Critique Dame Bleue [2006]

Avis critique rédigé par Amaury L. le jeudi 29 avril 2010 à 20h03

Une Dame bien morose…

Depuis quelques jours, une impatience enfiévrée gagne les tribus celtes. Le solstice d’été approche et les champions s’entraînent assidûment pour concourir honorablement aux épreuves rituelles en l’honneur de la Dame Bleue se déroulant dans la forêt de Sénart proche de Lieu Saint. Festivité et joutes se mêlent dans un océan de clameurs partisanes, chaque clan nourrissant l’espoir de recevoir le titre de belenava (la très brillante) et la bénédiction de la fée protectrice, la Dame Bleue.

Un graphisme soigné.(dos des cartes)

LE BLEU DE L'HISTOIRE. UNE LEGENDE CELTIQUE, LA DAME BLEUE

Cette légende remonte à l’âge celte avant la conquête de la gaule par les Romains. Lieusaint, ville de Seine et Marne, était recouverte à cette époque, par de vastes forêts au centre desquelles se trouvait une clairière où coulait une source d’eau cristalline et pure, conférant au lieu une atmosphère magique et mystique. Cet endroit abritait un esprit féminin, protecteur de la forêt et des cours d’eau, la Dame Bleue. Aux deux solstices, une grande cérémonie druidique honorait la bienfaisance et la sagesse de la Dame Bleue. La première célébration se déroulait lors de la nuit de Yule (la nuit la plus longue de l’hiver). Les villageois les plus purs (enfants, vierges, druides, chefs, patriarches) jetaient sur le chemin menant à la clairière sacrée des colliers de fleurs séchées teintes en bleu dans les cours d’eau rencontrés afin de réveiller la Dame Bleue, recevoir sa bénédiction et ainsi s’offrir des récoltes en fruits et des chasses abondantes. On « réveillait » la Dame Bleue. Lors du solstice d’été, une autre  cérémonie accompagnait le retour progressif à une nature endormie pendant la journée et la nuit de Litha, dans l’attente de l’hiver. Si le protocole semblait similaire, les grains d’orge et de blé se substituaient aux fleurs séchées. Au cours des siècles, la Dame Bleue perdait de sa superbe malgré les recherches acharnées de deux rois de France, Charles V et Henri IV, tombés amoureux de sa beauté surréelle et son culte devint de plus en plus erratique. Heureusement, depuis 2002, la ville de Lieusaint célèbre sa muse et redonne vie à son patrimoine celtique au travers d’un festival interculturel où le bleu habille les participants.

Voici la Dame Bleue…

LE BLEU DE CHAUFFE

Dame bleue tient dans une petite boîte à l’intérieur de laquelle  on découvre uniquement des cartes, au nombre de cinquante cinq, illustrées par Boris Courdesses. Le travail graphique nous plonge instantanément dans l’univers des légendes et mythologies celtiques. On découvre 39 cartes Personnages (13 guerriers, 13 villageois, 13 érudits), 14 Apparitions de la Dame Bleue et une carte Solstice, le tout complété par un agréable livret de règles. Edité conjointement par la ville de Lieusaint et les XII Singes, on apprécie le soin apporté à ce jeu de cartes.


DES REGLES AVEC QUELQUES BLEUS

Le but du jeu est de remporter des épreuves (gain de cartes), le joueur avec le plus fort total l’emporte.
La dame bleue se déroule en trois phases :
1. l’organisation de l’épreuve
Le joueur se défausse de cartes non souhaitées et complète sa main à cinq cartes. Ensuite, il tire une carte. Parmi ses cartes en main, il en choisit une qui constituera l’enjeu de la manche en cours et la pose, face cachée, au centre la table.

Exemple : si l’organisateur de l’épreuve choisit la carte Chasseur ci-dessus en tant qu’enjeu, le vainqueur gagnera 6 + 3 + 3 soit 12 points.

2. la désignation d’un champion
Les autres joueurs posent devant l’organisateur une carte face cachée s’ils le souhaitent, ce sont les cadeaux proposés. L’organisateur ne conserve que le cadeau le plus élevé. Chaque carte Personnage possède trois valeurs en Vitalité, en Habileté et en Sagesse. L’organisateur devra choisir entre garder le cadeau (garder la carte et désigner le donneur comme champion) ou donner une carte supérieure au propriétaire de la meilleure offre et rester champion. Celui-ci prend connaissance de la valeur de la carte mise en enjeu et choisit une carte Personnage de sa main qui désigne dans quel domaine l’épreuve aura lieu (vitalité pour un guerrier, habileté pour un villageois, sagesse pour un érudit).

