Critique Prosopopée [2012]

Avis critique rédigé par Vincent L. le vendredi 10 août 2012 à 10h06

Monde cherche divinités pour résolution de problème...

Le courant des jeux dit "narrativistes" prend, en France, de plus en plus d'importance dans les productions rolistes. Ainsi, aux côtés d'éditeurs se consacrant entièrement à ces publications (Narrativiste et BaH Editions pour ne citer qu'eux), on s'apercevoit que ce type de jeu commence à apparaître, doucement mais surement, dans le catalogue des plus grosses structures (Edge avec Fiasco en est un bon exemple), cela tendant à prouver que le public héxagonal est réceptif à cette nouvelle façon de jouer au jeu de rôle. Ici, il n'est plus question de dychotomie entre un maître de jeu tout-puissant et des joueurs dont le rôle se limite à la simple interprétation de leur personnage, mais au contraire d'un système de narration partagée dans lequel tous les intervenants sont impliqués dans la création de l'univers et du scénario (pour schématiser de manière quelque peu caricaturale, un jeu sans maître de jeu).

Premier jeu édité par Limbic SystemProsopopée appartient à ce courant narrativiste. Si la séparation Maitre de jeu/Joueurs y est bel est bien présente, le système de narration se trouve entre les mains de chacun des participants. Ainsi, les joueurs pourront au choix endosser le rôle d'un meneur (ici appelé une Nuance) ou celui d'un joueur (ici appelé un Médium), l'originalité se trouvant dans le fait qu'il peut y avoir plusieurs Nuances se partageant les tâches ; la construction du monde dans lequel prennent place les parties est donc le fruit d'un travail collaboratif entre tous les participants, certains faisant vivre l'univers, les autres interprétant les héros qui vont résoudre les divers problèmes se présentant à eux. La chose semble au premier abord plutôt bizarre - par rapport au jeu de rôle traditionnel s'entend - mais, une fois les quelques réticences des non-initiés vaincues, Prosopopée tourne bien.

En effet, les participants sont aidés par un système de jeu simple d'accès qui met l'accent sur la narration ; ainsi, si les divers problèmes rencontrés finissent par se résoudre avec des dés, cette résolution n'est pas dissociable d'une part de création. Il faudra en effet que le joueur obtienne des dés dit "d'offrande", et ces dés ne pourront être obtenus que grâce à une partie narrative (les autres joueurs donnent des dés en fonction des diverses prestations de leurs collègues). Facile à prendre en main, cette mécanique permet d'inciter la prise de parole des divers participants tout en conférant à Prosopopée une partie "hasard" - le jet peut être raté et le problème non résolu - l'inscrivant bien comme un jeu à part entière. Malgré tout, il convient de préciser qu'il faut avoir un minimum d'expérience et d'appétence pour le roleplay pour pouvoir jouer, à défaut de quoi on risque de rester silencieux et de s'ennuyer ferme.

En terme de création de scénarios, Prosopopée se base sur un principe très simple. Le monde créé doit répondre à trois règles : il doit se situer dans un période pré-industrielle, rien ne doit être nommé (donc tout doit y être décrit) et la cause des problèmes doit toujours être l'homme. A partir de là, il suffit aux Nuances de commencer à décrire un monde, les actes des divers Médiums constituant le coeur du scénario. Tout est donc régit par l'improvisation, sans arbitrage tiers du maître de jeu, et l'histoire construite est donc le fruit d'une collaboration entre tous les participants. Il en résulte cette agréable impression de créer collectivement quelque chose d'unique et d'éphémère, qui n'appartient que pour un moment donné à un groupe de personnes données, bien plus que dans un jeu de rôle traditionnel où, finalement, les joueurs ne font que participer à la création du maître de jeu.

De fait, pour peu que l'on ne soit pas allergique au procédé et que l'on soit prêt à tenter l'expérience, Prosopopée s'avère être un jeu très agréable à jouer. Les parties étant très courtes (une à deux heures de jeu grand maximum), on ne s'y ennuie pas. Certes, on ne jouera pas à ce jeu sous un format de campagne soutenue pendant plusieurs années, mais occasionnellement, avant de commencer une partie ou pour meubler une soirée de creux (à l'instar d'un jeu de société finalement), il permet de passer un agréable moment, et ce d'autant plus que le jeu s'appuie sur des thèmes non-violents. Il faut cependant bien avoir en tête que Prosopopée est à la limite de ce que peut être le jeu de rôle (d'aucun pourront considérer que ça n'en est même plus), et que, comme toute expérience nouvelle qui sort des sentiers battus, il ne pourra pas plaire à tous (voire provoquer des situations de rejet).

Le seul véritable défaut du jeu se trouve dans son background particulièrement minimaliste. Ainsi, au delà des des quelques pistes amenant à des références ne manquant pas de rappeler le travail d'Hayao Miyazaki, l'univers décrit se trouve réduit à peau de chagrin. Certes, on pourra toujours dire que cela permet de donner aux joueurs une plus grande liberté - et d'éviter, en début de partie, une longue description du background - mais au final, on se demande tout de même pourquoi Prosopopée n'est pas un système générique pouvant se dupliquer dans n'importe quel type de monde, suivant les envies des participants. L'impression est d'autant plus renforcée que le système n'est finalement pas spécifique au style d'univers proposé, et que les diverses illustrations du livre de base, superbes, semblent finalement plus décoratives que véritable utiles.

La conclusion de à propos du Jeu de rôle : Prosopopée [2012]

Auteur Vincent L.
80

S'inscrivant dans le courant des jeux "narrativistes", Prosopopée propose une expérience ludique dépaysante, apte à largement satisfaire les joueurs en quête d'originalité. Assez difficile d'accès pour les rolistes débutants, il s'avère cependant rapide à lire et facile à mettre en place dès lors que l'on a un peu de bouteille dans ce loisir. Le principe de narration partagée et la thématique zen débouchent sur des parties sans véritable équivalents dans les autres productions du même genre, agréable dans leur côté non-violent ainsi que dans le fait d'avoir l'impression de créer, en groupe, quelque chose d'unique.

On a aimé

  • Rapide à prendre en main,
  • Système de jeu simple,
  • Le principe de création des mondes,
  • La thématique non-violente,
  • Un exemple de partie fourni,
  • Les illustrations,
  • Excellent rapport qualité/prix.

On a moins bien aimé

  • Univers très peu mis en avant,
  • Joueurs débutants, passez votre chemin,
  • Un style de jeu qui déplaira à certains joueurs.

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