Critique Origine #3 [2008]

Avis critique rédigé par Manu B. le mercredi 23 juillet 2008 à 13h53

Les univers multiples

"Sais-tu qui je suis ? Sais-tu où tu te trouves ? Oh, Malenfant... Moi je te connais bien. Et tu es précisément ce que tu as toujours été, un incorrigible cadet de l'espace. C'est pour ça que nous avons fini par échouer ici, n'est-ce pas ? Je me souviens combien j'aimais t'entendre parler lorsque nous étions gamins. Pendant que tous les autres se pelotaient au drive-in, tu me faisais des conférences sur l'espace, la nouvelle frontière, le ciel, que tu voyais comme une ressource prête à être exploitée par l'humanité..."
On prend les mêmes et on recommence. Reid Malenfant est toujours un cadet de l'espace, il en veut toujours à la NASA de ne pas pouvoir voler comme les autres astronautes et Emma est encore embarquée dans un des mauvais plans de Malenfant: elle a disparu dans un anneau surgi de nulle part alors qu'ils survolaient une plaine d'Afrique. Cet évènement extraordinaire coïncide avec la disparition de notre bonne vieille lune et de son remplacement en lieu et place par une lune de couleur rouge et de diamètre sensiblement plus important. Incidemment, les effets de marée sont plus importants sur Terre et la demande de Malenfant pour se rendre sur cette lune pour chercher Emma passe après les priorités de survie (lutte contre les marées, les tremblements de terre, etc. etc.). Mais il parvient à ses fins et décolle en compagnie d'une certaine Nemoto...
On y a cru. On s'était dit que Stephen Baxter ne nous refaisait pas le coup d'Evolution avec Origine, qu'il allait trancher avec Temps et Espace, qu'il allait arrêter de nous bassiner avec ses histoires de physique, d'espace-temps, de mécanique quantique, tous ces trucs barbants de science. Raté. On est en pleine hard-science et ceux qui vous disent le contraire vous ont menti: la paléoanthropologie est aussi une science. Mais au lieu de vous embarquer dans des trous noirs, aux confins de l'univers à travers des concepts de physique quantique, il préfère nous laisser ici à 1.28 seconde lumière de la Terre, sur la lune. Sauf que cet ici est dans cet univers... ou dans un autre. Ou dans l'espace de probabilités de l'infinité d'autres univers. Ouf! On a échappé au pire.
Et même si la grande partie de cet ultime volet est consacrée aux hominines (hominini), Stephen Baxter ne nous refait pas le coup d'Evolution. Enfin, un peu quand même, mais c'est un peu plus subtil et beaucoup plus plausible. Cependant, le comportement de ces hominines, leurs états d'âme (s'ils en ont une, dixit Nemoto), tout ça n'a pas d'importance; c'est juste histoire de distraire le lecteur, puisque la paléoanthropologie n'est qu'une science basée sur la spéculation. L'important dans ce roman se situe dans les cent - cent cinquante (en étant large) dernières pages où l'on comprend pourquoi la série a été intitulée "les univers multiples". C'est dans ces lignes que l'on comprend pourquoi Origine est un roman de synthèse et de point final à la trilogie. Il est donc normal qu'on nous explique enfin de quoi il retournait (Je vous laisse la surprise mais on sait pourquoi il y a eu Temps puis Espace puis Origine. Et pourquoi il aurait pu y avoir d'autres romans.)
Revenons un instant sur nos amis les hominines. D'aucuns trouveront le roman un peu brutal, un peu sanglant. Il me semble - car je n'y étais pas- que les batailles se déroulant au moyen-âge, n'étaient pas exemptes d'une certaine barbarie d'un manque de "finesse" pour peu que cela soit efficace, il n'y a pourtant qu'un petit millénaire, lorsque le monde était soit disant civilisé. Mes sources ne sont pas fiables à 100%, mais j'imagine que ce ne devait pas être mieux il y a quatre millions d'années! Plus sérieusement, ce qui est le plus intéressant est de mêler dans un même milieu à la fois des Australopithèques, des Homo Erectus, des Néanderthaliens et des Homo Sapiens Sapiens. Dans un tel bouillon d'hominines, qui sait quel être aurait été le plus apte à la survie ? Si les hommes modernes ont la faculté de s'adapter plus facilement et ont l'avantage du plus gros cerveau (sans pour autant forcément être plus intelligents), ils n'ont pas la force physique de rivaliser avec leurs cousins. Verdict ? Un match nul pour Stephen Baxter, car si l'homme moderne est capable de conceptualiser, de déchiffrer et résoudre des problèmes compliqués, cette complexité est aussi la source du mensonge, la source de malveillance et de la folie, qui ne servent pas à grand chose en pleine nature face à la sauvagerie du milieu. Parfois, il faut juste tuer-manger-dormir pour survivre. C'est tout un état d'esprit pour subsister en milieu hostile encore faut-il saisir à quel point il est parfois simple. Mais justement, comme il l'avait écrit dans Evolution, Baxter tente de nous mettre dans l'esprit des ces hominines. Et cette description hominale n'est une fois encore qu'une vue de l'esprit, pure imagination (spécialement avec Ombre et Joshua). Certains diront que ce n'est qu'un roman (et pas un papier pour Nature) et que cela apporte la petite touche poétique. Moi, je n'y crois pas une seconde. Comment coucher sur le papier ce qui se passait vraiment dans leurs têtes ?
Ceci étant dit, ce troisième volet est bien écrit, parfois passionnant et son dénouement est brillant. Il risque de remettre en cause la compréhension des deux premiers volets de la trilogie, tout comme l'a fait Transcendance. Mais ceux qui ont aimé Temps et Espace risquent d'être un peu déçus car le voyage ne se déroule ni à l'autre bout de la galaxie, ni dans un lointain futur. Origine est d'abord une histoire de singes.

La conclusion de à propos du Roman : Origine #3 [2008]

Auteur Manu B.
80

Pas décevant, mais moins vertigineux que Temps et Espace, Origine est certainement le plus accessible de la trilogie. Stephen Baxter démontre une fois de plus qu'il est l'un des auteurs majeurs de ces dix dernières années.

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