District 9 ► Anecdotes du film

Cette page rassemble les anecdotes du film District 9, regroupées en différentes catégories.

Interview de Greg Broadmore (Anecdote)

Pour commencer, vous venez de l’univers du comics, est-ce exact ?
Oui j’ai commencé par faire du comics quand j’étais très jeune. J’ai toujours été fasciné par cela. Mais je n’ai jamais été payé en tant qu'artiste de comics. Le premier vrai job que j’ai jamais eu c’est de travailler sur des films chez Weta. Enfin je veux dire, j’ai travaillé un peu dans une boutique de jeux vidéos pour payer mon loyer et j’ai aussi fait des illustrations pour des livres d’enfants. Mais ce n’était pas très satisfaisant. J’aime les livres d’enfants mais les illustrations que l’on fait sur ces livres ne sont pas très substantielles. Et donc pour moi, j’ai toujours fait mes propres comics, mes histoires, mes illustrations, mes musiques, ce genre de choses.

Et un beau jour est venu le Seigneur des Anneaux et je me suis dit que je devais aller travailler pour ces gens-là ! Et par chance pour moi, Richard Taylor qui dirige Weta WorkShop a beaucoup aimé mon travail et quelques semaines plus tard j’avais un travail !


Vous êtes donc entré à Weta WorkShop ?

Oui je travaille pour Weta depuis 8 ans et avant ça, je n’avais jamais eu de travail. J’ai été au chômage pendant à peu près 7 ans de ma vie. Après le lycée, j’ai essayé de faire un peu d’enseignement mais je me suis lamentablement planté. J’ai détesté ça. J’étais au chômage, je faisais de la musique et des comics, je dessinais des planches. Parce que c’est très difficile en Nouvelle Zélande, il n’y a que 4 millions de personnes donc tu ne peux pas faire de comics pour le marché Néo-Zélandais, parce qu’il n’y a pas suffisamment de personnes pour les acheter. Personne ne veut faire de science-fiction ou de fantasy jusqu’à ce que Peter Jackson fasse des films de cette échelle et permette à des gens comme moi de saisir cette opportunité. C’est comme s’il avait réinventé le cinéma en Nouvelle Zélande à lui tout seul. Sans pour autant dire que le cinéma avant lui n’était pas bien ! Parce qu’il y a des films Néo-Zélandais absolument extraordinaires et il y avait déjà de la science-fiction mais ils étaient d’une plus petite échelle à cause de la nature, du fait qu’il n’y ait que 4 millions d’habitants.


C’était difficile de gagner votre vie en Nouvelle-Zélande en vendant des comics ?

Oui oui complètement, j’imprimais moi-même mes comics books, je les photocopiais, les reliais et je les amenais en personne au magasin qui vendait les comics. Si tu as de la chance, tu peux en vendre 20, 50 ou 100. 100 c’est vraiment un miracle ! Et dans ces cas là j’étais hyper heureux !


Qu’est ce que ça fait de passer de l’univers des comics books à une société comme Weta Workshop ? ça change vos habitudes de travail ?
Ça a changé complètement. Je suis quelqu’un de plutôt très travailleur de toute façon, je suis toujours concentré sur ce que je dois faire après, mais travailler chez Weta, tout d’un coup c’est 10 heures par jour et tout ce que tu fais, c’et essentiellement du concept design et créer des mondes imaginaires, et j’ai appris énormément. Je veux dire quand je regarde mon travail avant Weta ou même à mes début chez Weta, c’est comme si je pouvais voir un changement énorme parce que tout d’un coup, je suis parmi ces artistes extraordinaires qui ont tous des techniques et des talents différents et c’était pour moi comme un sorte d’éducation et j’ai toujours l’impression que je suis en train d’apprendre. Parce que, tu sais, tu vas voir un autre artiste travailler et il te donne de nouvelles techniques, de nouvelles idées. C’est un endroit très collaboratif, dans le sens où les gens partagent leurs techniques, leurs trucs, c’est un endroit très « open ».


Mais en même temps vous aviez vos propres habitudes pour dessiner vos comics et quand vous allez chez Weta, est-ce que c’était une façon de travailler avec des ordinateurs ?

Oui oui auparavant je travaillais au crayon et à l’encre, je peignais à l’acrylique, à l’aquarelle de temps en temps et tout d’un coup je travaille sous Painter et Photophop et maintenant je travaille exclusivement sur Photophop, c’est tellement rapide.

