Necdet, essaie de se racheter une conduite. Il y a aussi Leyla, une jeune femme qui cherche désespérément du travail dans le marketing, pour vivre pleinement son indépendance et s'éviter de s'humilier en retournant dans la ferme familiale. George Ferentinou est grec, un ancien professeur d'économie expérimentale rongé par le remord et dont la gloire lui a été volée. Il s'entretient volontiers avec le jeune Can, un enfant dont le coeur ne supporte pas la moindre émotion violente - même pas un bruit soudain qui pourrait le tuer. Il vit en permanence avec des bouchons dans les oreilles dans un univers sonore cotonneux. Son seul refuge réside dans l'utilisation de son bitbot, un robot morphique, qui lui procure une pseudo vie de détective. Ayse est la femme d'Adnan, un trader très créatif et sans scrupules. Elle marchandes des oeuvres d'art et décide de se lancer à corps perdu dans une quête du Graal, la recherche d'un homme supposé mellifié. Istanbul s'invite la fête lorsque Necdet se retrouve à bord du tramway où une femme se fait sauter la tête. Quelques temps après, il commence à voir des Djinns...

La Maison des Derviches est le deuxième roman d'une future trilogie informelle, commencée avec Le Fleuve des dieux et terminé par Cyberabad days. Après cela, il passe à une autre thématique. Dans ces romans, à la manière de John Brunner, il invente un futur qu'il dissèque sur le plan social, économique et religieux. Il est édité aux éd. Denoël coll. Lunes d'encre.

S'engager dans un roman de Ian McDonald n'est jamais aisé pour qui n'est pas un tant soit peu familier avec la littérature de l'imaginaire. Il se situe même parmi les grands sociologues du futur, appliqué à décrire un avenir proche (quelques dizaines d'année en avant) avec ce qu'il faut de technologie pour nous dépayser et en même temps une continuité dans la société qu'il décrit. La vision qu'il nous fait partager est à la fois familière et étrangère à notre quotidien. C'est très dérangeant.
L'Istanbul de son roman est différent de celui qu'on connaît. La place Adem Dede n'existe pas (encore). Par contre les personnages parcourent des lieux aujourd'hui très fréquentés par les touristes (Beşiktaş, Beyoğlu, Fatih, Kadıköy...), ce qui permet de situer un peu les lieux parcourus par les protagonistes et d'en ressentir l'ambiance.

Istanbul est une ville cosmopolite et bouillonnante, dont les mystères remontent parfois à plus de 2500 ans, jonction entre l'Asie et l'Europe, et peuplée de pas loin de quinze millions d'habitants.
A l'instar de l'Inde du Fleuve des dieux, l'auteur britannique en extirpe un bouillon de cultures et de talents capables de changer la face du monde. La structure est déjà maîtrisée, les multiples voix assemblant un puzzle d'intrigues qui, d'une manière ou d'une autre, se rejoignent à la fin. On pourra peut-être lui reprocher cette "facilité" qui n'en est pas vraiment une. Les personnages, eux n’ont rien en commun avec le précédent roman et certains sont attachants. Comme la ville, son panel couvre tout un pan de la population, du trader au pauvre professeur grec, de la jeune femme sans emploi au marchand d’art, de l’enfant isolé à l’étudiant surdoué.

Ian McDonald signe avec La Maison des Derviches un roman qu'on pourrait qualifier de visionnaire - on ne le saura que dans quelques années -, passionnant dans son analyse des relations humaines et même touchant dans son approche.

La conclusion de à propos du Roman : La Maison des Derviches [2012]

Auteur Manu B.
85

Plonger dans un roman d'Ian McDonald est toujours à la fois difficile et fascinant. Il est capable d'imaginer et décrire un futur plausible et d'une certaine manière terrifiant tellement il semble proche. Même si l'on est loin de l'Inde du Fleuve des dieux, les thèmes y sont proches, notamment celui de la religion au coeur des débats. Après les récents évènements, ce futur est dors et déjà notre présent.

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