Critique Bienvenue à Lovecraft #1 [2010]

Avis critique rédigé par Nicolas W. le dimanche 26 décembre 2010 à 22h50

Un deuil dans la famille

"Ty est encore sous la douche. Avant, on jouait à la torture, à m'enterrer vivant ou à la bagarre, c'était marrant. Mais il veut plus jouer maintenant. Il passe son temps sous la douche ou dans sa chambre tout seul."

Depuis le meurtre de leur père, Tyler, Bode, Kinsey et leur mère s'enfoncent dans le deuil. Pour s'en sortir, ils partent vivre à Keyhouse, le manoir familial situé dans la presqu'île de Lovecraft. Alors que l'un des assassins, Sam Lesser, croupit en prison et que l'autre a trouvé la mort, les Locke pensent pouvoir vivre en paix. Mais dans cette immense bâtisse, des secrets bien gardés dorment depuis trop longtemps et l'arrivée de nouveaux occupants va les réveiller...

Premier volume de la série Locke & Key, Bienvenue à Lovecraft débarque sans prévenir en cette fin d'année 2010 grâce à Milady Graphics. Et alors qu'on ne l'attendait pas, le comic book signé Joe Hill se révèle une excellente surprise. Si Joe Hill ne vous dit rien, c'est parce qu'il s'agit du nom de plume de Joseph King, le fils du maître de l'horreur, Stephen King. Secondé par le chilien Gabriel Rodriguez au dessin, l'américain déploie tout son talent au service d'une histoire sensible et forte en émotions.

Avec un nom aussi évocateur que Lovecraft pour désigner le lieu principal de l'action, on comprend d'emblée que le fantastique va régner en maître dans le récit.  Commençant comme un banal thriller avec le meurtre du père Locke par deux adolescents, l'histoire prend rapidement sa dimension surnaturelle avec l'arrivée de la famille dans le manoir de Keyhouse. Grâce aux découvertes de Bode au sujet de la capacité atypique de certaines portes (on vous laisse la surprise) et sur la "résidente" du puits, on entre de plein pied dans un monde inquiétant et énigmatique. Rapidement, Joe Hill met en place son intrigue en donnant voix à chacun de ses personnages à tour de rôle. La puissance de l'histoire et le suspense ménagé autour de celle-ci par l'auteur n'ont aucun mal à tenir le lecteur en haleine. D'autant plus que les rebondissements vont crescendo jusqu'à un final qui nous laisse dans une attente fébrile de la suite. Malgré ce scénario très bien construit, Bienvenue à Lovecraft se démarque de la production actuelle par la sensibilité dont fait preuve l'américain pour nous dépeindre une famille en plein deuil.

Si puissance narrative il y a, c'est notamment grâce aux enfants et la façon de Hill d'exprimer leur douleur face à la disparition de leur père. Ainsi, comme dit plus haut, on retrouve un chapitre au moins où chacun nous livre ses pensées et sa façon de se confronter à l'absence. On salue notamment bien fort le travail accompli sur le personnage de Tyler dont la peine se retranscrit dans le mutisme et dans l'auto-agressivité. Autre excellente chose, l'américain arrive à mettre en rapport le type de réaction avec l'âge. Ainsi Bode, bien plus jeune que Tyler, n'aborde pas la disparition de son père de la même façon, ne la réalisant pas vraiment (même s'il est bien aidé en cela par les événements surnaturels qui se passent dans Keyhouse). Enfin, on se réjouit que le meurtrier, Sam Lesser, ne se présente pas comme dans la plupart des criminels dans les œuvres de ce genre. Au contraire, par l'intermédiaire de nombreux flash-back, Joe Hill explore le personnage et ce qui a pu l'amener à commettre l'indicible. Ce procédé s'avère d'autant plus fort qu'il évite de tomber dans le manichéisme. Reste quelques personnages en retrait, comme la mère, mais que l'on peut légitimement espérer plus exploités dans le prochain volume.

Terminons sur le dernier point remarquable de Bienvenue à Lovecraft : son aspect graphique. Illustre inconnu sous nos latitudes, Gabriel Rodriguez accompli un travail irréprochable particulièrement sur le visage des personnages. Grâce à un trait particulièrement expressif, il apporte énormément à l'empathie que peut ressentir le lecteur vis-à-vis des protagonistes de l'histoire. Nul doute que sans lui, le comics perdrait énormément de son impact émotionnel.

"J'en ai marre de ce que je suis. De ce que je fais. J'en ai marre mais je n'ose imaginer ce que deviendrait Bode sans moi. C'est juste... c'est si dur sans toi, papa. Je n'ai jamais voulu que tu meures. Jamais. Quoi que j'ai dit à Sam."

La conclusion de à propos de la Bande Dessinée : Bienvenue à Lovecraft #1 [2010]

Auteur Nicolas W.
90

Alors que personne ne l'attendait, la série Locke & Key fait une entrée remarquée sur le marché français. Récit fantastique palpitant, personnages attachants et graphisme ciselé, Bienvenue à Lovecraft joue déjà dans la cour des grands. On attend donc impatiemment la suite...

On a aimé

  • La maestria de l'aventure
  • Des personnages émouvants
  • Le thème du deuil
  • Un méchant travaillé
  • Le dessin de Rodriguez

On a moins bien aimé

  • Beaucoup de zones d'ombres laissées en suspens...

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