Est-ce que vous connaissiez ces logiciels à l’époque ou vous les avez appris sur le tas ?
Oui oui j’ai du apprendre à les utiliser. Photoshop n’est pas fait pour peindre de toute façon. Peu à peu, au fil des ans, il y a des outils très bons pour les illustrateurs mais ce n’est pas fait pour ça et c'est bien ainsi, c'est comme prendre quelque-chose d'entortillée sur elle même et tu utilise des outils qui ne sont pas cencés être utilisé de cette façon et c’est la partie intéressante de travailler avec Photoshop selon moi. Et ça permet de se rappeler qu’il ne s’agit jamais des outils mais de l’idée. L’outil n’est jamais que le moyen pour y parvenir.


Donc vous ne dessinez plus au crayon ?
Si si, je fais des illustrations au crayon et je fais toujours des croquis dans mon carnet. Par exemple, à chaque Noël, je fais une planche, une peinture, et ça fait du bien.


Est-ce que vous pourriez nous dire quelques mots sur les liens entre Weta Workshop et Weta Digital, comment ça marche … ?
Les deux sociétés ont été créées par les mêmes personnes. Weta Workshop et Weta Digital ont été créées par Peter Jackson, Jamie Selkirk et Richard Taylor. Ils font tous partie de la même société mais en fait il y a deux divisions bien distinctes. Weta Digital est plus grande, plus segmentée : il y a l’animation, la préviz’ (prévisualisation, ndlt), la texture, l’éclairage et tout un tas de composantes. Il y a de multiples facettes comme cela.

Alors que Weta  Workshop est un bâtiment séparé un peu plus loin, au bout de la rue Miramar, à coté de l’actuel département animation de Weta Digital et il ne s’agit que d’effets physiques. Par exemple, nous fabriquons des armures, des accessoires, des armes, des costumes, des miniatures, de l’animatronics et bien sur le design, c’est le plus gros département de Weta Workshop. Quand j’ai commencé, il y a avait 5 ou 6 designers maintenant, il y en a probablement 20 ou 25.


Est-ce que vous travaillez de façon très proche avec Weta Digital ou est ce que c’est de façon séparée ?

Ça dépend du projet. Par exemple, il y a des gens comme Gina Acevedo qui travaillent à la fois pour Weta Workshop et Weta Digital. Elle fait une sorte de transition entre les deux, elle facilite la communication entre les deux. Mais d’une certaine façon, comme nous sommes tellement concentrés sur notre travail, il n’y a en fait pas tellement de communication entre les deux entités.
Tu expliques ce que tu as designé et tout d’un coup ça part chez Weta Digital au département animation qui va lui donner vie. Alors tu essaies de t’impliquer dans le projet un maximum mais ça dépend vraiment de chaque individu et non pas des gens qui font la coordination sur le projet. Mais ce peut être un peu délicat de maintenir une bonne communication.

Par exemple, je parlais avec des types ici pendant le talk d’hier (Symposium Imagine the Future, ndlt), Andy Jones et Robin (Hollander, ndlt) de Weta Digital et je ne les avais jamais rencontrés avant alors qu’ils bossent à un étage de moi ! C’est un peu dommage.

Maintenant à propos de District 9, pouvez-vous nous parler de vos relations de travail avec Peter Jackson et Neill Blomkamp pendant la préparation ?
Oui alors District 9 a dérivé de Halo. Peter a trouvé Neill, il l’a déniché comme un extraordinaire futur réalisateur qui n’avait même pas encore fait de court métrage ou de publicité et il l’a en quelque sorte sélectionné pour qu’il soit le réalisateur de Halo. Et Neil a probablement travaillé 6 ou 8 mois non-stop, a développé le monde/l’univers de Halo en prenant le concept du jeu pour lui donner vie, en le rendant beaucoup plus crédible et authentique, et en ajoutant une couche de profondeur là-dedans et tout ceci est allé très loin, on a construit des costumes, des armes, des accessoires, on a même commencé à construire le Warthog, le gros véhicule et là, tout s’est écroulé pour des raisons financières. Ça allait être fini, Neil allait rentrer chez lui et comme vous le savez, Peter s’est assis à côté de Neill et de Terri Tatchell (co-scénariste de District 9, ndlt) : « Qu’est-ce que vous allez faire les gars ? Faut que vous restiez ici pour faire un film ! ». Et je crois que c’est Peter lui-même qui a proposé à Neill de faire Alive in Joburg. Et c’est comme ça que District 9 a vu le jour. Et c’était super ! Moi j’étais déjà très impliqué dans la préparation de Halo et tout d’un coup District 9 est arrivé et donc une opportunité est apparue et je me suis précipité dessus.