3. l’épreuve
Le champion joue une carte et à tour de rôle, les autres joueurs font de même. Cette action obligatoire élimine le joueur en cas d’impossibilité. Celui qui a posé la carte ayant la plus haute valeur dans la nature de l’épreuve remporte la carte mise en jeu. Il la pose devant lui face cachée. Les perdants piochent une carte en compensation. L’organisation échoit à la personne ayant abattu la carte de plus faible valeur dans l’épreuve demandée.
On recommence ensuite à la phase Organisation de l’épreuve.

Les cartes Apparitions de la dame bleue sont jouées en complément d’une carte Personnage avec l’application de son effet OU en remplacement d’une carte personnage, sa valeur étant le chiffre inscrit sur la carte. Elles peuvent servir en tant que carte Enjeu.

La partie se termine quand un joueur gagne sa troisième carte. On retourne toutes les cartes et celui qui obtient la plus haute somme devient le protégé de la Dame Bleue.
Il existe des variantes « enfant » ou « stratège » sur le site de l’éditeur.

Quelques cartes du jeu (photo éditeur).


DANS LE FROID DE L'HIVER, ON EN DEVIENT TOUT BLEU

Lorsqu’on ouvre la boîte de Dame bleue, la beauté des illustrations de Boris Courdesses frappe l’imaginaire et nous projette en des temps immémoriaux où le progrès ne « tuait » pas encore toute forme de poésie non cartésienne. On aspire à s’immerger dans des légendes millénaires menacées de disparaître à jamais, la faute à un savoir oral en constante régression. La lecture des règles freine notre impatience en révélant des mécanismes d’une originalité douteuse, un jeu de « bataille » agrémenté de quelques cartes Action. Cette succession d’épreuve basique n’enchante pas les aspirants volontaires à une plongée vers un monde féerique teinté d’ambiance celtique.

Dame bleue adopte un ensemble mécanique qui fonctionne correctement. Malheureusement, l’esprit de ces participants ne s’éveillera à aucun moment en s’évadant, le temps d’une partie, vers des univers merveilleux, sombrant plutôt dans une linéarité ennuyante. Malgré sa durée raisonnable, une vingtaine de minutes, la plupart des joueurs souhaitent passer rapidement à un jeu plus intéressant, sans se soucier de concourir pour la victoire. On attendait une imbrication davantage étroite entre le thème développé et les mécanismes proposés. En s’inspirant d’une légende locale millénaire, on aurait apprécié une transposition thématique moins artificielle. Les concepteurs du projet n’ont pas inclus une note pédagogique à l’intérieur du livret de règles sur l’histoire de la Dame bleue, un oubli dommageable.

Toutefois, Dame bleue séduira les amateurs de jeux sans prétention, avec quelques astuces stratégiques, lors des déroulements des épreuves, doit on miser sur la victoire d’une carte ou privilégier la possibilité de compléter sa main, afin d’éviter une élimination précoce. En restant objectif, Dame bleue, sans susciter un véritable enthousiasme, recèle suffisamment de qualités pour se ranger dans les jeux de cartes honnêtes, et pour certains, plaisants à jouer. Il participe modestement à la préservation de notre héritage culturel, de notre patrimoine. Utilisé comme outil pédagogique, Dame bleue relaie un savoir millénaire, et devient un mode de transmission séduisant.

La conclusion de à propos du Jeu de cartes : Dame Bleue [2006]

Auteur Amaury L.
40

Dame bleue, projet commun de la ville de Lieusaint et de l’éditeur XII Singes, manque de charisme ludique pour séduire un panel de joueurs important. Sa principale qualité réside en tant qu’outil pédagogique original permettant une transmission culturelle des légendes traditionnelles qui ont rythmées la vie de nos ancêtres durant des milliers d’années. Les illustrations magnifiques de Boris Courdesses sauvent Dame bleue d’une disparition éternelle du monde des jeux de société, en raison de mécanismes éculés et manquant de dynamisme. Froid à en devenir tout bleu !

On a aimé

  • Le jeu tourne bien
  • Illustrations magnifiques
  • Règles simples

On a moins bien aimé

  • Mécanismes vus et revus
  • Transposition thématique artificielle
  • Règles imprécises
  • Variante « Stratège » inintéressante

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