Critique Les dépossédés [2000]

Avis critique rédigé par Manu B. le samedi 9 septembre 2006 à 10h50

L'utopie anarchiste

"Il y avait un mur. Il ne semblait pas important. Il était formé de pierres non taillées cimentées sans soin. Un adulte pouvait l'escalader. Là où il croisait la route, il n'y avait pas de porte, il s'estompait en une simple figure géométrique, une ligne, une idée de frontière. Mais cette idée était réelle. Elle était importante. Durant sept générations, il n'y avait rien eu de plus important au monde que ce mur..."
Shevek est originaire d'Annares, l'autre planète du système, où ils se sont installés. Les hommes étaient pourtant arrivés sur Urras et pensaient être unis. Une partie est pourtant partie il y a cent soixante dix ans pour ne jamais avoir de contact avec Urras. Et pour fonder une utopie anarchiste. Les décennies ont passé et ni l'une ni l'autre ne sait comment est la vie sur l'autre planète. Mieux, moins bien, chacun ne vit désormais que sur des idées du passé. Shevek d'Annares se rend donc sur Urras...
C'est bel et bien une parabole de notre monde que les dépossédés est censé représenter. Sur Anarres, il y a cette société anarchiste qui malgré toutes les volontés ne cesse d'être bureaucratique, et de l'autre Urras, dont le personnage ne va découvrir qu'une seule des facettes puisqu'il arrive en terre capitaliste en A-Io. Pas besoin d'être futé pour comprendre quelle est l'analogie entre cet univers et le nôtre: c'est la critique du capitalisme et son exploitation de l'Individu, thème maintes fois galvaudé dans la littérature de la sociale fiction. D'autant plus que cette anarchie sur Annares est, sur de nombreux points, bien pire à vivre en terme de confort de vie, d'indépendance morale et liberté individuelle.
Mais au-delà de l'aspect politique, ce roman a quand même une qualité: une écriture et une ambiance que l'on retrouve très peu en science fiction et que seules les belles plumes comme J. G. Ballard possèdent, et qui mettent au centre du roman l'Individu. Comme dans la main gauche de la nuit, par exemple, Le Guin s'intéresse à l'Homme, et donne une énorme dimension humaine à ses personnages. Cet homme, Shevek est un être malheureux sur Annares, où il est contraint à vivre en communauté, où les usages de communautarisme restreignent toute notion de possession, comme le fait d'aimer une femme, de garder et d'élever ses propres enfants, ou bien d'avoir son propre logement individuel. Cet homme est un dépossédé, de ses convictions, de ses rêves, dans ce système inhumain bureaucratique. C'est pourquoi il part sur Urras, où ses talents pourront être exploités à bon escient. Or Urras n'est pas meilleure sur plusieurs plans.
Alors tout ça pour aller où ? Le Guin s'arrête à mi-chemin. La conclusion est un peu décevante dans la mesure où aucun système n'est parfait. Chose que l'on sait depuis longtemps. L'anarchie ne peut fonctionner, du fait seul de la nature de l'homme, qui a besoin de posséder. Et le capitalisme a ses défauts.
A l'instar de révolte sur la lune, ce roman politique décrit un système anarchique hautement improbable et impossible. Heureusement, la dame écrit formidablement bien.

La conclusion de à propos du Roman : Les dépossédés [2000]

Auteur Manu B.
60

Ursula Le Guin est un auteur qui écrit bien. Une certaine poésie teinte ses romans de couleurs pastel, avec comme une mélancolie ambiante. Mais si elle consacre magnifiquement son roman à ses personnages, c'est incontestablement au détriment du reste. Les dépossédés est donc un roman lent, sans action et au message politique engagé.
Prix Hugo 1975 Prix Nebula 1974 Prix Locus 1975

Acheter le Roman Les dépossédés en un clic

Nous vous proposons de comparer les prix et les versions de Les dépossédés sur Amazon, site de vente en ligne dans lequel vous pouvez avoir confiance.

Retrouvez les annonces de nos dernières critiques sur les réseaux sociaux

Sur Facebook | Sur Twitter