Est-ce que vous avez conservé des choses des concepts design entre District 9 et Halo ?

Non pas vraiment. Il y a eu peut-être un tout petit peu de « débordement » d’un projet à l’autre au niveau du design de certaines des armures, des armures MNU mais juste au niveau de la forme de base … nous avons en fait réellement construit les armures pour les troupes UNSC de Halo mais ça n’est jamais allé au bout, et c’est toujours là dans les locaux de Weta Workshop, tout un set d’armures qui ne sera malheureusement jamais utilisé ! Parce que vous savez, on n’aime pas interchanger les choses d’un projet à l’autre mais certaines des idées et les trucs sur lesquels je travaillais (sur Halo, ndlt) ont pu dérivés ou se sont transformés et sont devenus des choses pour District 9.


Et à un niveau personnel, dans les relations de travail, est-ce que c’était Peter Jackson qui venait vers vous ou Neill… ?
Non, Peter travaillait avec Neill sur le scénario et Neill travaillait avec nous un par un chaque jour. Il venait à Weta Worshop tous les jours ou moi j’allais le voir et on parlait des idées et de la conceptualisation et il est super impliqué là-dedans. Parce que Neill était un designer lui-même auparavant, c’est un mec avec un background dans les effets digitaux, et il savait exactement le type de choses qu’il voulait, le style qu’il voulait, il est très précis. C’est le genre de mec qui, s’il avait le temps, il pourrait tout faire lui-même ! Donc c’est super de bosser avec un mec comme lui parce qu’il sait exactement ce dont il a besoin et 90 % du temps, je suis d’accord avec ses choix. Et parfois, il disait « je veux exactement ça » et je faisais exactement cela. Par exemple, il y a des fois où il faisait un dessin et de mon coté je faisais simplement une version améliorée de son dessin, avec de la couleur. Mais d’autres fois, je me faisais plaisir et je faisais quelque chose qui sortait simplement de mon imagination personnelle. Et c’est parce qu’on s’entendait si bien, qu’il y avait une super communication entre nous… Il est très calme vous savez, c’est une des meilleurs expériences de travail que j’ai jamais eues. C’est parfait pour un designer !

En fait, au niveau du design, c’est en quelque sorte un mix de vos suggestions et de ce que Neil voulait ?
Oui …


Parce que je me souviens l’autre jour pendant votre présentation, vous nous avez beaucoup parlé des armes et les armes de District 9 sont justement vraiment géniales, originales et j’imagine que cette partie là vient de vous ?
Oui oui ! Je suis un méga fan des armes et de ce genre de trucs. C’est un peu mon fléau à moi. Parce qu’à la fois je les adore et qu’elles me rebutent. Vous savez je ne suis pas quelqu’un de violent du tout mais je suis littéralement fasciné par les armes, les chars et toute cette machinerie de la mort. Je ne sais pas pourquoi.


Il y a une sorte de beauté là-dedans … de beauté Steampunk ?

Oui, il n’y a pas du tout de coté Steampunk dans District 9 évidemment, mais il y a cette complexité parce que je voulais que les armes de District 9 … je voulais que les armes de District 9 évoquent un croisement entre un outil et une arme. Certaines sont littéralement des outils de guerre. Certaines des armes ne sont pas destinées pour être des armes à la base, elles sont des outils pour certaines fonctions, c’est comme une tronçonneuse par exemple. Tu prends une tronçonneuse et tu l’utilises sur quelqu’un, ici c’est un peu la même idée que potentiellement certains de ces dispositifs ont été créés pour d’autres fonctions. Par exemple pour des applications minières, mais ça devient des arme envers les gens. Je tenais à ce que les armes aient cette ambiguïté. Qu’on se pose la question, « pourquoi c’est fait ? » « est-ce vraiment un flingue ou est-ce que c’est autre chose ? »


J’ai une question au sujet de armes extraterrestres parce que les crevettes n’ont pas de mains alors que les armes ont une gâchette comme les gâchettes classiques des armes humaines, alors je me posais la question pourquoi des armes extraterrestres auraient une gâchette classique ?
Oui ben c’est très simple, il y a deux raisons pour cela.
La première, c’est au niveau du design des aliens lui-même : ils ont deux bras et, vous savez, un torse de cette longueur, des bras de cette longueur, et ils ont deux doigts, et si vous regardez les armes, elles ont deux contours pour recevoir les deux tentacules et sur le contour supérieur, il y a la gâchette parce que c’est la façon la plus évidente, la plus simple pour tirer avec une arme aujourd’hui et je me suis dit « pourquoi ça changerait ? ». Je veux dire, peut-être qu’on pourrait amener une nouvelle interface mais l’interface tactile reste la plus évidente. Et pourquoi alors mettre la gâchette ailleurs également ?
Et l’autre raison, évidemment c’est que les extraterrestres avaient été imaginés à la base pour être des « prosthetics », c'est-à-dire des costumes que les acteurs enfileraient. Ça devait aussi impérativement fonctionner pour des êtres humains et c’est la raison pour laquelle il y a une poignée ici et une crosse là afin que tu puisses tirer avec l’arme et que ça paraisse naturel puisqu’au final, il s’agit quand même d’une personne en train de la tenir, donc il fallait que ça fonctionne de façon ergonomique pour des humains.

Une question à propos du temps de travail sur un tel projet : est-ce que vous deviez créer de nouveaux designs pendant le tournage ou votre travail s’est terminé avant ?
Oh oui. Oui tout à fait, la plupart du travail a été fait au début. Tu veux toujours qu’il y ait un maximum de design en amont pour les types du Digital. Tu fais tous les accessoires, les costumes et ils sont sur le plateau pour être filmés afin que les types de Digital aient un bon matériaux de base. Tu tends vers quelque chose qui à la fin sera complètement digital. Ils peuvent donc évoluer un peu au court du tournage et dans ce cas, c'est ce que nous avons fait. Neill est un réalisateur très flexible et parfois il a une idée et il veut en tirer profit au max. Il y a eu des changements très instinctifs, par exemple, le design des aliens a changé trois fois et même au cours du tournage ou au moins à quelques jours du début du tournage. Le design était en perpétuel changement et adaptation, et avec l’exosquelette, c’est moi qui l’ai dessiné, j’avais deux designs complètement différents. Il y avait cette grande armure musculaire organique avec des aspects mécaniques et en fait, on l’a faite en tant qu’accessoire géant, elle était ouverte pour que les acteurs puissent rentrer dedans et jouer à l’intérieur. Ils l’ont amenée en Afrique du Sud, ils l’ont mise dans la cabane et ils l’ont filmée et après être rentrés en Nouvelle Zélande, ils se sont dits que ça n’allait pas du tout ! Donc je suis retourné rapidement sur la table à dessins et j’ai en dessiné une toute nouvelle depuis le départ, complètement différente. Vous savez, la seconde armure, celle que l’on voit dans le film, cette imposante armure mécanique, bien plus grande, comme un tank, Neill la voulait beaucoup plus inquiétante et je pense que comme moi, Neill a grandit avec Aliens et Robocop et nous voulions avoir ce genre de gros robots terrifiants. Dans un sens, on n'est pas loin de ED-209 de Robocop.


A quoi servent les deux grandes dents métalliques sur l’armure ?

Lorsque vous regardez les extraterrestres eux-mêmes, ils ont des palpes maxillaires, des tentacules et de petites mandibules comme les crabes et je me suis dit : si tu es dans un exosquelette, dans une armure qui coordonne tes actions et tes mouvements et que tu es un extraterrestre avec ce truc sur ta bouche, à partir du moment où tu te retrouves dans l’armure, tu veux garder ces mêmes fonctionnalités, c’est une raison assez complexe en fait… Nous, par exemple, nous avons des mains, un visage, on fait des expressions avec notre visage pour communiquer et on utilise nos mains pour faire des signes, pour compter, pour dire stop, go, pour montrer, et donc si tu avais la même complexité d’interface sur le visage, et que tu devais soudainement mettre un masque, tu perdrait tout d’un coup. Mais avec un robot évidemment, tu peux essayer de le reproduire. Donc par exemple, j’ai décidé de conserver les palpes maxillaires sur le devant de la bouche pour que si un alien veuille communiquer, il en ait la possibilité parce qu’il y a la reproduction des mêmes parties de son anatomie.
Et à coté de tout ça, évidemment, c’est juste parce que ça fait peur ! Donc ça fonctionne pour ces deux raisons.

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